Actes de forfaitures, délit d’initier… Les qualifications ne manquent pas. Elles convergent toutes vers des ministres du gouvernement sortant, dont celui ayant préalablement en charge le département des mines.
Le président de la république a pris l’engagement aux eurodéputés d’arrêter les opérations de forage et de carottage du site de la future exploitation de l’uranium dans la commune de Faléa. Deux semaines après, les travaux se poursuivent. Et pour ne rien arranger à la situation, le directeur de la société chargée des travaux assurent les actionnaires de la continuité des travaux de l’entreprise. Une défiance à l’origine aujourd’hui de nombreux soubresauts au sommet de l’Etat.
« Je n’ai pas été informé sur la situation réelle qui prévaut sur le terrain à Faléa. Je m’engage à arrêter les opérations de forage et de carottage. Si la population de Faléa ne veut pas de ce projet minier, le permis ne sera pas délivré à Rockgate et je préférerais développer le secteur agricole dans la Commune Rurale de Faléa ».
Ce sont les propos tenus par le président ATT aux eurodéputés qui lui ont rendu visite après leur séjour sur le site de l’exploitation d’uranium à Faléa.
Dans un communiqué rendu public, les Verts européens ont, en outre indiqué que la « société Canadienne Rockgate chargé des travaux n’a effectué aucune étude géologique, hydrographique ou environnementale ».
Les travaux continuent au grand dam d’ATT
Faut-il croire que le président de la République a été tenu éloigné de cette affaire ?
Des indices l’attestent. Contrairement à ses habitudes, ATT n’a pas procédé au lancement des travaux de l’usine d’exploitation de l’uranium de Faléa, lui qui affectionne tant ce genre d’exercices. On dirait que cette fois-ci, la passe n’est pas arrivée à l’attaquant et que ce soit plutôt les milieux du terrain qui ont marqué le but.
Coup de théâtre ou de publicité ? Le directeur de la société Rockgate M. Karl Kottmeier, pour sa part, affirmera quand même que l’entreprise continue de bénéficier du soutien gouvernemental et que les travaux continueront de plus bel. M. Karl Kottmeier a même rassuré les actionnaires en citant M. Benson Diakité, conseiller en communication du président de la République lequel, affirme t-il, aurait déclaré qu’ «il n’y a pas eu de prise de décision de faire arrêter les forages par le président».
Une déclaration confirmée par une source proche du département des mines qui confesse en effet qu’aucune décision consécutive à l’arrêt des travaux n’a été en effet adoptée. Information reprise par l’association des ressortissants de Faléa.
Rappelons que le projet d’exploitation de l’uranium de Faléa a commencé depuis 2007 et a bénéficié d’un grand soutien du gouvernement de Modibo Sidibé. Aujourd’hui encore, les travaux continent nonobstant l’avis contraire du chef de l’Etat.
La même société doit par ailleurs bénéficier d’un autre projet sur la minéralisation du cuivre dans la même zone de Faléa.
Si la société Rockgate garde jalousement l’identité de ses actionnaires, il ressort cependant de certaines indiscrétions que des ministres proches du dossier ont été identifiés comme tels. L’ancien ministre des Mines est fortement soupçonné. D’où la perquisition effectuée dans son domicile courant semaine dernière par les services de la sécurité d’Etat.
Des actes de forfaiture ?
Il nous revient que l’heure est d’ores et déjà à la qualification du délit de forfaiture, crime commis par un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions. La légalité des actions de la société ROCKGATE lui ayant été conférée par de hauts fonctionnaires, il revient alors à l’Etat de poursuivre ces commis pour forfaiture ; quitte à résilier le contrat avec la société après payement des préjudices afférents.
Le choix des enquêteurs portants sur l’ancien ministre des mines n’est pas fortuit d’abord en sa qualité de ministre de tutelle. Aussi, en violation de la loi constitutionnelle, M Abou Bakar Traoré a continué son mandant ministériel tout en exerçant une activité professionnelle parallèle et de nature à favoriser des conflits d’intérêt ou de délit d’initier.
Promoteur et actionnaire du cabinet fiscal qui porte ses initiales (CABINET ABT sis au quartier du Fleuve), l’ex-ministre a assurément violé ces dispositions de la loi fondamentale. Il s’agit de l’article 35 qui stipule que les membres du gouvernement, durant leur mandat, ne peuvent, par eux-mêmes, ni par autrui, rien acheter ou prendre en bail qui appartienne au domaine de l’Etat, sans autorisation préalable de la Cour suprême dans les conditions fixées par la loi.
Mieux, un ministre en exercice « ne peut prendre part ni par lui-même ni par autrui aux marchés publics et privés pour les administrations ou institutions relevant de l’Etat ou soumises à leur contrôle».
En clair, la seule existence du cabinet ABT est en contradiction flagrante avec cette disposition de la loi fondamentale. Le pire est à venir.
Une éventuelle implication de ce cabinet dans le traitement des dossiers relatifs à la société ROCKGATE et surtout, un hypothétique actionnariat du ministre au niveau de ladite société, seraient de nature à confirmer le crime de forfaiture. C’est ce à quoi s’attellent en ce moment les enquêteurs.
A suivre…
Baba Ahmed