La 3e édition de la Rentrée économique 2019 s’est ouverte le jeudi 25 juillet 2019 avec le thème ” La préservation et le renforcement de la sécurité juridique et judiciaire des affaires au Mali “. La cérémonie d’ouverture était placée sous la présidence du chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Kéita, qui avait à ses côtés le Premier ministre Boubou Cissé et le président du Conseil national du Patronat du Mali, Mamadou Sinsin Coulibaly.
Dans son adresse, le président Ibrahim Boubacar Kéita a dit que la Rentrée économique est devenue une occasion d’échange fécond entre le monde des affaires et le gouvernement. Il s’est dit interpellé par l’intervention du président du Patronat et la qualité de l’exposé du thème qui est très pertinent. Le président IBK a reconnu que les constats évoqués par Mamadou Sinsin Coulibaly, c’est-à-dire les difficultés qui freinent le développement du secteur privé, sont réels. Mais il lui a répondu que “chaque berger conduise son troupeau et l’ensemble se retrouve dans le parc”, pour ainsi dire que le gouvernement et le Patronat ont la même ambition de faire du secteur privé le moteur de l’économie malienne. Il soulignera qu’il a une conviction très forte que slogan “le secteur privé doit être le moteur de l’économie malienne” n’est pas un slogan creux. “Dans un monde où la super compétitivité est la règle, ou vous avez la qualité et la compétence ou alors vous n’avez aucune place à la table. Je ne veux pas que ce sort fût celui du Mali. J’ai souci qu’à chaque étape, nous ayons une marche assurée pour faire en sorte que notre pays, pas de manière mendiée à la manière de ceux qui tendent la sébile, mais de ceux qui, à la force du mérite, sont là, avancent avec les autres dans un concert des nations dont les normes tendent de plus en plus à s’harmoniser […]”, a-t-il dit.
Le président de la République s’est réjoui de la 3e place du Mali après la Côte d’Ivoire et le Sénégal au plan régional en termes de critère de convergence macroéconomique. Pour lui, ce résultat a été obtenu grâce au secteur privé. Selon le président, d’importants progrès ont été réalisés grâce à des réformes aux fins d’alléger certaines taxes fiscales sur les salaires à la charge des employeurs et faciliter l’accès des entreprises à la Commande publique. “Pourvu que cette commande publique nous donne satisfaction quant aux résultats, quant aux produits finis. Je veux bien que les bureaux des ministres, les fauteuils, les chaises, les tables et les mobiliers soient confiés au secteur privé malien, mais qu’ils aient la même qualité de finition si possible que les produits importés. C’est dans ce cas que le secteur privé pourra survivre. Que la qualité soit toujours le souci et qu’elle soit là”, a-t-il espéré.
“Le secteur privé a été le véritable vecteur dans les performances économiques obtenues par le Mali “
Pour le Président, le secteur privé a été le véritable vecteur dans les performances économiques obtenues par le Mali. ” Les faits et résultats macroéconomiques parlent d’eux-mêmes : un cadre assaini avec un taux de croissance dont la moyenne est de 5 %, les finances publiques qui tiennent la route, un taux d’inflation maîtrisé en dessous de la norme Uémoa de 3 % et des productions céréalières et cotonnières accrues, un encourt de la dette en pourcentage du PIB égal à 37 %. Ce qui est nettement en deçà de la norme Uémoa et Cédéao 70 %. Ces raisons justifient amplement que le gouvernement intensifie les efforts en faveur de la relance économique”, a-t-il souligné.
Et le président de la République de manifester tout l’intérêt qu’il accorde au thème de la Rentrée économique 2019, notamment “La préservation et le renforcement de la sécurité juridique et judiciaire des affaires au Mali” car, a-t-il expliqué : ” Il faut stimuler l’investissement par de bonnes décisions de justice, une justice indépendante et crédible. C’est à prix là qu’il sera possible pour le Mali d’attirer l’investissement privé national d’abord, direct et indirect étrangers […]. Je suis aussi encouragé par la grande détermination que le secteur privé montre à jouer pleinement sa partition par le paiement régulier des impôts et taxes qui contribuent davantage à la création d’emplois-jeunes. […] Par ma voix, le gouvernement atten du secteur privé la mise en valeur des énormes potentialités économiques dont recèle notre Mali pour contribuer à la transformation structurelle en valorisant notamment les productions agricoles qui est aussi source de création d’emplois jeunes et de revenus […].
