Les Bamakois, certainement aussi les abonnés de l’intérieur de la société d’eau et d’électricité, ont vécu, hier, une journée rude à cause la grève de 72 heures déclenchée, à partir de minuit, par le Syndicat National des Constructions Civiles, des Mines et de l’Energie (SYNACOME) auquel le syndicat d’EDM SA est affilié. Les coupures sectorielles d’eau et d’électricité, deux denrées vitales, avaient fini par paralyser partiellement l’activité économique dans la capitale et les grands centres urbains du Mali. Le scénario-catastrophe a été évité de justesse par l’implication personnelle d’Ousmane Issoufi Maïga qui se trouve être le Président du Conseil d’Administration d’EDM SA. Il est arrivé à convaincre le syndicat d’arrêter son mouvement.
Un mois à peine après qu’il eut déclenché une grève de 48 heures, le Syndicat National des Constructions Civiles, des Mines et de l’Energie a remis ça. En effet, après l’échec de la conciliation, le SYNACOME a enclenché un mouvement de grève, le 26 mai, à partir de minuit. Ce qui n’a pas manqué de causer des désagréments chez les abonnés de la société de distribution d’eau et d’électricité du Mali (voir ci-dessous le reportage de Mohamed Dembélé).
Des désagréments que le ministère de l’Energie et de l’Eau, sis à l’ex-CRES Badalabougou, a, lui aussi, vécus. S’ils ont résolu le manque d’électricité grâce à un groupe électrogène de grande capacité, en revanche, les cadres du Cabinet ministériel n’avaient pas de quoi faire leurs ablutions. Faute d’eau.
Aux anciennes revendications en huit points est venue se greffer une nouvelle revendication relative à la réforme institutionnelle des secteurs eau et électricité qui, par la force des choses, est devenue la revendication-phare mise en avant pour motiver cette grève.
Du côté du syndicat, l’on dit n’avoir pas été associé au processus de réforme et ‘n’être pas d’accord avec le schéma de réforme visant à séparer les secteurs eau et électricité avec à la clé cinq entités distinctes : les sociétés de patrimoine et d’exploitation des secteurs eau et électricité et une société de services communs. En lieu et place, le syndicat d’EDM SA penche plutôt pour deux entités ou trois, tout au plus.
Faux, rétorque-t-on du côté du ministère de l’Energie et de l’Eau. Le syndicat a été associé à l’étude qui a abouti au schéma de la réforme.
Cette réforme implique un partage clair des rôles, l’Etat étant spécialisé dans la recherche de financement et dans les investissements. D’autant que, estime-t-on au ministère de l’Energie et de l’eau, il est le mieux placé pour assurer les garanties et négocier, à la différence du privé, des prêts concessionnels. D’où l’idée de société de patrimoine. Avec en ligne de mire le développement des secteurs eau et électricité et y faire accéder le maximum de Maliens. Pour la petite histoire, le taux d’accès à l’électricité au Mali dépasse à peine les 20%.
Au-demeurant, laisse-t-on entendre, personne n’est contre les réformes dans les principes à EDM SA. Alors, l’attitude responsable serait de chercher ensemble la façon de les mettre en œuvre.
D’autant que, EDM SA, même si elle a enregistré des progrès remarquables, reste, tout de même, déficitaire. Elle a réduit son déficit d’environ 10 milliards de FCFA à 300 millions de FCFA à ce jour.
Rappelons que les autres points du cahier de revendications du SYNACOME vont du rehaussement des primes de résidence et de technicité pour les corps des constructions civiles, des industries et des mines à la réalisation des travaux de construction de la Direction nationale de l’immeuble de l’hydraulique en passant par la mise en œuvre d’un plan social en faveur des travailleurs à l’occasion de la fermeture des mines, l’application de l’accord d’établissement à Eskom et les avantages spécifiques au personnel de l’administration des secteurs d’électricité et de l’eau.
La journée d’hier a été tout aussi rude pour les syndicalistes du SYNACOME. Nous avons pu joindre, à plusieurs reprises, par téléphone, le Secrétaire Général du Syndicat d’EDM SA, Baba Daou, partagé entre les rounds de négociations et les consultations avec sa base.
