Mali-Etats Unis d’Amérique : Des opportunités mal exploitées au profit de l’économie malienne

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Un artisan malien à la tâche
Un artisan malien à la tâche

La Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique (Agoa) était au cœur des débats lors du premier sommet Etats-Unis/Afrique, qui s’est déroulé du 4 au 6 août à Washington. Cet accord de libre échange entre les USA et notre continent arrive à échéance dans un an. Même si des pays africains demandent un renouvellement pour quinze ans, certains comme le Mali tardent à y tirer profit pour leur économie. Comme d’ailleurs de beaucoup d’autres opportunités offertes par des partenaires comme les USA.

 

«Au-delà des initiatives américaines existantes et timides telles que l’Agoa, par exemple, la coopération afro-américaine doit être fondée sur un partenariat gagnant-gagnant mettant en synergie les Etats, les collectivités, les milieux d’affaires, les sociétés civiles…», a soutenu un jeune diplomate malien quand nous lui avons demandé ses attentes par rapport au sommet de Washington (4-6 août 2014). Encore faudrait-il, dirons-nous, que le pays puisse tirer le maximum de profit de celles-ci. En dehors des interventions ponctuelles de l’Usaid et des programmes sectoriels (lutte contre le VIH/Sida, le paludisme, etc.), le Millenium Challenge Corporation (MCC) et la Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique (Agoa) sont les deux programmes américains dont le Mali a bénéficié ces dernières années.

 

 

Au titre du MCC, les Etats-Unis avaient accordé à notre pays près de 244,8 milliards de Fcfa pour réduire la pauvreté et augmenter la croissance économique. Et cela, à travers l’exécution des projets d’irrigation d’Alatona (Office du Niger) et l’amélioration de l’aéroport international de Bamako-Sénou. Des travaux qui ont été contrariés par le coup d’Etat du 22 mars 2012, entraînant la suspension de l’aide bilatérale américaine au Mali. Estimé à 122,3 milliards de Fcfa, le projet d’irrigation d’Alatona vise la croissance de la production et de la productivité, l’amélioration de la sécurité de l’occupation des terres, la modernisation des systèmes de production irriguée, l’atténuation de la dépendance de l’agriculture des aléas climatiques et, par conséquent, l’augmentation des revenus des paysans. Il cherche à développer 16 000 hectares de terres nouvellement irriguées et représente une augmentation de presque 20 % de la production agricole «à l’épreuve de la sécheresse» dans la zone de l’Office du Niger. Le projet, s’il est entièrement concrétisé, introduira des pratiques innovatrices d’agriculture, d’occupation des terres, de gestion de crédit et de l’eau. Cette initiative doit aussi favoriser des réformes politiques et organisationnelles «destinées à étendre le potentiel de l’Office du Niger afin de servir de moteur à la croissance des zones rurales au Mali».

 

 

S’agissant du projet d’amélioration de l’aéroport de Sénou, il devait contribuer à la croissance du trafic aérien et à augmenter l’efficacité de l’aéroport dans la gestion à la fois des passagers et du fret. En plus de ces deux projets, le MCC devait permettre de financer un parc industriel, situé dans le domaine aéroportuaire, à hauteur de 48, 4 milliards de Fcfa. Il s’agit de la mise en valeur d’une plate-forme pour les activités industrielles afin de faire face à la forte et croissante demande pour l’industrie. Le parc industriel sera un ancrage pour le secteur industriel en croissance, particulièrement dans le domaine de l’agro-industrie, atténuant de ce fait une contrainte majeure à la production de la valeur ajoutée et la croissance économique. Le MCC visait donc à aider des centaines de milliers de Maliens à améliorer leur niveau de vie. On espère que ce programme sera repris dans son intégralité avec le sommet de Washington. Comme ce fut le cas de la Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique (Agoa).

