Des informations sont remontées jusqu’à nous en ce qui concerne la qualité du ciment produit par Diamond Cement et nous sommes descendus sur le terrain pour vérifier”. Ainsi s’exprimait le ministre du Développement industriel, Mohamed Ali Ag Ibrahim, mardi dernier 22 novembre 2016 dans l’après-midi, à l’occasion de la visite de terrain qui l’a conduit à la cimenterie de Diamond Cement à Dio-Gare. En cours de route, il est passé à la nouvelle cimenterie que le groupe marocain Cimaf est en train de mettre en place à Diago. Sur place, le Ministre a constaté que les travaux sont presque terminés. La production de cette nouvelle usine est attendue sous peu, après l’inauguration par le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta.
Accompagné de membres de son Cabinet, du directeur national de l’Industrie et d’autres cadres de son Département qui sont chargés des questions de qualité et de normes dans les industries, le ministre du Développement industriel, Mohamed Ali Ag Ibrahim, a effectué une visite de terrain le mardi dernier dans l’après-midi. Une équipe de journalistes – dont nous-même- a suivi ce déplacement du Ministre.
La nouvelle usine de ciment du groupe marocain “Ciments d’Afrique” (Cimaf), sise à Diago a été la première étape. Accueilli par le directeur général, Ousmane Diallo entouré par son staff, le Ministre a fait le tour du chantier pour constater, de visu, son évolution. Il faut remarquer que dès l’entrée à l’usine, on est frappé par la qualité des installations qui prouvent que pour la mise en place de cette unité, il a été fait appel à des technologies de pointe, comme ce sera d’ailleurs précisé au ministre lors de la présentation de l’unité industrielle par le directeur général et les techniciens trouvés sur place. Ils ont insisté sur le circuit fermé pour le broyeur et le séparateur. Une technologie de pointe qui règle la question environnementale pour donner “une cimenterie propre” selon l’expression des cadres de Cimaf.
Précisons d’emblée que le directeur général, Ousmane Diallo, est un Malien bon teint et les techniciens en charge du chantier sont tous des Maliens. La plupart sont déjà hautement qualifiés et d’autres ont eu droit à une formation complémentaire sur place, pour pouvoir faire sortir de terre un tel joyau industriel. Le directeur général précisera à cet effet qu’un seul technicien est venu du Maroc pour appuyer les techniciens maliens. Ce qui fera dire au ministre Mohamed Ali Ag Ibrahim que “c’est bien la preuve que nos écoles forment des gens opérationnels, pouvant travailler même avec de grandes multinationales si expérimentées”.
Le directeur général de Cimaf précisera que la réalisation de l’usine a démarré en février 2014, faisant référence à la pose de la première pierre réalisée par le Président IBK et le Roi Mohamed VI du Maroc. C’est donc un fleuron de la coopération Maroc-Mali.
25 milliards Fcfa d’investissement, 200 emplois directs et
1 millier d’emplois indirects
En moins de deux ans, les travaux sont presque finis car se trouvant à la dernière phase et la production, comme l’a laissé entendre le Dg, va commencer dans les jours à venir. Dans son exposé, Ousmane Diallo n’a pas manqué de rappeler le coût de l’investissement : 25 milliards de francs Cfa en deux phases, pour donner à terme, deux unités de production qui assureront un approvisionnement annuel d’un million de tonnes. Pour le moment, l’usine va démarrer avec 500 000 tonnes par an.
“Bientôt ce sera un joyau industriel qui fera la fierté du Mali et le groupe Cimaf apporte son savoir-faire et sa compétence pour que le Mali puisse avoir un ciment de qualité à des prix accessibles, en créant 200 emplois directs et 1 millier d’emplois indirects. Le Gouvernement accompagne la Cimaf par une convention spéciale qui procure un certain nombre d’avantages, mais nous demandons encore des avantages pour être plus compétitifs” a déclaré le Dg, Ousmane Diallo.
Avantages accordés par le Gouvernement pour accompagner le projet
Et le Ministre de sauter sur l’occasion pour lui demander d’être plus précis sur les avantages accordés par le Gouvernement. En réponse, la direction de l’usine de préciser que le groupe Cimaf a bénéficié d’exonérations sur la Tva et les droits de douane en ce qui concerne les équipements importés pour l’implantation de l’usine. Pour être plus précis, Ousmane Diallo affirme : “L’Etat du Mali nous a vraiment accompagné jusque-là, maintenant nous voulons un certain nombre d’avantages sur les intrants”.
A cet instant, le Ministre réagit : “C’est important pour nous de vous entendre vous exprimer. Nous savons que c’est un projet de coopération sud-sud réussi entre le Maroc et le Mali. Le président de la République n’est pas là, mais il suit particulièrement l’évolution de ce projet. Nous sommes ses yeux et il est bon de rappeler que le Gouvernement a fait des efforts pour la réussite du projet et l’inauguration prochaine se fera en présence du président de la République”.
Bientôt l’inauguration de l’usine Cimaf par le Président IBK
Cette inauguration, elle est attendue pour bientôt car l’usine entame la phase de test de production et déjà, le Hall clinker, comme on l’appelle dans cette usine, est déjà rempli de 30 000 tonnes de cette matière première essentielle à la production de ciment. La révélation en a été faite par la Direction de l’usine qui précise que 40 000 tonnes ont été importées et puisque le Hall n’en contient que 30 000, les 10 000 restants sont stockés dans un endroit aménagé dans la cour pour être utilisés en premier lieu. Cette précaution de se doter d’une réserve importante de clinker permet d’éviter une éventuelle rupture qui pourrait aussi ralentir ou stopper la production.
