Confrontés au manque d’essence dans certaines stations d’essence de la place, des consommateurs redoutent une pénurie de carburant et surtout une seconde hausse des prix à la pompe. Pour le directeur général de l’Office national des Produits pétroliers (Onap), il n’y aura pas de rupture d’approvisionnement et l’Etat est en train de faire d’énormes efforts pour contenir les prix à la pompe.
La dernière augmentation du prix à la pompe survenue dans notre pays en mars dernier est passée en travers de la gorge des consommateurs. Mais elle est vue par les autorités comme l’une des conséquences de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. L’Onap, les services techniques et ses partenaires importateurs d’hydrocarbures ont procédé à un réajustement tarifaire à la mi-mars 2022. Le litre d’essence est passé de 663 F CFA à 762 F, le gas-oil de 593 F CFA à 760 F CFA.
Cette augmentation, Modibo Diall le directeur général de l’Onap la justifie par le fait qu’il y avait des leviers qui permettaient à l’Etat de contenir les fluctuations des prix à la pompe. L’Etat, à l’en croire, a toujours subventionné les produits pétroliers en baissant leurs taxes au cordon douanier. Ce qui aujourd’hui, a eu ses limites. Pour lui, les prix à la pompe n’avaient pas bougé depuis près de 2 ans, de novembre 2020 à mars 2022. « Les prix pourront revenir à un niveau raisonnable dès que les tensions vont se calmer. L’Etat a beaucoup soucis des consommateurs. Nous tenons régulièrement des réunions techniques avec les différentes directions techniques et au haut niveau (ministériel) pour un approvisionnement correct du pays », indique-t-il. Il balaie du revers de la main toute rupture de stocks. « D’après les chiffres que nous avons et avec tous les mouvements en cours, il n’y a pas de risque de rupture ou de pénurie de carburant », admet-il. Avec un réseau organisé de distribution, pas de raison qu’il n’y ait pas d’essence, juge M. Diall.
Panne sèche dans les jours à venir
Il va sans dire que cette hausse inattendue a été durement ressentie par les populations dont la bourse est déjà fragilisée par une crise mondiale généralisée. Selon certains propriétaires de véhicules, une autre augmentation des prix à la pompe n’est pas à écarter. Selon leurs constats, il faut parcourir 2 à 3 stations d’essence pour s’approvisionner. En plus des difficultés que rencontrent des grossistes d’hydrocarbures à importer le précieux liquide. Ce qui leur fait craindre une panne sèche dans les jours à venir. Déjà, il y a environ 3 semaines, la ville aurifère de Kéniéba dans la région de Kayes, avait connu une crise sans précédent. Des usagers avec leurs engins ou des jerricans et bidons de 20 litres, peinaient à s’offrir une seule goutte de carburant dont les prix s’étaient envolés entre 2000 F à 2 500 F CFA le litre.
Le patron des produits pétroliers se montre conscient de la situation. Selon lui, « le marché pétrolier est très sensible aux événements géopolitiques. Quand la crise entre la Russie et l’Ukraine a éclaté, les marchés mondiaux du pétrole ont connu des répercussions », dit-il. « Tout produit qui est rare devient cher, c’est la loi du marché. Et quand c’est rare, cela impact forcément nos sources d’approvisionnement qui sont Cotonou, Lomé, Dakar et Abidjan», explique-t-il. Il voit l’augmentation du prix à la pompe de mars dernier comme les conséquences d’un phénomène international, qui n’a pas frappé que le Mali. Et d’ajouter que ce n’est pas par gaité de cœur que le gouvernement a procédé à cette hausse tarifaire. « L’Etat se soucie bien de vous consommateurs », plaide-t-il avec force argument.
A la question de savoir si notre situation n’est pas envenimée par l’embargo qui nous frappe si l’on sait que des pays voisins comme le Burkina Faso, le Sénégal ou la Côte d’Ivoire n’ont pas touché à leurs prix à la pompe. M. Diall insiste que ce n’est pas l’embargo. Il croit dur comme fer, que ces pays ont eu d’autres mécanismes ou raisons pour maintenir leurs prix inchangés. « L’embargo n’a rien à voir dans notre situation. Les prix sont restés à la pompe intacts depuis novembre 2020, bien avant l’embargo imposé à notre pays le 9 janvier dernier », témoigne M. Diall. Selon lui, les difficultés d’approvisionnement sont liées aussi à des facteurs comme le refus de certaines banques à financer l’importation du pétrole. « Des banques européennes demandent des certificats d’origine pour se rassure que le produit ne vient pas de la Russie frappée d’embargo ».
Abdrahamane Dicko