L’actualité financière de ce mois de mars a été marquée par une véritable bataille de communication entre la Banque malienne de solidarité (BMS) et sa future ex-consœur la Banque de l’habitat du Mali, avec comme enjeu le contrôle de l’exécutif de l’entité issue de la fusion absorption de la seconde banque par la première.
Notons au passage que les deux banques, à l’initiative du gouvernement, dans le cadre des engagements pris à l’égard du FMI, ont entrepris un travail de restructuration de leurs structures financières dont le clou devrait être la fusionner des deux entités à l’horizon du 31 mars 2016. De sources proches du dossier, la Commission bancaire de l’Uemoa, l’organe régulateur des banques dans la zone monétaire, aurait donné le feu vert à l’opération. Il ne resterait plus qu’au Ministre des Finances de signer l’arrêté de fusion pour que l’opération soit définitivement achevée à la date indiquée. Entre temps, c’est l’heure des bilans. Les Conseils d’administrations des deux institutions se sont tenus dans la première décade du mois courant pour arrêter les comptes. L’occasion était, du coup, belle pour transformer ces séances statutaires en foires aux chiffres reluisants ; une véritable compétition qui contribuerait le mieux à rendre la mariée plus belle. La BHM a été la première à dégainer en annonçant un bénéfice de plus de 2 milliards CFA alors qu’elle est restée longtemps sous perfusion ne devant, jusque-là, son salut qu’aux subventions d’Etat et autres ressources issues de la solidarité de ses banques consœurs. La BMS a riposté la semaine suivante en annonçant 4 milliards CFA de bénéfice, presque le double de ce qu’elle réalisait habituellement. Certains experts financiers rencontrés demeurent, au passage, perplexes, voire dubitatifs sur la réalité de ces chiffres. Le fait marquant en est, tout de même, que dans les coulisses des deux Conseils flottait déjà un air de guerre des chefs pour le plus légitime à diriger la nouvelle institution issue de la fusion. D’un côté M. Babaly Bah, actuel PDG de la BMS qui, malgré une retraite qui s’annonce imminente, entend conduire encore les affaires. De l’autre, M. Lanfia Koita, naguère adjoint de M. Babaly Bah à la BMS, et qui avait été mis sur orbite par son mentor, l’ancien Ministre Mamadou Igor Diarra, comme Directeur général de la BHM, poste qui ne devait être qu’un tremplin pour s’assurer la Direction générale de la BMS après la fusion. M. Babaly Bah qui n’avait accepté ce schéma que du bout des lèvres n’entend désormais plus aller dans cette direction d’autant plus que le bouillant Ministre des Finances qui dirigeait ce chantier aura été éjecté du Gouvernement lors du dernier remaniement. Le futur-ex PDG se serait alors mis dans une dynamique de contre-attaque du plan concocté par son ancien Ministre de tutelle, allant jusqu’à contester le mode de gouvernance dualiste PCA-DG suggéré par les Directives de l’UEMOA. Selon des sources dignes de foi, M. Bah aurait tenté de prendre en otage le dernier conseil d’administration par l’adoption d’une motion de soutien mal inspirée, dont le but était de saper la politique gouvernementale en matière de gouvernance des établissements de crédit pour demeurer à sa place comme PDG. Des ministres de la République, singulièrement ceux ressortissants du septentrion comme lui, seraient activement mis à contribution pour faire échec à une réforme qui a déjà commencé à s’appliquer à la BDM-SA. La manœuvre aurait fort heureusement échoué car le Ministère des Finances se serait montré implacable sur la question. Parallèlement, apprend-on, tout ce méli-mélo au sommet aurait eu pour conséquence l’instauration d’un véritable clivage au sein des personnels des deux institutions financières. pros-Bah et pros-Koita auraient commencé à affûter leurs armes pour une très probable guerre des clans qui risquerait d’être dévastatrice pour l’organisation du futur groupe bancaire. Le conflit de positionnement, singulièrement perceptible dans le monde des hauts cadres de l’actuelle BMS, aurait tendance à gangréner une atmosphère déjà rendue dépressive par le contentieux entre cette banque et certains clients. Visiblement, ce scandale financier n’a pas encore fini de livrer tous ses secrets. Affaire à suivre.
Birama FALL