GREVE DES EMPLOYES DE TOTAL MALI : 60 milliards Cfa de chiffre d’affaires au Mali et des salaires de misère pour 72 employés maliens

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Les employés de Total sont révoltés. Ils touchent moins que les employés des autres entreprises en hydrocarbure de la place. Leur indignation est à son comble surtout que le salaire de trois expatriés est plus élevé que la masse salariale mensuelle des 72 agents maliens. Cet énorme écart ne se justifie pas quand on sait que Total détient à ce jour 60 % des parts du Groupement des pétroliers au Mali et plus de 30 % des marchés des hydrocarbures, y compris ceux des particuliers. Une augmentation de salaire de 100 % ne serait que justice, disent les travailleurs décidés à en découdre.

Ce qui pourrait survenir du lundi 25 au mercredi 27 septembre 2006 n’est simplement pas une grève. C’est une opération de dénonciation d’un mal vivre de 72 agents maliens de la multinationale Total. Première en capitalisation boursière de la zone Euro avec ses presque 100 000 employés dans 130 pays à travers le monde, Total est présent au Mali par le biais de sa filiale, Total-Mali, une société de droit malien.

Au Mali, la société fait un chiffre d’affaires moyen de 60 milliards Fcfa par an pour 75 employés sur l’ensemble du territoire. Mais seulement, voilà qu’il y a de quoi tomber à la renverse en lisant le cahier de doléances que les travailleurs ont déposé sur la table de la direction générale ce 19 Juillet 2006. Un cahier de doléances qui, à ce jour, a fait l’objet de deux rencontres entre travailleurs et direction de l’entreprise.

Avant d’exiger de leur employeur de meilleurs conditions de vie, les travailleurs de Total-Mali ont d’abord réclamé de meilleures conditions de travail. Comment, en effet, comprendre qu’ils en viennent à manquer de «simple papier, d’ordinateurs, d’imprimantes, de véhicules, de bureaux… dont l’obtention, disent les travailleurs, relèvent d’un véritable parcours de combattant». A propos, ils parlent de «problèmes endémiques et incompréhensibles» et exigent «une solution rapide et pérenne».

Pour ce qui concerne leurs conditions de vie de travailleurs maliens à Total, nous avons rencontré des femmes et des hommes au bord de la dépression. «Il y a parmi nous qui ne peuvent s’offrir le luxe d’acheter un sac de riz par mois», nous a dit un interlocuteur pour expliquer le bas niveau du salaire des employés de Total. Un niveau de salaire «qui nous inflige un complexe», affirment-ils avant de trancher net : «Le quotidien réel (pour nous) est synonyme de précarité !!». Les employés maliens de Total sont d’autant plus révoltés que, premièrement, ils touchent moins que les autres employés des autres entreprises en hydrocarbure comme la toute nouvelle venue Star-Oil ou encore Shell. Deuxièmement, leur indignation est à son comble au constat, que le salaire mensuel de seulement trois expatriés (un Sud africain, un Nigérien et Burkinabé) est plus élevé que le salaire mensuel cumulé des 72 agents maliens. Un état de flagrance et d’arrogance qu’ils évoquent la rage au cœur. A diplôme égal, à compétence et expérience égales le statut d’expatrié ne peut, à lui seul, justifier l’énorme écart de salaire.

Ce qu’ils appellent «l’angoisse pour nous et nos familles, la fin de mois laborieuses» pour les travailleurs s’expliquent d’autant plus difficilement que Total-Mali détient à ce jour 60 % des parts du GPP (groupement des pétroliers au Mali) et plus de 30 % des marchés des hydrocarbures (y compris les particuliers). Aux dures conditions de travail, à l’absence de plan de carrière pour Malien et au maigres salaires, les travailleurs ajoutent la faible prise en charge de leur couverture sanitaire et de décès, le difficile accès au logement et aux prêts, les charges de transport et téléphone qui grèvent leurs revenus… Une augmentation de salaire de 100 % ne serait donc que justice, disent les travailleurs, décidés à en découdre.