Au centre de ce "ballet diplomatique" se trouvait l’ancien Premier ministre, Ousmane Issoufi Maïga, l’actuel Président du Conseil d’administration d’EDM SA, qui s’est mis en quatre pour arrondir les angles entre les parties. C’est ainsi que Baba Daou nous a confié au téléphone qu’à l’issue des négociations, il allait se rendre à Bozola pour déclarer sur les antennes de l’ORTM la levée du mot d’ordre de grève.
Yaya SIDIBE
Les citoyens mécontents d’Edm :
Suite à la coupure générale d’électricité que notre capitale vient de connaître dans la nuit du mardi au mercredi, nombreux sont les citoyens qui ont exprimé leur ras-le-bol face à EDM-SA. Un mécontentement qui est dû aussi bien aux coûts élevés de l’électricité, qu’aux délestages sauvages. Sans compter les variations de l’intensité du courant qui causent des dégâts matériels importants chez les clients.
Il est presque 9 h oo et Sory Cissé est inquiet. Inquiet de ne pas commencer son activité à l’heure habituelle.
Pour cause : coupure du courant. Soudeur, M. Cissé n’arrive pas à comprendre pourquoi le courant ne passe pas.
Après une nuit blanche, notre soudeur pensait qu’il allait retrouver le courant le matin, mais c’était sans compter avec EDM-SA.
Pourtant M. Cissé n’est pas le seul à souffrir de cette situation.
Toutes les couches socioprofessionnelles sont concernées. Toutes, sans exception, sentent les impacts des coupures intempestives.
Pour sa part, Amadou Coulibaly, superviseur à la boulangerie Ba Djelika, sise à Hamdallaye ACI 2000, se plaint de la cherté de l’électricité. "Le prix de l’électricité est des plus élevés en Afrique de l’Ouest. Et les factures ne font que grimper" regrette t-il.
De même, se plaint-il des coupures d’électricité. "Pour pallier cette insuffisance, nous sommes obligés de payer un groupe électrogène qui nous coûte 40 litres de gaz oil par jour. Il y aura certainement une crise de pain à cause de cette pénurie car beaucoup de boulangeries n’ont pas de groupe électrogène".
Et malgré le groupe électrogène, Monsieur Coulibaly déplore l’impact négatif des délestages : "Nous avons notre machine à glace qui est à plat faute d’électricité. Elle ne peut pas être prise en charge par le groupe électrogène. Nous sommes donc obligés d’aller acheter de la glac".
Paradoxe de cette situation, notre maître boulanger s’offusque de la diversité des sources d’approvisionnement : Nous ne comprenons pas qu’avec Manantali, Selingué et les projets d’interconnexion qu’il puisse y avoir autant de délestage. «Et cette situation le révolte : EDM, c’est la m…. Je pense que les Bamakois doivent sortir pour marche».
"Les coupures,en général, nous causent beaucoup de désagréments. Les coupures intempestives gâtent nos matériels. Mais des coupures, comme celle d’hier, impactent négativement sur nos produits surtout le lait, les produits pour bébé, les sardines, les thons etc", se plaint Broulaye Diakité, vendeur dans l’alimentation Minta Marché, sise à l’immeuble ABK 2. Et son collègue, Lamine Sidibé, de lancer : "Nous voulons tout simplement que cette situation prenne fin. A chaque fois qu’il y a coupure, notre compteur grève. Et les factures s’en ressentent. Nous payons souvent 100.000, 125.000 et 200000 FCFA d’électricité. Donc la facture est très élevée".
A l’hôpital Gabriel Touré, les coupures
d’électricité, un véritable casse-tête
"Nous avons de sérieux problèmes avec EDM-SA aussi bien pour les coupures que les variations de tension. Nos appareils en souffrent ".
C’est en ces termes que s’exprime Tidiane Dieffaga, ingénieur biomédical et chef du Service maintenance au CHU Gabriel Touré qui a reconnu que l’hôpital n’a pas été touché par cette coupure.
Pour autant, les délestages constituent une vraie préoccupation.
C’est pourquoi, le service a pris des dispositions pour doter les services techniques (bloc opératoire, urgence, laboratoires…) de groupes électrogènes.
Cependant, les autres services continuent de marcher avec l’électricité fournie par EDM-SA.
Mais, nous confie le Chef du service maintenance, le vrai problème réside au niveau des appareils médicaux qui coûtent excessivement chers.
Propos recueillis
par Mamadou Lamine DEMBELE