Ils étaient face à la presse le mercredi 31 octobre 2018. Au cours de ce face à face, ils ont dit que la production d’or de la mine de Loulo-Gounkoto était en hausse, ainsi que sa durée de vie. Ils nous ont fait savoir que des discussions étaient en cours avec l’Etat malien pour un règlement à l’amiable des différents portant sur les impôts et la TVA. Ces responsables sont Marc Bristow le Directeur Exécutif de Rand gold, le Directeur Régional du groupe Afrique de l’ouest Mahamadou Samaké et Mr Chiaka Berthé, le Directeur Général des opérations pour l’Afrique de l’ouest. Faut –il le rappeler, l’économie malienne est fortement dépendante de la production aurifère ces dernières années. Le Mali depuis le 12 siècle est un pays aurifère, si l’on se réfère au pèlerinage légendaire de l’Empereur Kankou Moussa à la Mecque en 1324.
Le pèlerinage à la Mecque de Kankou Moussa le rendit célèbre en Afrique du nord et dans le Proche-Orient. Il part pour l’Arabie en 1324, avec une suite composée de 60 000 hommes, 12 000 serviteurs et esclaves, des hérauts et palefreniers vêtus de soie et porteurs de bâtons d’or s’occupent des chevaux et des sacs. Moussa fournit tout ce dont a besoin la procession, fournissant nourritures et cadeaux aux hommes et aux animaux. Cette caravane, selon certains récits de chroniqueurs était composée 80 dromadaires portant entre 50 et 300 livres d’or en poudre chacun. Dans chaque ville qu’il traverse, Moussa offre ses richesses. Il a été aussi rapporté qu’il a construit une nouvelle mosquée dans toutes localités où il a passé un vendredi. Plusieurs historiens arabes ont écrit sur ce voyage qui est resté célèbre. Ils ont tous été impressionnés par la richesse du souverain et par l’importance de sa suite, dont le souvenir est rapporté par plusieurs sources. Sa rencontre avec le sultan mamelouk An-Nâsir Muhammad ben Qalâ’ûn en Egypte en juillet 1324 est documentée. Cependant, la magnificence des richesses du Sultan Moussa provoque des effets secondaires dévastateurs, ruinant l’économie des régions qu’il traverse. Au Caire, à Médine et à la Mecque, l’afflux soudain d’or provoque une dévaluation du métal jaune qui durera pendant dix ans. Le prix des biens de consommation connaît une forte inflation, le marché tentant de s’adapter à l’afflux de richesses accompagnant la venue du roi malien. Afin de freiner la chute du cours de l’or, Moussa emprunte à haut intérêt tout l’or qu’il peut emporter aux prêteurs du Caire. C’est la seule fois dans l’histoire qu’un homme a contrôlé directement le prix de l’or dans le bassin méditerranéen.
C’est à la suite de cette renommée, que beaucoup de sociétés minières ont élu domicile au Mali dont Rand gold qui est à 12,6 millions d’once produites à partir des mines d’or exploitées au Mali. Ladite société emploie 5000 personnes dont 96% sont des maliens. Elle dit avoir versé à l’Etat malien en 23 ans, 2,5 milliards de dollars U.S sous forme de dividendes et de taxes. Malgré tout cet effort financier, pourquoi parle-t-on encore de différents nés autour des impôts et taxes et qui se trouvent devant les juridictions compétentes, qui va certainement finir dans un règlement à l’amiable où il y aura des dessous de table au profit de nos gouvernants à commencer par les membres de la commission de conciliation, le Ministre en charge des ressources minières, le Palais de Koulouba, le ministère des finances etc… Cette pratique est très courante dans le domaine minier.
Faut-il le rappeler la société des mines d’or de Loulo (SOMILO) a procédé durant des années à des travaux géologiques et miniers à l’intérieur du périmètre d’exploitation qui lui a été octroyé. Ces travaux ont permis de découvrir un second gisement d’or de 1,6 millions d’onces de réserves, soit 51,44 tonnes pour une durée de production de quinze (15) ans dans la zone de Gounkoto dans le cercle de Kéniéba (Région de Kayes) située à 27 km de Loulo. Les dispositions de la convention d’établissement dont bénéficie SOMILO établies dans le cadre de l’ordonnance n°91-065/CTSP du 19 septembre 1991 stipulent « qu’en cas de découverte d’un nouveau gisement dans le périmètre d’exploitation octroyé à la société, l’exploitation de ce gisement peut être envisagée dans le cadre de la société existante ou celui d’une nouvelle société dont les parties décideraient de la création ». Ainsi, sur la base d’une évaluation faite à partir des modèles économiques et financières applicables à l’industrie minière, il a été établi que l’option la plus bénéfique pour l’Etat et la société serait de créer une nouvelle société d’exploitation qui procédera au traitement de Gounkoto à travers l’usine de Loulo. Cette solution permettra de minimiser les coûts d’investissements et les risques inhérents à la construction et à la gestion des infrastructures d’exploitation minière. En effet, les coûts des investissements passeront de 115 milliards de F CFA à 41 milliards de F CFA.
