Tribune / SADIOLA et YATELA : La population humiliée pour la Semos-SA

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Il y a environ deux mois les jeunes de la commune de Sadiola envoyaient une lettre à la SEMOS (Société d’Exploitation des Mines d’Or de Sadiola). Cette lettre comporte 10 points de doléances. Le premier point demande le départ du Directeur des ressources humaines. L’ARCSF (Association des Ressortissants de la Commune de Sadiola en France) étant un partenaire privilégiée de la SEMOS et l’interlocuteur principal de la population a été informée de la situation. Compte tenu de la pertinence des doléances, l’association a exprimé son soutien aux jeunes et a exhorté les deux parties à la concertation et la négociation.        

Une première rencontre a eu lieu en présence du préfet de Kayes, du maire de Sadiola et du sous préfet de Sadiola. Cette rencontre a permis d’avoir plus de précision sur les raisons des frustrations de la jeunesse en matière d’emploi de la SEMOS. Le Préfet de Kayes les a renvoyés à la négociation et leur a promis une autre rencontre dans deux semaines qui permettra le retour du Directeur général de la SEMOS qui était absent.

A l’expiration de ce délai, les jeunes n’ayant pas eu de proposition, ont décidé de manifester le jeudi 8 juillet en mettant des barrages sur tous les accès des deux sites (SADIOLA et YATELA). La manifestation était 100% pacifique.                                

 

16 blessés dont 4 graves                        

Mais soudainement, plusieurs véhicules des forces de l’ordre venant de Kayes ont été envoyés sur place. Environ 400 gendarmes. A leur arrivée sur YATELA, ils se sont attaqués aux manifestants qui n’avaient ni bâtons, ni couteaux, ni armes, ni même l’intention de faire de la violence. C’est dans ces circonstances qu’il y a eu des accrochages qui ont fait plusieurs blessés à YATELA dont quatre graves. Les mêmes gendarmes ont continué sur Sadiola dans l’intention d’aller mater les manifestations qui se trouvent sur le site de Sadiola. A leur arrivée à Sadiola, ils se sont aperçus de l’ampleur de la situation au vu de la présence de toute la population des 46 villages de la commune. Mais ils se sont attaqués à un petit groupe isolé tenant un barrage vers l’usine. Ils ont employé des gaz lacrymogènes, plusieurs coups de feu ont été tirés par les forces de l’ordre.

La population soutient qu’il y avait  des balles réelles, mais pour les autorités c’était des coups de feu dissuasifs. Mais il y a eu un bilan de 16 blessés dont 4 graves dans la population et 11 blessés légers parmi les forces de l’ordre. Des matraques, des cartouches et des douilles ont été saisies par la population. C’est dans cette situation que le député  Moussa Cissé a été informé de la situation. Celui-ci, inquiet de la situation, connaissant bien les problématiques de la commune et omniprésent quand il faut trouver des solutions aux  problèmes entre la SEMOS et les populations de Sadiola, a téléphoné au maire de Sadiola pour dire aux manifestants d’apaiser la colère et qu’il se rendra à Sadiola dans 72 heures pour trouver ensemble une solution à cette situation qui devenait incontrôlable.                       

C’est ainsi que le lundi 12 juillet, une forte délégation composée de deux députés, du préfet de Kayes, du président du conseil de cercle de Kayes, du maire de Kayes, du représentant du ministère des mines et des autorités régionales s’est rendue à Sadiola. 

Cette rencontre les a renvoyés encore à la négociation, car la SEMOS a dit qu’elle ne voyait pas de motivation au départ de son Directeur des ressources humaines. D’autres doléances ont eu des réponses mais la SEMOS reste inflexible sur plusieurs points. Les 400 gendarmes restent sur place sous couleur du maintien de l’ordre. Mais les forces de l’ordre s’emploient à la provocation et à l’intimidation.                       

Mais tout se complique depuis mercredi 14 juillet. Quelques jeunes font passer la menace d’une nouvelle manifestation pour le jeudi 15 juillet en collant des affiches un peu partout. Une patrouille de gendarmes tombe sur deux jeunes en train de coller une affiche. Sur cette affiche, il était mentionné que les jeunes n’ont pas été satisfaits de la rencontre précédente et qu’ils envisagent une nouvelle mobilisation en précisant que les employés de la SEMOS n’ont qu’à se protéger.                       

C’est l’alibi en or que les forces de l’ordre  attendaient pour passer aux arrestations et gardes à vue abusives. 10 jeunes ont été conduits  à la grande prison de Kayes après avoir passé trois jours de garde à vue et d’interrogatoire. Le maire et ses trois adjoints ont été convoqués à la gendarmerie de Kayes pour les interroger et les intimider. 21 personnes sont convoquées à la gendarmerie de Kayes dont 6 femmes qui ont fait la cuisine pour les manifestants. Il est clair aujourd’hui que la population a été humiliée pour la SEMOS.             

Un colonel s’est présenté à la mairie pour demander le maire. Celui-ci étant en face se présente et invite son hôte dans son bureau. Le colonel lui fait savoir que ce n’était pas la peine. Il incline son identité par ces mots : « Moi je suis un tueur on m’a envoyé à Sadiola pour faire la guerre, alors je suis venu pour tuer ou être tué. Moi je ne monte de grade que quand je tue ».                                     

Le maire lui répond : « Il n’y a pas de guerre à Sadiola tu as quitté chez toi, tu es venu chez toi ».

Kaou  SISSOKO

Secrétaire général de l’ARCSF


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