Avec une production d’une valeur de plus de 987 milliards de FCFA, le Mali affiche des exportations de plus de 70 tonnes d’or en 2015. Ce qui est un record comparé aux 53,2 tonnes de 2014. Selon nos sources, ce résultat est dû en partie à une forte augmentation de la production artisanale. Preuve que les mines d’or du Mali génèrent des centaines de milliards de F CFA chaque année. Troisième grand producteur d’or en Afrique, après l’Afrique du Sud et le Ghana, le Mali demeure l’un des pays les plus pauvres au monde. De cette production, l’Etat malien et les populations, surtout celles installées sur les sites n’y gagnent presque rien. Elles ne sont souvent affectées que par les retombées négatives découlant de l’utilisation des produits nocifs à la santé aux antipodes de la Norme ITIE à laquelle a souscrit le Mali.
Pour rappel, depuis 1990, l’extraction d’or est devenue une activité économique majeure du Mali, et la deuxième source de revenus d’exportation après le coton. Cette rapide croissance a suscité de nombreux espoirs de développement, espoirs encore renforcés par la flambée du cours de l’or sur les marchés mondiaux depuis quelques années. Activité économique à fort potentiel, l’exploitation de l’or pourrait en effet contribuer à l’amélioration de la situation des droits de l’Homme en créant de l’emploi dans le secteur minier et en ayant un effet d’entraînement sur d’autres secteurs de l’économie. Elle devrait également améliorer les ressources de l’Etat et donc sa capacité à assumer des dépenses utiles pour la société comme l’éducation, la santé, les infrastructures. Enfin, l’implantation d’une mine dans une localité s’accompagne souvent de programmes de développement locaux. Pourtant, sur tous ces aspects, la contribution du secteur minier au développement malien est très faible, voire négative. Tout cela est dû en grande partie au code minier qui réserve à l’Etat une part minoritaire du capital des sociétés d’exploitation minière. L’Etat est donc systématiquement actionnaire minoritaire des mines d’or du pays, aux côtés des grandes entreprises internationales. Cette situation place l’Etat dans une position peu confortable. Car, il est à la fois régulateur et régulé, percepteur et contribuable, instance de contrôle et acteur économique. Toute chose qui est d’autant plus dommageable qu’il existe de forts conflits d’intérêts entre ses différentes fonctions. Ainsi, tandis que l’Etat-percepteur a intérêt à maximiser les recettes fiscales donc les taxes imposées aux entreprises, l’Etat actionnaire a intérêt à maximiser ses profits après impôts, donc à voir minorer la fiscalité. En assignant ainsi deux rôles différents aux mêmes représentants de l’Etat, la réglementation malienne, élaborée sous l’influence des bailleurs de fonds, dont la banque mondiale, contraint le gouvernement à un grand écart permanent et neutralise sa capacité à défendre les intérêts du peuple malien. Cette dualité est à chaque fois dénoncée car, on constate que lors des contrôles sur les sociétés, l’Etat partenaire fait face à l’Etat puissance publique. Dans des cas de conflit du travail ou de pollution environnementale, l’Etat malien a ainsi pris le parti des entreprises ou ignoré les violations dont elles étaient responsables.
Quid des exonérations accordées par l’Etat aux sociétés minières qui engendrent d’énormes manques à gagner et des conditions d’attribution des contrats miniers qui révèlent, malgré une évolution positive, plusieurs problèmes qui sont à l’origine des manques à gagner considérables pour l’Etat malien et ses populations.
Selon des sources, on constate une baisse progressive d’impôts au profit des sociétés minières au Mali. Car, le code minier de 1999 consacrait au Trésor malien 35 % de leurs bénéfices, au lieu des 45 % en 1991. Quant au code de 2012, il demande un versement de seulement 30 % des bénéfices au trésor malien.
Soulignons que selon le ministère en charge des Mines, la valeur totale des exportations d’or a atteint, en 2014, 863 milliards de F CFA, soit, plus de 70 % des recettes d’exportation totale du Mali. Mais elle n’a contribué au budget qu’à hauteur de 254,3 milliards de F CFA, soit 25 % des recettes budgétaires et 8 % du PIB. Et les populations à la base bénéficient peu de l’exploitation minière. Dans le domaine des emplois, les attentes sont loin d’être comblées. Faute d’emplois bien rémunérés dans ces mines, les jeunes se voient obligés d’émigrer vers l’Europe, souvent au péril de leur vie.
A retenir enfin que l’or est, depuis plus d’une vingtaine d’années, le premier produit d’exportation du Mali, loin devant le coton et le bétail sur pied. Alors, vivement une autre politique pour que l’or produit au Mali fasse le bonheur des Maliens.
Dieudonné Tembely
tembely@journalinfosept.com