Le Mali et le Sahel à la veille d’une nouvelle invasion généralisée de criquet pèlerin ?

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Les invasions de criquet pèlerin sont récurrentes au Sahel. La dernière grande invasion a pris fin en 2005. Après quelques années d’accalmie, des essaims de plus en plus importants de criquet pèlerin sont signalés depuis quelques semaines dans les régions traditionnellement affectées par les invasions de ce ravageur redoutable. Les criquets sont capables de manger l’équivalent de leur poids, environ 2g de matières végétales chaque jour !

Aussi, les invasions des criquets pèlerins occasionnent-elles des dégâts importants sur les productions végétales et agricoles en particulier. Lors de la dernière invasion 2003-2005, plus de 15 millions d’ha ont été infestées dans les régions touchées en Afrique de l’Ouest et au Maghreb. Les pertes causées aux cultures non irriguées ont été de l’ordre de 30 à 70 %.

La région où sévit actuellement la rébellion au Nord du Mali est celle où se localisent les plus importantes zones de reproduction, de multiplication  et de formation des essaims de criquet pèlerin. C’est à proximité de ces zones dites grégarigènes qu’ont été installées les principales bases de lutte contre le criquet où sont stockés les principaux moyens de lutte contre les acridiens. Il s’agit d’insecticides, de matériels de traitement, d’équipements de protection, des véhicules,… Ces bases sont gérées par le Centre National  de Lutte contre le Criquet Pèlerin (CNLCP) du Mali. Elles ont été systématiquement pillées par les différents groupes de rebelles qui ont envahi le Nord Mali depuis quelques mois. Les véhicules et d’autres matériels ont été emportés. Les pertes sont estimées à plus de 4 milliards de FCFA (soit près de 9 millions de dollar US) par l’administration malienne qui  évalue par ailleurs à plus de 10 millions de dollar US, les besoins pour faire face au péril acridien qui se dessine. L’instabilité dans le septentrion malien rend encore plus difficile et complexe la lutte contre le fléau acridien. Les criquets ne connaissant pas les frontières,  menaceront aussi d’autres pays sahéliens souvent touchés par les invasions des acridiens. Il s’agit notamment pour l’Afrique au Sud du Sahara, du Niger, de la Mauritanie, du Sénégal, du Burkina, du Tchad,….

Dans le contexte actuel d’instabilité politique, institutionnelle, de difficultés socio-économiques et  de mauvais fonctionnement de l’administration au Mali, comment mobiliser les ressources nécessaires et mettre en œuvre une lutte efficace ?

C’est le défi posé aux maliens, aux autres pays menacés par les invasions des criquets et les partenaires au développement qui appuient traditionnellement  la lutte contre les acridiens.  La communauté internationale, les institutions internationales doivent rapidement  aider le Mali et les autres pays concernés à mettre en œuvre des stratégies de lutte appropriées.

Aussi, est-il urgent que les responsables des services de la protection des végétaux des pays sahéliens se rencontrent rapidement pour convenir des actions à entreprendre pour faire face ensemble aux problèmes qui seront posés par les invasions des criquets. La situation politique actuelle du Mali rend encore plus difficile la lutte contre le fléau.

Des solutions alternatives hardies et adaptées doivent être appliquées afin d’éviter à l’ensemble de la région Soudano-sahélienne d‘Afrique d’autres catastrophes humanitaires et écologiques majeures.

Dr. Abou Thiam

Institut des Sciences de l’Environnement

Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal

Coordonnateur régional Pesticide Action Network Africa

E-mail : abouthiam@pan-afrique.org

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