A l’heure de la mondialisation, l’ouverture des frontières et l’interdépendance des marchés ont accentué la concurrence non seulement entre les entreprises et les acteurs économiques mais aussi entre les États. Ce nouveau contexte a entraîné un changement de doctrine économique qui pose l’innovation comme l’un des facteurs essentiels du développement économique. L’innovation peut provenir d’une invention, mais les deux notions sont loin d’être équivalentes, car si l’invention est la création de quelque chose de nouveau, c’est quand elle devient utile à la société qu’elle devient une innovation. La notion d’innovation renvoie intuitivement à l’idée de nouveauté, de changement et de progrès. Le défi à relever pour la jeunesse ivoirienne est d’agir pour faire mentir les « ivoiro pessimistes ».
L’épargne est une pratique multi séculaire sur notre continent. En témoignent les greniers où nos ancêtres stockaient les récoltes. L’épargne monétaire s’est également développée, donnant naissance à un système bancaire moderne. La principale contribution du système financier à la croissance économique repose sur la capacité des institutions financières à mobiliser l’épargne pour l’affecter à l’investissement grâce aux taux d’intérêt réels positifs.
La problématique du financement de la production par l’accumulation de l’épargne demeure un souci réel pour les décideurs ivoiriens car, bien qu’en situation de sur liquidité, les banques rechignent à financer l’activité économique et, quand elles y consentent, hésitent à accorder des crédits à long terme. En conséquence, les petites et moyennes entreprises se financent à très court terme généralement à travers des «tontines» aux taux usuraires.
Reste le recours aux financements externes. Il conviendrait notamment d’encourager l’implication de la diaspora. Selon une étude portant sur les transferts de fonds des migrants entre la France et cinq pays africains (Comores, Côte d’Ivoire, Mali, Maroc et Sénégal), menée par la Banque africaine de développement (BAD), le volume des transferts d’argent représente entre 9 et 24% du PIB des pays étudiés et entre 80 et 750% de l’aide publique au développement dont ces pays sont bénéficiaires. Globalement, les Africains envoient chaque année plus de quarante milliards de dollars sur le continent. Affecté à l’investissement, cet argent pourrait pallier les insuffisances du secteur financier. S’agissant des exclus du système bancaire classique, il est souhaitable qu’ils soient pris en main par la micro finance. Ce système favorise notamment l’attribution de prêts de faible montant à des entrepreneurs et à des artisans qui ne peuvent accéder aux prêts bancaires classiques, faute de garanties suffisantes. «Une paix durable ne peut pas être obtenue sans qu’une partie importante de la population trouve les moyens de sortir de la pauvreté», a déclaré Ole Danbolt Mjoes, président du comité Nobel, au moment de récompenser Mohammed Yunus, prix Nobel de la Paix en 2006, pour avoir fondé la Grameen Bank, la «banque des villages», basée au Bangladesh.
Les entreprises ivoiriennes et africaines ne devraient pas avoir peur d’aller chercher de l’argent frais sur les marchés de capitaux qui se développent rapidement sur le continent. Les gouvernements en profitent déjà, et multiplient les recours aux emprunts obligataires pour financer les grands projets d’infrastructure. Il faut également se féliciter de la naissance et du développement de groupes bancaires panafricains, qui contribuent à améliorer le taux de bancarisation en sortant progressivement de l’informel l’épargne des ménages. La concurrence qui gagne le secteur va probablement profiter aux PME en recherche de financements.
Le pays est une véritable pépinière de talents, qui s’illustrent tout particulièrement dans l’informel. Il est donc impératif d’en finir avec l’économie souterraine, pour une meilleure tenue des comptes publics, mais aussi pour l’épanouissement des jeunes entrepreneurs, qui auraient alors accès au crédit susceptible de développer leur activité. Par ailleurs, le gouvernement ivoirien doit tout mettre en œuvre pour encourager la créativité et l’innovation au sein de la jeunesse. « Le monde a changé, les règles ont changé. En une génération, des révolutions technologiques ont transformé la façon dont nous vivons, travaillons et commerçons», a clamé le président des Etats-Unis, Barack Obama, lors de son discours sur l’état de l’Union du 25 janvier 2011.
Notre continent doit investir dans la recherche et les technologies de l’information pour entrer dans la compétition mondiale et se mettre au niveau de ses concurrents; pour l’instant, seuls 0,8 % d’Africains ont accès à Internet. Cet outil devrait pourtant favoriser le développement de métiers relatifs aux NTIC. Les entreprises africaines pourraient ainsi repenser leurs façons de travailler et prendre des risques, pour se démarquer. Ceci est essentiel dans leur quête relative aux gains de productivité et à plus de compétitivité. Pour cela, doivent émerger de jeunes entrepreneurs qui osent sortir des sentiers battus et laissent éclore de nouvelles idées pour trouver des solutions aux immenses besoins de notre Continent.
Pour la Côte d’Ivoire, la clé réside donc dans la multiplication de PME. C’est le tissu de PME qui emploie la majorité des habitants du pays. Ces entreprises créent aussi des emplois indirects par milliers. Mais ces entreprises sont globalement fragiles. Un secteur des PME prospère s’est constitué en Afrique du Sud, à Maurice et en Afrique du Nord, soutenu par un système financier relativement développé et des politiques publiques de promotion du secteur privé.
En revanche, dans les pays producteurs de pétrole, en proie au « syndrome hollandais », la prédominance des hydrocarbures a étouffé l’émergence d’un secteur privé non pétrolier. Pour favoriser l’éclosion des PME, au pays des éléphants, les ivoiriens doivent certes éliminer les entraves qui compromettent l’intégration régionale car leurs marchés locaux sont trop étroits, améliorer l’environnement des affaires, réduire les lourdeurs administratives, doter leurs régions d’infrastructures « structurantes », réformer l’appareil judiciaire et mettre en place des politiques fiscales incitatives, telles que des exonérations d’impôts et allègements de charges diverses. Mais les ivoiriens doivent aussi et surtout ENTREPRENDRE ENSEMBLE !!
Abdoulaye A. Traoré
Doctorant en sociologie