Le chef de l’Etat a regretté la faiblesse de la capacité de production du Mali. “Nous avons une production cotonnière très confortable. Mais hélas, notre capacité de production interne est de 2 %. Il n’y a pas de quoi être fier. Il faut le dire clairement. […] Quand on voit tous les corps en uniformes, l’Armée, la Police, la Gendarmerie, la Protection civile, les uniformes scolaires des élèves, tout cela est importé dans un pays qui produit du coton”, a-t-il déploré.
Les membres du gouvernement désormais habillés en cotonnade pour le
Conseil des ministres
Il a informé qu’ils ont désormais décrété que les membres du gouvernement seront habillés en cotonnade pour le Conseil des ministres. “Apprenons à nous aimer sinon personne ne le fera à notre place. […] Nous avons de quoi faire cela. Ce sont des choses sur lesquelles nous allons essayer de veiller. Parce que ce sont des mouvements et des gestes qui peuvent entraîner. C’est un souci pour nous d’acquérir cette capacité agro-industrielle, cette capacité de mise en place d’une chaîne industrielle de petites et moyennes industries qui vont permettre la transformation de nos produits. Il est temps”, a-t-il préconisé. Il a soumis à réflexion de tenir la Rentrée économique tous les deux ans afin d’avoir le temps de faire des évaluations et pour que les choses se murissent et se mettent en place.
Le président IBK a assuré le président du Patronat que le gouvernement, a-t-il dit, ” qui n’a pas le choix, mettra tout en œuvre pour que le secteur privé soit performant, dynamique et porté encore plus haut pour que le Mali ait les meilleurs capitaines d’entreprises dans la sous région et pourquoi pas du continent, demain, dans un temps où nous avons maintenant une zone de libre échange pour tout le continent. Nous avons intérêt à ce que nous venions dans ce nouvel espace concurrentiel avec qualité, compétence et conviction. Je souhaite que notre secteur privé soit parmi les meilleurs, soit le meilleur”.
L’adhésion du Mali à l’initiative de “la Nouvelle route de la soie”.
La cérémonie de la 3e édition de la Rentrée économique a été émaillée par la signature de la Convention de coopération entrant dans le cadre de la ceinture économique terrestre de la Route de la soie qui va jusqu’en Europe et d’une nouvelle route maritime de la soie qui va jusqu’en Afrique. Et tout cela s’appelle “initiative ceinture et route” ou “la nouvelle route de la soie” lancée en 2013 part le président de la République Populaire de Chine Xi Jinping Après la signature de la convention par le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Tiébilé Dramé, et l’ambassadeur de la République Populaire de Chine au Mali, Zhu Living, le président IBK a exprimé ses sentiments de bonheur réel dans la qualité des rapports entre les peuples maliens et chinois. “Nos relations ne datent pas de 1960, elles plongent dans le temps. Ce projet nous a beaucoup séduits, mais ce projet sera un projet structurant de confort de l’amitié entre les peuples si nous nous gardons d’en faire encore un objet de rivalité. Peu importe ce que tel ou tel a comme projet aujourd’hui, l’essentiel c’est ce que le projet route de la soie contient en lui-même de fraternité, de souci d’aider à construire l’autre, partie vivante, à le hisser, à le rehausser pour que nous respirions à la même hauteur humaine. De grâce, ne revenons pas à nos anciens démons. Ce projet suffit à lui même et le Mali, à ce prix-là, et cette réserve étant faite, y adhère pleinement, comme projet structurant, projet permettant d’aller et venir entre les pays et l’on sait que cela est essentiel pour que les peuples se comprennent, soit du commerce normal de convenance et c’est pourquoi tout ce qui a été fait déjà en Afrique de l’Est, qui est en place ou projeté à être fait dans notre zone également, nous importe. Toutes ces voies ferrées nouvelles, ces routes maritimes dont les effets nous arrivent aussi, ces ouvertures commerciales nouvelles sont de bon aloi. Et nous sommes convaincus que c’est par là que le monde sera moins dur, que la compréhension se renforcera chaque jour davantage entre les peuples et c’est cela que le monde attend de nous tous, un monde de paix, un monde de fraternité, un monde de convivialité, un monde d’entente”, a laissé entendre le président IBK.
