Malgré les immenses quantités annuellement consommées au Mali, l’usine de thé de Farako (Sikasso) est toujours à l’abandon. Comme si nos milliardaires, qui continuent à jeter l’argent par la fenêtre, ne voient pas cette juteuse opportunité d’investissement.
A-t-on une idée de la quantité de thé consommé au Mali par an (tous produits confondus) ? S’il est difficile de donner des chiffres précis, nous savons quand même que c’est une immense quantité malheureuse entièrement importée. Au même moment, la ferme de thé Farako est totalement délaissée avec ses immenses capacités de production. Installée en 1974, l’usine de thé de Farako n’est plus que l’ombre d’elle-même après plusieurs décennies de production et de distribution.
Son implantation répondait à une volonté politique de rendre les Maliens indépendants de l’importation de certains produits de grande consommation. Au moment de sa création, en partenariat avec la République populaire de Chine, le Mali devait aménager plus de hectares 400 hectares de thé. Cependant, les deux pays n’ont exploité qu’une centaine d’hectares. Et pendant près de 40 ans, cette usine a produit une grande partie du thé consommé au Mali. Mieux, jadis, elle était considérée comme une entreprise de développement participant à la fois à la production agricole (filière thé), et aussi à l’industrialisation du pays.
Située à 25 km de la capitale du Kénédougou, la ferme agro-industrielle de Farako (commune rurale de Finkolo) est un vestige de l’ex-Opération thé Sikasso (OTS). Elle comprend une ferme agricole de 402 ha de terre, dont 80 sont exploités, et une unité industrielle de transformation des feuilles de thé fraîches en thé vert pour le marché national. Les 80 ha étaient mis en valeur en quatre blocs de parcelles de théiers. Le thé Farako était réellement un atout économique pour notre pays, avec un chiffre d’affaires de 600 millions de francs CFA et une année record atteignant 219 milliards de francs CFA. En décembre 2011, l’entreprise avait été donnée en location gérance à des exploitants privés qui préfèrent importer de Chine le thé commercialisé au Mali. Ainsi, l’usine de Farako et les dizaines d’hectares de théiers chèrement acquis par l’Etat du Mali sont laissées à l’abandon.
Ainsi, depuis plusieurs années, cette ferme est en situation de faillite. En 2017, Aly Ag Ibrahim (l’ancien ministre de l’Industrie sous IBK) avait redonné espoir à la région. Il s’était rendu à l’usine de thé Farako dans le but de relancer la production locale. Un espoir qui ne s’est jamais concrétisé. Ces derniers mois, les autorités de la Transition ont affiché leur détermination à relancer l’activité industrielle. Cela s’est traduit par la réouverture réussie du réseau ferroviaire en juin dernier après celle de la COMATEX. Si à Koulikoro la reprise des activités de production de l’Huilerie cotonnière du Mali (HUICOMA) est très attendue, à Sikasso, c’est la reprise de la production de thé qui est souhaitée.
Dans le cas de la Ferme Farako, il faut tirer tous les enseignements de l’échec des précédentes tentatives de relance. Ainsi, à défaut d’un partenariat public-privé, il faut une reprise totale par des privés. Cet héritage de Modibo Keïta ne manque pas en tout cas d’atouts plaidant pour sa réhabilitation afin de permettre aux Maliens de consommer du thé produit au pays et redonner à la localité de Farako sa gloire d’antan. C’est incontestablement une bonne opportunité d’affaires si on y consacre les moyens qu’il faut pour non seulement renforcer les capacités des travailleurs et doter la ferme des moyens de production et d’industrialisation.
