Un groupe de pays, d’entreprises et d’organisations de la société civile a assisté à la conférence de Lancaster House organisée par le gouvernement britannique à Londres en 2003. A l’issue de la Conférence, le groupe adoptait une déclaration de principes destinée à accroître la transparence des paiements et des revenus dans le secteur extractif. Ces principes sont connus sous le nom de « principes de l’ITIE » et constituent la pierre angulaire de l’Initiative. L’ITIE, l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives, est une démarche mondiale qui a pour objectifs de promouvoir la gestion ouverte et responsable des revenus du secteur extractif, d’ouvrir le débat et de renforcer la confiance soutenue par une coalition composée de gouvernements, d’entreprises et de la société civile. Le Mali y a adhéré depuis 2006 et reste conforme à cette norme ITIE. Dossier spécial sur une Initiative qui est appelé à imposer la redevabilité sociale à l’Etat sur l’utilisation de ses ressources minières.
Les avantages de la norme ITIE
Les pays riches en ressources, qu’elles soient pétrolières, gazières ou minières, ont tendance à présenter une activité économique inférieure à la moyenne, une fréquence des conflits plus élevée et à souffrir d’une mauvaise gouvernance. Ces effets ne sont pas inévitables et on peut espérer qu’en encourageant à plus de transparence dans les pays riches en la gestion de telles ressources, certains des impacts négatifs potentiels seront atténués.
Les avantages pour les pays qui mettent en œuvre cette norme ITIE comprennent un meilleur climat d’investissement, et constituent un signal clair aux investisseurs et institutions financières internationales et indiquent que le gouvernement s’engage à plus de transparence. L’ITIE contribue également à renforcer la responsabilité et la bonne gouvernance, ainsi qu’à promouvoir une plus grande stabilité économique et politique. Cela peut à son tour contribuer à la prévention des conflits trouvant leur source dans les secteurs pétrolier, minier et gazier.
Les avantages pour les compagnies et investisseurs se centrent sur l’atténuation des risques politiques liés à la réputation. L’instabilité politique causée par une gouvernance opaque est une menace indéniable pour les investissements. Dans les secteurs extractifs, où les investissements ont une forte densité de capital et dépendent d’une stabilité à long terme pour générer des retours, la réduction de cette instabilité est bénéfique pour les affaires. La transparence des paiements faits à un gouvernement peut également aider à démontrer la contribution au pays que constituent ces investissements.
Les avantages pour la société civile proviennent de la quantité d’information dans le domaine public concernant ces revenus que les gouvernements gèrent au nom de la population, leur conférant par-là plus de responsabilité.
Les 7 exigences de la norme ITIE
- Suivi du Groupe multipartite : Mise en place d’un groupe tripartite composé de représentants du gouvernement, des entreprises extractives et de la société civile avec un Comité de pilotage chargé de la conception, de la mise en œuvre et du suivi du processus ITIE.
- Publication régulière et ponctuelle de rapports : Il importe de retenir ici que le premier rapport doit être publié dans un délai de 18 mois et par la suite chaque année. Les rapports ne doivent pas porter sur des exercices antérieurs aux deux derniers exercices comptables révolus. Ils doivent donner des informations sur les flux financiers générés par l’exploitation industrielle.
- Informations contextuelles : La norme ITIE exige des informations entre autres sur le cadre légal et le régime fiscal sur une vue d’ensemble des industries extractives (IE). Ces informations doivent aussi porter sur la contribution des industries extractives à l’économie du pays et les données de production pour l’exercice fiscal couvert. La participation de l’Etat dans les IE, la répartition des revenus provenant de celles-ci, les informations supplémentaires sur la gestion des revenus, le registre et l’octroi des licences, la propriété réelle et les contrats font également partie de ces informations contextuelles de la norme ITIE.
- Exhaustivité des données : Cet aspect concerne la divulgation gouvernementale complète des revenus issus des industries extractives, ainsi que celle de tous les paiements significatifs versés au gouvernement par les entreprises pétrolières, gazières et minières. L’exhaustivité des données exige la définition des taxes et des revenus qui doivent être couverts dans le rapport ITIE. La norme demande aussi la définition des entreprises et des entités de l’Etat qui sont tenus de faire une déclaration.
- Fiabilité des données : Ici, il faut le respect des normes internationales d’audit, comme la nomination d’un administrateur indépendant, l’accord sur les Termes de référence de l’administrateur indépendant, l’évaluation des pratiques d’audit et d’assurance et la validation du rapport ITIE préalablement à sa publication.
- Débat public : Le groupe multipartite doit s’assurer que le rapport ITIE est compréhensible, activement promu, accessible au public et qu’il contribue au débat public. Ce groupe est encouragé de publier des rapports ITIE qui sont consultables électroniquement.