Auparavant, l’Ambassadeur de Chine au Mali avait vivement salué et remercié le président de la République et le gouvernement malien pour la cérémonie hautement solennelle de signature de la convention qui témoigne, selon lui, de la plus grande importance accordée aux relations de coopération amicale entre le Mali et la Chine. Il a félicité l’équipe du Patronat malien pour l’efficacité et le professionnalisme dont elle a fait preuve dans l’organisation de la Rentrée économique qui a coïncidé avec l’adhésion du Mali à l’initiative de la “Nouvelle route de la soie” qui mobilise non seulement le gouvernement, mais aussi et surtout le monde économique. Pour l’ambassadeur chinois, “l’amitié et la coopération entre pays favorisent de grandes réalisations”.
Il a invité les entrepreneurs maliens à profiter de l’ouverture et de la croissance de la Chine en vue d’amener les meilleurs produits maliens à Shanghai. Car, à ses dires, le Mali a d’immenses potentialités de développement industriel à Ségou et à Sikasso comme Sukala, N’Sukala et la Comatex et l’usine de thé à Farako.
Le Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Tiébilé Dramé, a tenu à remercier, au nom du président de la République et du Gouvernement, le partenaire chinois pour l’appui multiforme qu’il ne cesse d’apporter au Mali. Il a également saisi cette occasion pour demander aux autorités chinoises de faciliter l’obtention de visa Chinois pour les Maliens.
Le plaidoyer de Mamadou Sinsin Coulibaly
Comme à l’accoutumée, le président du Conseil national du patronat du Mali, dans le rôle d’avocat défenseur du secteur privé, a fait un plaidoyer. Il dira que les propositions faites par le secteur privé lors de la 1ère édition de la Rentrée Economique ont reçu un écho favorable de la part du Gouvernement, écho qui a permis l’obtention de résultats importants parmi lesquels nous pouvons citer l’adoption d’un décret orientant la commande publique vers les productions nationales, la réduction de la pression fiscale sur les salaires à travers la suppression de certaines taxes qui n’existaient que dans notre pays et qui se justifiaient difficilement dans un contexte de crise d’emplois. Cependant, a-t-il ajouté, ” force est de constater que pour d’autres chantiers de réformes, non moins importants, les discussions s’enlisent et les avancées concrètes tardent à voir le jour. C’est le lieu pour nous de réitérer la nécessité de poursuivre ce vaste chantier de réformes et de renforcer le dispositif par la création d’un comité de suivi au plus haut niveau, chargé d’identifier les facteurs de blocages et de faire les arbitrages nécessaires. Un suivi rapproché de tous les dossiers de la rentrée économique par la Présidence serait très apprécié “.
Mamadou Sinsin Coulibaly (président du CNPM) : ” Le tribunal du commerce dans son fonctionnement actuel est un frein au business “
Pour le président du Patronat, la Rentrée économique offre l’opportunité d’échanger ensemble sur la problématique de la préservation et du renforcement de la sécurité juridique et judiciaire des affaires au Mali. Et à son entendement, la transformation de la justice est devenue vitale. “Un tribunal du commerce est normalement au service de l’économie. Notre tribunal du commerce, dans son fonctionnement actuel, est un frein au business. Il ne rassure ni les acteurs économiques locaux ni les investisseurs étrangers. Nous devons le reformer pour en faire le tribunal du commerce de nos besoins. En effet, malgré des indicateurs macroéconomiques encourageants et le bon classement du Mali dans le “Doing Business”, les entreprises tardent à renouer avec la croissance afin de pouvoir jouer pleinement leur rôle de créateurs d’emplois et de richesses. Parmi les facteurs qui expliquent cette situation, l’insécurité juridique et judiciaire occupent une place privilégiée. En effet, les entreprises privées, dans leur immense majorité, ressentent une certaine insécurité juridique et judiciaire dans l’exercice de leurs activités économiques. Cette insécurité juridique et judiciaire impacte négativement le climat des affaires et constitue un frein à la volonté des investisseurs étrangers d’investir au Mali. Le Conseil national du Patronat du Mali, imprégné du pragmatisme qui caractérise le secteur privé dans ses actions, situe son intervention au-delà du simple diagnostic et propose des réformes concrètes en lien avec ce thème. Nous osons croire en l’adhésion des départements ministériels concernés et en leur implication à faire aboutir ces réformes, qui permettront d’asseoir les bases d’un climat des affaires plus attractif pour les investisseurs étrangers et plus stimulant pour les entreprises privées”, a-t-il déclaré.
Siaka DOUMBIA