Sites d’orpaillage de Folona: Les paysans roulent sur l’or 

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Le ministère de l’agriculture pour relever le défi qu’il s’est assigné pour  la campagne agricole 2011- 2012, avait fait un appel de retour dans les champs aux paysans agriculteurs qui sont sur les sites d’orpaillage. Mais cet appel du MA, accompagné des promesses aux paysans,   semble tomber dans l’oreille des sourds à Kadiolo. La majorité des bras valides de cette localité sont convaincus plus sur  la rentabilité de l’or  par rapport à l’agriculture. Enquête.

  La  ruée vers l’or et sur les sites d’orpaillage dans le cercle de Kadiolo ne se raconte plus mais se vit, cela, en raison du fait qu’elle reste incontrôlée. Vieux, jeunes et femmes dans ce cercle,  de tous les statuts se sont majoritairement dirigés vers ces terres promises, frontalières avec Korogo, une région située au nord de la Côte D’Ivoire. En vue d’endiguer leur souffrance et parvenir à joindre les deux bouts, suite aux effets néfastes de la rébellion qui a divisé la Côte D’Ivoire  jusqu’en Avril 2011.

Zone habitée par les Sénoufo et les Tagoua dont l’activité traditionnelle et dominatrice se concentre au commerce et à l’agriculture, la découverte des sites d’orpaillage traditionnels tels que Machogô (qui a fermé ses portes suite à des pertes de vie énormes, dues à des problèmes d’hygiènes, d’alimentation),  Alhamdoulilahi, Sindi, Kourani, dans la commune de Fourou et Papara sur la terre Ivoirienne, est de nos jours méconnaissable. Car abritant désormais une nouvelle source d’enrichissement, qui prime sur les deux premières.

Un or, qui brille pour tout le monde!
Au constat, il n’est point exagéré d’affirmer que les paysans ont répondu par un pied de nez dans le cercle du Folona à l’appel et la main tendue des dirigeants des secteurs agricoles envers eux pour relever les défis  de la campagne agricole 2011 2012, qui se planche à 10 millions de tonne de céréales et 500 000 tonnes de graine de coton.
Aux dires de certains orpailleurs et transporteurs appelés « Sotramamoto », le succès du retour des gens dans les champs  n’est plus envisageable. A les en croire,  c’est la survie de toute la population de cette localité qui est liée de près ou de loin aujourd’hui à l’orpaillage traditionnel.
Les transporteurs en Moto, appelés « Sotramoto » qui sont les plus capables à faire le trajet  que les véhicules à cause de l’état de la route, tirent eux aussi leur compte dans cette activité nouvelle.

Pour cela, les motos « Camiko » ont été remplacées par les  grosses cylindrées chinoises. Les prix de transport varient selon le lieu de départ. De Zégoua à Alhamdoulilahi, le prix se discute  de 3000 F à 5000 F CFA et les clients ne manquent jamais à l’appel. Le gros de la clientèle est constitué par les commerçants, bourgeois du milieu, qui importent d’importants lots de marchandises, notamment les produits de consommation de première nécessité et autres vers les sites. Du coup, dans l’unique marché de la dite localité, les prix des  produits sont doublés, voire triplés, sans un moindre grondement  des consommateurs. « Tant qu’il y a de l’or, nous n’accordons aucune importance à l’inflation » martèle gaillardement M. Tangara, un orpailleur bien connu dudit site.

Les vendeurs d’électricité, qui ont des groupes électrogènes ou des moteurs à moulins ne sont pas eux aussi au creux de la vague. Ils donnent l’électricité en fonction  du besoin  de chaque amateur. Une ampoule est payée à 1000 F ou 15000F par mois. Ils tirent plus de bénéfice que l’EDM, surtout que le paiement se fait au comptant.

Quant aux restauratrices, elles amassent quotidiennement des sommes d’argent colossales et s’en foutent de la qualité du service offert. Pour rappel, la raison de la fermeture du Site de Machôgô dans la commune de Misseni  relève en grande partie du problème d’hygiène qui a causé d’importants dégâts en vie humaine.

Les propriétaires terriens, eux aussi ne se plaignent aucunement de la nouvelle ambiance de leur localité. Pourtant, ils sont pour la plupart des notables du village non loin du Site ou des Chasseurs « Donso ». Ils ont leur part sur chaque gramme d’or vendue, 18 000 FCFA et même plus, selon certaines sources.

L’or et les vrais acteurs
Les orpailleurs traditionnels sont ceux qui creusent les trous pour en extraire l’or par des méthodes artisanales. Ils sont organisés de façon structurale. Une véritable chaine, dont le premier maillon est celui qui a payé l’espace. Il est le maître et assure la ration alimentaire de ses employés qui sont parfois trois ou quatre, de l’ordre de 3000 F CFA par jour. Et quand on découvre de l’or, après la vente, la somme est divisée en deux entre lui et ses employés. Ces employés sont  ceux qui creusent les trous, ceux ou celles qui lavent et ceux qui évacuent le sol et les cailloux du trou.

Selon un orpailleur Amadou Guido,  le site est plus rentable que le champ et même plus que d’autres activités menées au niveau de la frontière. A l’en croire,  ils gagent toujours malgré les difficultés. Car, à ses dires, tous les jours et à chaque trou creusé, ils ont quelque chose.
Ainsi, l’or qu’il soit noir  ou jaune, est vendu  au même prix. La plus petite unité de la balance est vendue à  75O F CFA, la deuxième est appelée dix. Un dix d’or  est offert à 1 500 F et dix « dix » équivaut à un gramme qui est cédé à  plus de 15 000 F selon les lieux. Par exemple à Alhamdoulilahi  comme dans les autres sites à travers le pays, la même quantité est  cédée à 18 000 F CFA.

 A Papara, le vendeur cède un « Dix » au prix de  15 OOO FCFA au lieu de 18 000 F CFA aux acheteurs. Les 3000F de moins  représentent les frais  dus aux propriétaires terriens.

Une clientèle qui tienne à satiété la corde de la bourse!

Ce sont des hommes d’affaires qui ont tous leurs chefs au niveau central, à Bamako. Ces hommes, plus d’une centaine sur les Sites, peuvent traiter  individuellement, des affaires de plus de vingt millions. Ils payent l’or et  l’amènent à Bamako où ils vendent le gramme payé sur le site à 18 000F CFA ou 15 000 F CFA à 35 000 F CFA. Ce sont de vrais hommes d’affaires  qui n’affichent aucune peur à sillonner toute la zone  en moto en ayant des millions en poche.
Selon de nombreux témoignages,  il n’est point question de fermer ces sites qui nourrissent des milliers de personnes  de statuts divers.
 Aux côtés de nos compatriotes, les ressortissants de 18 pays étrangers (selon les documents de recensement) cherchent leur gagne pain à Alhamdoulilahi. Qui donne l’aspect d’une « grosse »  ville dressée au bord du fleuve dont la fierté est ses sites d’orpaillage  et sa honte des habitations faites par des branches d’arbres et des plastiques.
On y note aussi la présence de certains agents des forces de l’ordre de l’armée malienne, des radios de proximité et des lieux de débauches. Et tout le monde y habite quel qu’en soit son niveau de richesse. Sa population est estimée à celle de la ville de Sikasso et son marché n’a rien à envier à celui de Dibidani à Bamako. On y trouve tout sur place, sauf le bon cadre de vie.
 
Boubacar Yalkoué
Envoyé spécial à Folona  

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