C’est un ministre du Développement industriel visiblement satisfait, qui a quitté l’usine Cimaf de Diago pour se rendre à celle de Diamond Cement à Dio-Gare. C’est une usine du Groupe Wacem-sa, une société d’origine indienne et qui produit du ciment dans plusieurs pays africains : Togo, Ghana, Burkina Faso, Guinée Conakry, Niger, Congo Brazzaville et Madagascar.
Diamond Cement promet de dépasser les 700 000 tonnes de production cette année
La pose de la première pierre de l’usine a eu lieu le 15 février 2009, suite à une convention d’établissement signée entre le groupe Wacem et l’Etat du Mali, le 23 décembre 2008. Les travaux de construction ont démarré le 5 juillet 2009 et la production de ciment a commencé en janvier 2013.
La capacité installée est de 1 million de tonnes par an, mais cette quantité n’est pas encore atteinte. En effet, au fil des ans, il a été produit : 311 899 tonnes en 2013, 651 758 tonnes en 2014 et 634 495 tonnes en 2015. En 2016, selon les projections déclares par la direction de Diamond Cement, il est attendu une production qui va dépasser les 700 000 tonnes.
Selon la direction de Diamond Cement, “les prévisions de départ de la production n’ont jamais été atteintes à cause des difficultés suivantes : la concurrence déloyale des entreprises sénégalaises, les impotations frauduleuses, les problèmes de routes et ponts, notamment ceux de Kayes et Diamou, en plus du climat social très tendu en 2015 et 2016 où l’on a enregistré 16 jours de grève”.
Des employés en grogne
Mais ce climat social est loin d’être apaisé car nous avons trouvé sur place une atmosphère surchauffée avec des employés en grogne. Ils ont profité de l’occasion offerte par cette visite pour se confier aux journalistes, avant de rencontrer le Ministre pour lui exposer leurs problèmes : salaires jugés trop bas et heures supplémentaires obligatoires, conditions de travail draconiennes et sans aucun respect de la législation du travail, manque de tenues de travail correctes, absence de prise en charge au plan social et médical (retraites, sécurité sociale et Assurance maladie obligatoire) pour ne citer que ces griefs-là.
Le Ministre Mohamed Ali Ag Ibrahim les a écoutés et a interpelé le patron de l’usine, un Indien flanqué de son interprète pour lui traduire en anglais les propos du Ministre, lequel a fait comprendre qu’il est inacceptable que les Maliens qui travaillent pour eux ne soient pas traités correctement. C’est vrai que l’usine leur offre des emplois, a-t-il souligné, mais il faudrait qu’ils puissent travailler avec dignité et dans le respect de la loi. Cette interpellation qui sonne comme une injonction a-t-elle été bien comprise par l’interlocuteur qui a affirmé avoir saisi le message et promis de se conformer? Nous en saurons plus en nous intéressant aux conditions de travail dans cette unité dans les jours à venir.
Côté apport à l’économie malienne, on peut aussi retenir que Diamond Cement, du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, a contribué au budget de l’Etat, au titre des impôts, pour 3,960 milliards de nos francs. Presque 4 milliards Fcfa.
Problématique de la qualité et de la baisse du prix du ciment
Cependant, la question du prix du ciment continue de tarauder et c’est naturellement revenu dans les débats lors de la conférence de presse tenue sur place. Au cours de laquelle, les journalistes avaient face à eux le Ministre et les dirigeants de Diamond Cement. Il faut retenir que la tonne de ciment est cédée à l’usine de Gangonterie, Bafoulabé à 74 500 Fcfa et 87 500 Fcfa à Dio-Gare, Kati. “Nous pouvons revoir à la baisse le prix du ciment si nos coûts de production baissaient car pour la production de Gangonterie, nous ne bénéficions pas de fourniture d’électricité par défaut de proximité d’une ligne de haute tension. Nous utilisons 28 groupes pour produire notre propre énergie et cela fait un coût de 33 millions de francs en Gasoil par jour” affrime la Direction de Diamond Cement.
La qualité du ciment produit a été au centre des discussions, surtout après des informations distillées ces derniers temps pour émettre un doute sur la qualité du produit de Diamond Cement. La Direction de l’usine, par la voix de l’Administrateur Ibrahima Dibo, s’est défendu et a rejeté en bloc ces accusations. Pour convaincre, Ibrahima Dibo a fait un exposé sur les deux qualités de ciment produites par Diamond Cement, notamment le Cpj 32,5 et le Cpj 42,5. Auparavant, il a expliqué ce que recouvre cette notion de Cpj qui est une référence technique importante pour déterminer la qualité d’un ciment. Lors de la visite de l’usine aussi, du bon temps a été passé dans le laboratoire où l’on a tenté de convaincre de la rigueur dans le contrôle de la qualité.
La mise en garde du Ministre
De toute façon, le Ministre Mohamed Ali Ag Ibrahim a été très clair: “Nous sommes très exigeants sur la qualité du ciment car le pays est en construction, notamment avec les grands chantiers initiés par le chef de l’Etat, comme par exemple le pont de Kayo et celui de Kayes. C’est pourquoi nous veillerons sur la qualité du ciment produit car avoir un ciment de qualité est la base de la réussite de ces projets auxquels le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, attache beaucoup d’importance”. Ce message, qui sonne comme une mise en garde, il l’a martelé dans les deux usines de ciment où il est passé.
Amadou Bamba NIANG,
Envoyé spécial à Diago et Dio