C’est pourquoi la SOMILO a décidé lors de son conseil d’administration du 27 octobre 2010 d’exploiter le nouveau gisement dans le cadre d’une nouvelle société avec la participation de l’Etat du Mali et Rand gold Ltd. La société des mines d’or de Gounkoto a été créée et immatriculée au registre de commerce sous le n°Ma bko 2011 B02 avec un capital fixé à 10 millions de francs CFA.
Le capital social de la société des mines d’or de Gounkoto a été constitué par des apports en numéraires et/ou en nature et fixé d’un commun accord par les deux parties. Il se répartit de la façon suivante : Rand gold Ltd 80%, Etat du Mali 20%. La contribution de l’Etat aux investissements eu égard à sa participation de 10% en numéraire (non gratuite) au capital est évaluée à 4,1 milliards de F CFA. Cette contribution a été intégralement payée par Gounkoto SA. Le projet de Gounkoto envisage de créer environ 652 emplois dont 566 pour la mine, 68 pour l’administration et 18 pour la sécurité et le personnel d’appui.
On nous a fait comprendre que la SOMILO, société mère certainement, a décidé d’exploiter la mine d’or de Gounkoto, dans le cadre d’une nouvelle société avec la participation de l’Etat du Mali et de Rand gold Ltd. Chose curieuse, on nous a fait apprendre par la suite, que cette nouvelle société sera gérée selon l’ancien code, c’est-à-dire celui de 1999, qui est supposée être dépassée également, puisqu’après cette loi une nouvelle a été votée en août 2011. Par le truchement du ministère des mines, du régime de la transition et de l’Assemblée Nationale, la nouvelle société a été établie selon l’ancienne loi de 1999. Il y a sûrement une contradiction entre les faits et les intentions. Dans cette procédure, la loi semble être rétroactive. L’Assemblée n’avait pas le droit de tricher les populations maliennes pour des intérêts cupides de quelques hommes d’affaires. Cette loi, complote contre les populations de Gounkoto, Kéniéba et le peuple malien.
Plus grave, les données par les compagnies minières diffèrent, largement, des chiffres officiels. Autre indice : à en croire le rapport d’enquête de la FIDH, les coûts de production de l’or malien sont les plus bas d’Afrique. Un exemple : pour extraire une tonne de minerai les multinationales dépensent 1,27 dollars. Pour la traiter, elles dépensent 7,28 dollars, auxquels s’ajoutent les coûts administratifs : 3,75 dollars par tonne et les taxes et redevances estimées à 23,8 dollars par once d’or. Au total, le coût opérationnel d’une tonne d’or au Mali est de 95 dollars l’once. Avec un cours de l’or, toujours en hausse, et des coûts de production maintenus à un faible niveau, les bénéfices réalisés, par les multinationales, sur l’or malien ne cessent de croître : 108 dollars sur l’once d’or en 2003, 230 dollars sur l’once en 2004, 245 dollars sur l’once en 2005 et 350 dollars en 2015. Le peuple a été mis devant le fait accompli. L’une des raisons qui ont fait que le code de 1999 a été révisé, c’est la prise en compte du développement des communautés vivant autour des mines. Cette fois-ci encore les populations n’ont eu droit à rien, elles sont restées les parents pauvres de cette aubaine. Elles sont laissées au bon vouloir des miniers.
L’objectif de cette fausse transaction était de pouvoir bénéficier d’avantages énormes liés aux nombreuses failles de cette loi, alors que cette mine était déjà en exploitation depuis 2002. Les raisons sont simples à comprendre, le régime de la transition avait déjà perçu, 6,5 milliards F CFA pour faire face aux difficultés du moment, ensuite les responsables de Rand gold étaient, passés par là pour torpiller le système juridique minier pour lequel les noms de Mamadou Samaké et Chiaka Berthé avaient été cités. Ces deux responsables sont tous des maliens, de noms et peut-être pas de conviction. Dans les sociétés minières, il est courant que des cadres reçoivent annuellement des indemnités colossales en plus de leurs salaires. Ces indemnités doivent faire l’objet de déclarations aux services des impôts. Cela est-il le cas de Mamadou Samaké et Chiaka Berthé ?
En est-il de même pour la société Randgold Ressources ? Nous pouvons répondre par l’affirmation, car l’Etat n’a aucun moyen pour contrôler la production minière au Mali. Nous ne sommes pas étonnés que des pratiques mafieuses soient fréquentes à Rand gold Ressources contre les intérêts du Mali. C’est dans ce cadre que dans les jours à venir nous allons traiter des dossiers liés à ces pratiques mafieuses relatives aux IRVM.
Badou S. KOBA