- Impact & enseignements tirés : Le groupe multipartite est tenu d’entreprendre des actions à partir des enseignements tirés, d’identifier, de comprendre les causes des écarts et de tenir compte des propositions d’amélioration de l’administrateur Indépendant. Il est aussi tenu d’évaluer les résultats et l’impact de la mise en œuvre de l’ITIE sur la gouvernance des ressources naturelles.
L’ITIE est chargée de maintenir à jour et d’assurer la bonne application de la Norme. Les pays mettent en œuvre la Norme ITIE pour assurer une divulgation pleine et entière des impôts et autres versements effectués par les entreprises pétrolières, gazières et minières aux gouvernements. Ces paiements sont divulgués dans un Rapport ITIE permettant aux citoyens de constater par eux-mêmes les montants perçus par leur gouvernement et issus des ressources naturelles de leur pays. C’est seulement si ces chiffres sont expliqués et qu’il existe un débat public sur la meilleure façon de gérer les richesses issues des ressources d’un pays que la transparence peut donner lieu à une plus grande prise de responsabilité. C’est pourquoi la Norme ITIE requiert des rapports compréhensibles, activement promus et contribuant au débat public. La Norme contient une série d’exigences que les pays doivent respecter afin d’être dans un premier temps acceptés en tant que pays candidats à l’ITIE pour à terme devenir des pays conformes à la Norme, qui est supervisée par le Conseil d’administration international de l’ITIE, composé de représentants du gouvernement, des entreprises et de la société civile.
Mise en œuvre de la norme dans les pays
Pour devenir un candidat à l’ITIE, le pays doit remplir les exigences d’adhésion. Une fois celles-ci remplies, la mise en œuvre de l’ITIE implique une gamme d’activités visant à renforcer la transparence des revenus tirés des ressources. Ces activités sont documentées dans les plans de travail des pays. Le développement d’un plan de travail, discuté et convenu par les parties prenantes, est l’une des exigences d’inscription à l’ITIE.
Pour obtenir le statut conforme, un pays doit compléter sa validation de l’ITIE dans les deux ans et demi après être devenu un pays candidat. Une fois qu’un pays est conforme, il doit repasser sa validation au moins tous les 5 ans ou à la demande du Conseil d’administration international de l’ITIE. La validation est un élément essentiel comme norme internationale. Elle fournit une évaluation indépendante des pays mettant en œuvre l’ITIE et quelles mesures ils devraient prendre pour réaliser leurs progrès plus rapidement. Un validateur indépendant effectue l’évaluation afin de savoir si toutes les exigences énoncées dans les règles de l’ITIE ont été respectées. Le Conseil d’administration de l’ITIE, à travers le Secrétariat, supervise le processus de validation et passe en revue tous les rapports de validation.
Si le Conseil d’administration estime que le pays respecte toutes les exigences de l’ITIE, le pays sera désigné comme conforme à l’ITIE. Lorsque le rapport de validation montre qu’un pays a fait des progrès mais ne répond pas à toutes les exigences, il ne restera qu’un candidat. Lorsque la validation indique qu’aucun progrès significatif n’a été réalisé, le Conseil d’administration peut révoquer le statut de candidat du pays.
Selon nos sources, le Mali a adhéré à l’ITIE en août 2006 avant la plupart des autres pays membres, sa déclaration de conformité est intervenue le 29 août 2011 après la publication et la dissémination de 7 rapports et d’autres actions supplémentaires et innovantes, comme le projet de mise en œuvre au niveau local et la publication d’informations encouragée (propriété réelle, sous-traitants). Notre pays est devenu ainsi le 12ième Etat conforme à l’ITIE. Au Mali, la mise en œuvre de l’ITIE est assurée par trois structures à savoir : le Comité de Supervision, le Comité de Pilotage, présidé par le ministre des Mines et un secrétariat permanent. Le Comité de Supervision définit les principales stratégies et lignes d’action. Quant au Comité de Pilotage, il est chargé de l’exécution des décisions prises par le Comité de Supervision. Le secrétariat permanent assure la mise en œuvre au quotidien du programme de travail de l’ITIE. En décembre 2011, le gouvernement a créé un nouveau Comité ITIE chargé des questions de protection de l’environnement et du développement local. Il importe de souligner que conformément aux règles de l’ITIE, le Mali doit à nouveau valider sa conformité à cette Norme avant le 29 août 2016. Notons que ce sont 50 pays qui sont engagés dans la mise en œuvre de la Norme l’ITIE, 31 pays conformes aux exigences et 49 pays ayant publiés des rapports.
Dieudonné Tembely