Mines d’or Sadiola et Yatela : L’heure des inquiétudes tragiques

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Une concertation sur les activités minières n’est pas un exercice inédit à la SEMOS-Yatela SA, mais elle se révèle sous des facettes différentes lorsqu’elle intervient dans un contexte de rupture imminente entre les parties prenantes.
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rnC’est le cas des traditionnels échanges auxquels les acteurs impliqués dans l’exploitation minière sont annuellement conviés, depuis l’année 2003, par les sociétés exploitantes. La 5ème édition de ladite rencontre, qui s’est déroulée du 4 au 6 décembre dernier, ne s’est point singularisée par un faible intérêt des protagonistes concernés. Elle a drainé foule au village minier de Sadiola où se sont massivement retrouvés des élus de la région de Kayes, des représentants de la société civile, ainsi que de l’administration aux niveaux national, régional et local, des notabilités, etc.

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À la brochette de personnalités s’ajoutent le représentant personnel du ministre des Mines de l’Énergie et de l’Eau, puis de nombreux spécialistes en divers domaines de l’activité minière. La kyrielle d’invités du tandem SEMOS-Yatela S.A a été conviée à la réflexion sur une gamme non moins prestigieuse de sujets. Les communications avaient en effet trait, entre autres, aux retombées de l’extraction minière dans la zone, à la gestion environnementale, à l’impact des réalisations et initiatives de développement local, etc. Au programme des trois journées de concertations figuraient également des visites de contact avec certaines réalités de l’activité minière tels les carrières, les usines et bassins à boue sur les deux sites miniers, ainsi qu’une foultitude de projets du Plan d’Action pour le Développement Intégré de la Commune de Sadiola.
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rnLes multiples réalisations effectuées dans le cadre du PADI ne sont manifestement pas les seules merveilles revendiquées par les partenaires de l’État à Sadiola et Yatela. En dix années pour le premier et presque autant pour le second, les activités auront rapporté plus de 300 milliards de dividendes au Mali, pour respectivement 164 et 55 tonnes d’or produits sur les deux sites. Ce sont en tout cas les chiffres brandis aussi bien par l’État (18% des capitaux) que par Anglogold et Iamgold (38% des actions chacun) – dont la fierté découle également d’énormes autres formes de contribution à l’économie  nationale. Il s’agit d’investissements fixes à hauteur de centaines d’autres milliards F CFA, de contributions tout aussi significatives au trésor public par des impôts et taxes, etc. Ce n’est pas tout. S’y ajoutent également, en des proportions tout aussi importantes, le traitement salarial et l’assistance sociale de plus d’un millier d’employés dans les deux zones minières de Sadiola et Yetela.

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Ces acquis ne comprennent guère, à en croire les responsables des deux sociétés, les financements consentis pour participer à l’épanouissement socio-économique des population voisines, lesquels se traduisent par la prise en charge d’activités préventives de maladies comme le paludisme et le VIH-SIDA, par la réalisation et l’équipement d’infrastructures sanitaires et scolaires, entre autres. C’est dans ce cadre, en effet, que plus d’une dizaine d’écoles du 1er cycle et trois autres du second cycle ont vu le jour dans une zone où les exploitants miniers contribuent périodiquement à la formation et à la mise à niveau des scolaires. En sus, grâce à l’activité minière, plus de 9000 personnes sont approvisionnés en eau potable par un système de pompage à 250 kilomètres des lieux, puis une douzaine de borne-fontaine installée par les sociétés exploitantes. Qui plus est, les partenaires étrangers de l’État ne se reprochent pas une détérioration particulièrement dangereuse de l’écosystème, et pour cause.

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L’activité minière semble se dérouler, à Sadiola comme à Yatela, dans le respect rigoureux des règles en matière de gestion des déchets et d’utilisation de produits toxiques (cyanure, etc.). Seulement voilà : tous ces efforts d’accompagnement et de minimisation d’effets collatéraux ne paraissent pas suffisants pour apaiser la montagne d’inquiétudes ressenties par les populations, à mesure que l’activité tend vers sa fin. Telles qu’exprimées par leurs représentants à la 5ème édition de l’atelier de concertation, lesdites préoccupation ont trait essentiellement à la portion congrue qui revient à l’État malien, aux retombées peu visibles de la participation des mines au développement local et régional, entre autres. En tout état de cause, il s’agit de préoccupations habituelles mais revigorées à cause par la fin imminente des activités minières dans la zone concernée.

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En effet, toutes les deux mines se trouvent toutes à trois années environ de leur fermeture. Pour Sadiola, une prolongation de la durée de vie est envisageable mais tributaire de source énergétique supplémentaire ; tandis que la fermeture de Yatela a été déjà élaborée et évaluée. On comprend dès lors l’abondance des interrogations de la part des communautés et de tous ceux-là qui dépendent encore de l’activité minière. Le sort de milliers d’employeurs des deux sociétés, la pérennisation des acquis socio-économiques inhérents à la présence de ces derniers dans la zone, le maintien des équipements et infrastructures immobilières destinées à la destruction selon le code minier, et tutti quanti. Telles sont les grandes équations qui hantent actuellement les esprits, à en juger par la tribune de l’atelier annuel de concertation.

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Aussi ces questions transparaissent-elles dans une panoplie de recommandations issues desdites concertations au cours desquelles les participants se sont montrés particulièrement regardants sur l’identification des responsabilités en cas de déclenchement de problèmes de santé publique attribuables à l’activité minière. Pour clarifier cette question tragique, une étude épidémiologique a été commanditée en 2004, suite aux premières alertes sur des cas d’avortements signalés dans une dizaine de villages. En trois années de vérification dans la commune de Sadiola, l’équipe de médecins, sous la direction du Dr Soumaré Absétou N’Diaye, ne détient pas pour l’instant des données plus édifiantes que sa méthodologie de travail.

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Quant aux résultats sur l’existence ou non de germes à retardement, ils se font toujours attendre et demeurent tout aussi énigmatiques que la grande interrogation suivante : les populations de Sadiola et de Yatela seront-elles des victimes de gisements aurifère dont elles ne perçoivent suffisamment les retombées dans les justes dimensions ?
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rnA.Keïta
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