Les services du FMI ont procédé à l’évaluation ex post de la mise en œuvre sur longue période des programmes au Mali. Cette évaluation a été préparée par une équipe des services du FMI à l’issue des entretiens conclus le 18 mars 2011 avec les autorités sur l’évolution et les politiques économiques du Mali. Sur la base des informations disponibles au moment de ces entretiens, la rédaction du rapport a été achevée le 26 mai 2011. Le Mali passe de pays « à risque de surendettement faible à modéré ».
Le développement du secteur privé reste un défi. Le Mali est 132e sur 139 pays au classement de l’Indice de compétitivité mondiale du Forum économique mondial pour 2010-11, et se classe 153e sur 183 pays en ce qui concerne les Indicateurs du climat des affaires 2010 de la Banque mondiale.
Les notes du Mali sont particulièrement faibles pour l’accès au crédit, la création d’entreprises, le commerce extérieur et le paiement des impôts. Le barème de l’impôt sur les bénéfices est largement supérieur à celui des pays voisins. Le Mali présente aussi de graves problèmes de gouvernance; sur l’Indice de perception de la corruption établi par Transparency International, le Mali est 116e sur 176 pays.
Les résultats macroéconomiques du Mali restent sensibles aux aléas de la production agricole et des prix des produits de base. L’agriculture représentant près de 33 % du PIB (cultures vivrières, coton fibre et élevage surtout), l’activité économique est largement tributaire des phénomènes climatiques et de l’évolution des rendements des cultures. De 2004 à 2010, le taux de croissance moyen annuel du PIB a été de l’ordre de 4½ % (soit 2,2 % par habitant), soit un niveau légèrement supérieur à celui des autres États membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) mais bien en-deçà de la moyenne des pays subsahariens, conséquence d’une faible croissance des secteurs secondaire et tertiaire, ainsi que des mauvaises récoltes de 2004 et 2007.
Les résultats de croissance relativement faibles du Mali peuvent être reliés à une série de facteurs. Comme le signalait les Perspectives économiques régionales de l’Afrique subsaharienne parues en octobre 20104, la croissance des pays membres de l’UEMOA a été nettement inférieure à celle des pays subsahariens non-exportateurs de pétrole à forte croissance. La relative faiblesse de l’investissement extérieur et intérieur, ajoutée à la faible compétitivité hormis les prix figure parmi les facteurs clés qui expliquent l’écart de croissance des pays de l’UEMOA, y compris le Mali.
L’impact de la crise financière mondiale a été assez limité en 2009. Ceci dénote le faible degré d’intégration de l’économie malienne à la finance et au commerce mondial, qui a permis de mettre l’activité économique à l’abri des fluctuations des flux du commerce international et des marchés financiers qui ont touché un grand nombre de pays en développement. Grâce à la bonne récolte et à la hausse des cours de l’or, l’activité économique est restée forte durant la période de crise.
La dernière analyse de viabilité de la dette (réalisée à partir des données à fin 2009) a conclu au déclassement du Mali de pays à risque de surendettement faible à modéré. Ce déclassement traduit des vulnérabilités accrues, liées à la volatilité des exportations d’or et aux perspectives incertaines de la diversification des exportations.
Les programmes appuyés par le FMI visaient à améliorer le recouvrement et l’administration de l’impôt en : éliminant les exonérations fiscales généralisées; simplifiant la fiscalité; renforçant les administrations douanières et fiscales; adoptant un mécanisme de fixation des prix pétroliers liés aux cours mondiaux; renforçant le recouvrement et le remboursement de la TVA.
Globalement les progrès ont cependant été lents, en ce qui concerne l’amélioration du recouvrement de l’impôt et le renforcement de l’administration fiscale. Si des progrès ont été accomplis (notamment dans le cadre du second programme) s’agissant de l’amélioration des administrations douanières et fiscales, d’importantes exonérations et des lacunes dans la comptabilisation des recettes fiscales et douanières continuent de nuire au bilan des recettes publiques. L’efficacité de la fiscalité n’a pas encore été améliorée et les autorités se sont montrées réticentes à instaurer un nouveau mécanisme de détermination des prix des produits pétroliers8. Enfin, l’État malien continue d’accumuler des arriérés de remboursement de TVA aux sociétés minières et à leurs fournisseurs. Pour 2009, les créances de deux de ces sociétés, équivalant à 1 % du PIB, ont été apurées par une combinaison de compensations d’impôts et de nouveaux prêts bancaires contractés par le gouvernement. Entre temps, de nouveaux arriérés se sont encore accumulés.
Le Mali est un pays confronté à des défis de taille pour son développement et qui appellent des actions de réforme volontaristes de la part des pouvoirs publics. Les autorités ont fait savoir qu’elles souhaiteraient poursuivre leur démarche visant à relever la croissance dans le cadre d’un programme appuyé par le FMI. Le FMI ayant un rôle essentiel à jouer pour soutenir ces actions, il y a lieu de poursuivre avec détermination son engagement dans le cadre de la FEC. Eu égard à l’ampleur des besoins de financement extérieur du Mali et à l’importance des mesures structurelles à prévoir pour garantir l’efficacité des programmes, il est trop tôt pour envisager le recours à l’application de l’Instrument de soutien à la politique économique (ISPE) ou à d’autres guichets de financement des pays à faible revenu comme la facilité de crédit à court terme (FCC). Plusieurs des mesures à prendre dans le cadre du processus de réforme qui s’impose pour affermir la croissance du Mali, notamment les réformes fiscales, la privatisation des entreprises publiques et le renforcement du secteur financier, sont d’ores et déjà inscrites dans le programme FEC en cours actuellement. Un nouveau programme appuyé par le FMI permettrait de consolider les récents acquis en matière de réforme et constituerait un cadre propice à l’accélération des progrès dans ces domaines. En outre, l’appui du FMI joue un rôle essentiel de catalyseur des concours d’autres bailleurs de fonds. Le Mali restera largement tributaire de l’aide extérieure dans le proche avenir, compte tenu en particulier des pressions qu’exercent sur les dépenses publiques, les besoins sociaux liés la croissance rapide d’une population relativement jeune.
L’accélération des efforts de réforme s’impose aussi en raison des incertitudes qui entourent les perspectives de production de l’or à moyen terme. Les réserves actuelles étant estimées à 350 tonnes et avec une production annuelle d’environ 50 tonnes, la production des mines en exploitation commencera bientôt à diminuer. Bien que les travaux de prospection de nouvelles mines d’or ou d’autres minerais se pours s secteurs industriels à forte intensité de main d’œuvre.
Un ferme engagement des autorités est nécessaire pour mieux mobiliser les ressources intérieures en améliorant le recouvrement de l’impôt. Les défis sont certes de taille mais des progrès peuvent être réalisés. Le Mali a besoin d’un montant considérable de ressources pour atteindre les OMD et accroître l’investissement public dans l’infrastructure.
Kaou Fofana