Belco TAMBOURA

Les dégâts collatéraux d’une grève annoncée

La journée d’hier mercredi était annoncée pour être décisive. En effet, la direction générale du travail a entrepris la conciliation entre les deux parties. C’était en présence des représentant du Gpp (Groupement des professionnels du pétrole) et de la Cstm. Selon toute vraisemblance, la grève aura lieu comme annoncée. Le seul jour ouvrable qu’est aujourd’hui jeudi ne devrait permettre d’aller jusqu’au bout des négociations. Et les travailleurs, requinqués à bloc et très soudés (du directeur au dernier des employés) ont envie d’aller jusqu’au bout. Ni les menaces de licenciement ou autre forme de représailles ne saurait les arrêter. On se souvient en effet de cette autre multinationale française qui avait, sur la mine de Morila poussé le crime jusqu’à licencier des grévistes.

La grève affectera 42 stations d’essence à travers le Mali. L’une des plus grandes mines d’or au monde, en l’occurrence Sadiola sera affectée de même que Yétéla. Il en sera de de l’administration, des entreprises de BTP comme CSE et Razel. Il est également important de parler du cas de l’aéroport international Bamako Sénou.

Les 72 Maliens sonnent l’alerte en direction de Paris où est basée Total, 4ème mondial en hydrocarbure. A l’arrière du combat des Maliens, le manque de promotion de cadres maliens dans la haute sphère de cette entreprise française qui réalise l’essentiel de ses bénéfices en Afrique.
Interpellé sur les bénéfices que Total devrait reverser en France, un des hauts cadres de la multinationale n’avait pas hésité à s’interroger sur ce pourquoi, tant il est vrai, que c’est ailleurs que Total fait la totalité de son chiffre d’affaires.

B. T


Le souverain mépris de la direction générale

Ce que dénoncent aujourd’hui les travailleurs de Total-Mali n’est pas seulement les dures conditions de vie et de travail. C’est le souverain mépris qu’affiche la nouvelle direction depuis le début du réveil syndical au sein de l’entreprise.
Présente au Mali depuis les années 50, Total se complaît dans une situation dont les travailleurs ont juré, cette fois-ci, d’y mettre fin. Mais, la goûte qui a fait déborder le vase est l’attitude du directeur général.

Dès son arrivée, en effet, le Sud Africain a commencé par se barricader. Entre lui et les employés, il a érigé une vitre. Il n’y a que quelques rares directeurs qui disposent du code pour accéder à son bureau. D’autres directeurs ou chefs de service n’ont accès à lui que sur rendez-vous.
Aux travailleurs réunis en assemblée générale, il a promis de boucler les négociations entre le 23 août et le 23 Septembre. Ce après qu’il se soit caché derrière l’absence du directeur des ressources humaines en congé. Aucune des études qu’il dit avoir commandité n’ont à ce jour été, ni finalisées ni déposées.

Dans une correspondance signée du directeur des ressources humaines, la direction générale parle d’une nouvelle étude dont les conclusions seront déposées aujourd’hui, 21 Septembre 2006. Et c’est seulement après, fort de cette étude qu’elle soumettra aux travailleurs, le 31 Octobre 2006, ses propositions. C’est ce que le comité syndical appelle dans un avis de grève «le manque de volonté caractérisé par une lenteur volontairement affichée» et «fuite en avant permanente dans la prise de décisions pour des solutions urgentes, immédiates et sérieuses».

Dans le dispositif de l’avis de grève pour les 25, 26 et 27 septembre 2006, le comité syndical de Total-Mali a écrit ceci : «Compte tenu (…) de l’attitude de la direction qui constitue un blocage prémédité (…)». En voilà qui dit long sur l’impatience, voire l’exaspération des travailleurs qui disent ne pas comprendre que, depuis le 7 Septembre 2006, date du dépôt du préavis de grève, rien n’est intervenu pour signifier qu’au moins ont les prend au sérieux.

B. TAMBOURA

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