C’est quand même décevant et révoltant de voir nos milliardaires jeter l’argent par la fenêtre dans des futilités et que, au même moment, la Ferme de Thé Farako soit totalement délaissée avec ses immenses potentialités ! Comme le publiait récemment une adorable et engagée jeune sœur, «utilise ton argent pour faire plus d’argent. N’utilise pas ton argent pour faire croire que tu as de l’argent» ! Selon certains témoignages dans la zone, feu le Général Moussa Traoré avait de la Ferme de Farako l’un de ses lieux de congés privilégiés. Raison de plus pour tout mettre en œuvre afin de faire renaître ce fleuron au grand bonheur des Maliens et pour la création d’emplois. Au lieu d’importer de grandes quantités de thé, pourquoi ne pas faire renaître cette unité industrielle en référant de certains pays comme le Rwanda et le Kenya dans la balance commerciale desquels le thé pèse beaucoup ?
Moussa Bolly
Le Rwanda, une référence
Si le Mali doit s’inspirer d’un pays pour relancer la Ferme de Thé Farako, c’est sans doute le Kenya et surtout le Rwanda. Le thé pèse beaucoup dans la balance commerciale de ces deux pays. Dans le but de diversifier ses sources de revenus, le gouvernement rwandais s’est lancé dans la culture du thé en 1954. Son développement s’est accéléré après l’indépendance du pays en 1962.
Jouissant d’un climat favorable et de sublimes collines culminant à plus de 1 500 mètres d’altitude (d’où son surnom du «Pays des mille collines»), le Rwanda produit près de 9 000 tonnes de thés par an. L’usine de thé de Kitabi est une référence nationale en la matière. Située au sud du pays, elle produit l’un des thés les plus convoités en Afrique et dans le monde. En 2019 par exemple, son thé a battu le record du prix le plus cher de l’histoire aux enchères de Mombasa (Kenya).
Sur plus de 200 usines qui exposent leurs thés aux enchères de Mombasa chaque semaine, cinq proviennent du Rwanda. Le thé compte parmi les produits d’exportation les plus rentables du pays. En 2021 par exemple, le Rwanda a engrangé une somme de plus de 96,7 millions de dollars de l’exportation de thé, soit 18 % des revenus de toutes les exportations agricoles. Et, en 2022, ce pays a connu une forte croissance de sa production de thé avec des exportations totalisant 539,6 tonnes, selon des données officielles.
Les estimations du Rwanda development board (RDB) montrent que la production de thé a augmenté régulièrement, passant de 60 tonnes de thé en 1958 à plus de 500 tonnes par an en 2022. Le thé du Rwanda est connu pour sa grande qualité et figure parmi les meilleurs au monde… Le thé noir, le thé orthodoxe, le thé blanc, le thé vert, le thé organique et le thé épicé sont des thés de meilleure qualité produits au Rwanda.
«Le gouvernement a beaucoup investi dans la théiculture, en augmentant notamment des espaces cultivés, en prônant les meilleures pratiques pour assurer une bonne qualité et encourageant la population locale à pratiquer cette culture. Il fait aussi la régulation du prix du thé qui augmente chaque saison. Ce qui motive les agriculteurs qui nous vendent leur thé. Dans cette région, presque tout le monde cultive du thé maintenant», a récemment confié à la presse M. Emmanuel Kanyesigye, Directeur Général de «Kitabi Tea Company».
Un exemple à suivre par nos décideurs politiques et nos opérateurs économiques
M.B
Faut reglementer l’importation du thé. On ne meurt pas si on en a boit pas.
Ceux qui veulent boire du thé n’ont qu’a acheter le thé Farako.
Pareil pour le sucre.
Faut donner des quotas d’importation afin de favoriser les usines au Mali.
L’Occident fait pareil.
Au Mali les opérateurs économiques restent toujours sous la dépendance des grands commis de l’état prêts toujours à détourner les biens publics ensemble sinon sans cet accompagnement incestueux aucun membre du secteur privé ne s’engagent seul à prendre de telle initiative de cavaler vers des investissements du genre “farako”. Il faut absolument l’engagement des grandes voleurs du secteur public afin que les opérateurs économiques soient à l’aise dans ce genre d’entreprise. Prions Allah le tout puissant afin que nous ayons des acteurs du secteur privé très performants et capables de prendre des initiatives créatrices pour dynamiser et provoquer l’émergence du secteur privé digne de ce nom.