 

 

En effet, le 23 décembre dernier, le président Obama a accordé un accès préférentiel sur le marché américain aux exportations maliennes à partir du 1er janvier 2014. Le pays est ainsi recasé parmi les bénéficiaires de l’Agoa. L’éligibilité du Mali avait été suspendue après le coup d’Etat de 2012.

 

Si à Washington, des dirigeants africains se sont battus pour que l’Agoa (qui arrive à terme en juin 2015) soit renouvelée (Barack Obama s’y est engagée, mais le Congrès américain décidera), des pays comme le Mali doivent redoubler d’efforts pour bénéficier de ses retombées économiques. À travers des accès favorables au marché des Etats-Unis, les industriels maliens ont la possibilité d’augmenter leurs exportations aux Etats-Unis et d’aider à la reprise économique du Mali. Mais ils n’en avaient pas réellement profité avant sa suspension en mars 2012. Les artisans et industriels maliens ont vendu par le passé des sacs et bracelets fabriqués localement au géant supermarché Walmart et exporté des objets d’art uniques à d’autres boutiques. Mais, de 2006 à 2012, le total des exportations maliennes se chiffrait officiellement à seulement 203,335 millions de Fcfa. Alors que le commerce dans les deux sens entre les Etats-Unis et l’Afrique subsaharienne avait atteint plus de 72 milliards de dollars en 2012.

 

 

Lancée en mai 2000, le Mali a adhéré à cette initiative à partir de janvier 2003. Juste avant la suspension, le «Comité Agoa» du Mali avait réfléchi à de nouvelles stratégies pour mieux exploiter cette opportunité au profit de l’économie malienne. Il avait par exemple recommandé le regroupement des acteurs pour former des coopératives, des associations… Le commerce sous-régional entre les pays éligibles à l’Agoa avait été aussi conseillé. Le cas de Fitina (usine de filature) devait être ainsi une référence en la matière. En effet, cette société envoie des fils en Île Maurice qui les transforme en textiles et vêtements, ensuite exportés aux Etats-Unis. Toujours est-il que le Mali ne parvient pas encore à tirer réellement profit de cette loi qui supprime les taxes sur plus de 6 400 produits exportés vers les Etats-Unis. Jusqu’à une date récente, seuls 34 artisans (stylistes et couturiers, teinturières, tisserands, cordonniers, producteurs de la bonneterie, créateurs des jouets…) avaient pu obtenir l’agrément à l’Agoa. La diplomatie malienne doit également se battre pour que le Mali puisse être pris en compte dans la seconde phase de Power Africa. Une initiative lancée par le président Barack Obama, il y a un an. Elle doit permettre de doubler l’accès à l’électricité en Afrique en 2018. Le programme est doté de 7 milliards de fonds publics auxquels s’ajoutent 14 milliards promis par les secteurs publics et privés américains. Le sommet de Washington a permis d’augmenter le financement de 12 milliards de dollars. Une somme investie par la Banque mondiale, le secteur privé américain et le gouvernement suédois. Ce programme, doté désormais de 26 milliards de dollars, doit permettre à 60 millions de foyers africains d’être raccordés. Douze agences gouvernementales américaines, pilotées par l’Usaid, sont impliquées dans Power Africa qui a désigné six pays (Ghana, Liberia, Nigeria, Ethiopie, Kenya et Tanzanie) pour sa première phase.

 

 

Notre pays a plus que jamais besoin d’accroître l’accès à l’électricité et à un prix compétitif pour mieux attirer des investisseurs. Aujourd’hui, l’avenir des mines d’or de la région de Kayes est menacé parce que le Trésor public ne peut pas continuer à subventionner l’énergie qui leur est fournie à travers le réseau public. Et les sociétés d’exploitations ne trouvent pas rentables de payer l’électricité au coût actuel du marché. Elles sont aujourd’hui nombreuses, les entreprises qui souffrent du coût et de l’instabilité de l’électricité au Mali. Ce qui n’est pas de nature à attirer de nouveaux investisseurs, surtout Américains.

 

Moussa BOLLY

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