La révision des équipements se fera avec prudence afin de conserver le maximum de puissance disponible.
Inauguré en 1992 par les chefs d’Etat des trois pays membres de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal, fruit d’une intégration ouest-africaine réussie, joyau du patrimoine commun du Mali, de la Mauritanie et du Sénégal, le barrage hydroélectrique de Manantali paye aujourd’hui le tribut de son indispensabilité. L’ouvrage doté d’une centrale hydroélectrique d’une puissance totale de 200 mégawatts composée de cinq groupes faisant fonctionner autant de turbines assure à lui seul plus de la moitié d’énergie consommée par les usagers de la société Energie du Mali (EDM).
Ces dernières années, les installations hydrauliques ont montré des signes inquiétants de faiblesse. Plusieurs incidents se sont produits sur les groupes, presque tous provoqués par le manque d’entretien. Car, et il faut le souligner, la centrale devrait subir tous les dix ans une révision suivant un programme de remise en état des installations du patrimoine Energie de Manantali (PEM). Ce programme aurait dû être exécuté en 2011. Conséquence du non respect de ce délai : sur les cinq turbines de la centrale, une seule fonctionne régulièrement. Toutes les autres ont subi des arrêts momentanés de service à la suite d’incidents plus ou moins importants. Sur la base des rapports sur la situation des groupes, le Conseil des ministres de l’OMVS a pris les résolutions n°564 et 587 engageant la SOGEM (Société de gestion de l’énergie de Manantali), à procéder à la mise en l’état de la centrale.
Le programme à cet effet a démarré le week-end dernier. Le coup d’envoi de des travaux d’entretien de la centrale a été donné samedi par le ministre de l’Energie et de l’hydraulique, Mamadou Frankali Keita. L’événement s’est déroulé sur le site du barrage en présence du Commissaire adjoint de l’OMVS, notre compatriote, Marimantia Diarra et du président du Conseil d’administration de EDM, Ibrahim Bocar Daga. Le directeur général de la SOGEM, Cheick Ould Abdellahi Ould Bedda et son homologue de la société Eskom, Abia Mosbo Dikgale et leurs collaborateurs étaient également présents.
UN ÉQUIPEMENT TRÈS COMPLEXE. Le projet de révision générale des cinq groupes de la centrale de Manantali sera réalisé par Andritz Hydro, une entreprise autrichienne, spécialisée dans le secteur de l’hydroélectricité. Coût total de l’opération: 17,8 milliards de francs CFA, entièrement débloqués par la SOGEM. Les travaux comprendront le démontage complet de chaque groupe avec la dépose complète de la roue de la turbine et du rotor de l’alternateur, le nettoyage soigneux et le contrôle de toutes les composantes.
Le remplacement des pièces constitutives, la reprise de peinture des outils, le contrôle, la révision et la remise à neuf des accessoires, notamment les tableaux de contrôle-commande, les protections de groupes et les systèmes air service et air régulation figurent dans les travaux inscrits sur le cahier de charge contractuel que l’entreprise Andritz Hydro est tenu de réaliser dans un délai d’environ 43 mois. L’objectif est ambitieux, mais surtout la tâche est complexe, reconnait Patrice Bardeaux, directeur technique de la société Andritz Hydro. La particularité du projet réside dans le fait que les turbines de la centrale sont faites de roues à sept pales, un équipement très complexe en matière d’hydroélectricité, de l’avis unanime des experts.
Les travaux se dérouleront conformément à un chronogramme qui allie prudence et volonté de maintenir le service, explique de son côté le directeur général de Eskom, Abia Mosebo Dikgalé. Ainsi, la révision de chaque groupe sera planifiée de façon à minimiser les pertes de production et à conserver le maximum de puissance disponible. C’est dans cette même dynamique que des mesures ont été prises pour améliorer la disponibilité des groupes en attendant l’exécution des travaux de la grande révision. Les dispositions d’urgence consisteront à procéder, tout d’abord, au remplacement de l’huile et des joints des groupes n°1, 4 et 5 avec l’assistance du fabricant.
TOUT EST FIN PRÊT. Pour le directeur général de la Sogem, le programme de révision permettra de redonner une nouvelle vie à cet outil de développement de la sous-région. La construction du barrage a en effet favorisé l’agriculture irriguée, la production d’énergie hydraulique et la navigation entre l’embouche du fleuve et Ambidédi au Mali.
Avec la création de la SOGEM en janvier 1997, l’OMVS a réalisé avec succès en 2002 le Projet Energie de Manantali, comprenant l’installation d’une centrale hydroélectrique de 200 mégawatts de puissance installée, un réseau de transport d’environ 1770 kilomètres et 12 postes haute tension. Ce dispositif énergétique a permis de réduire de façon significative le déficit de production d’énergie dans les trois pays membres de l’OMVS. La construction récente du barrage hydroélectrique de Félou, d’une puissance installée de 140 mégawatts, la pose de la première pierre de celui de Gouina et le lancement de l’étude du plan directeur de développement du réseau de transport sont autant d’initiatives qui traduisent la volonté de l’OMVS de créer un cadre adéquat pour optimiser l’utilisation de nos ressources naturelles propres dans l’intérêt de nos populations, a estimé Cheick Ould Abdellahi Ould Bedda.
Le ministre de l’Energie et de l’hydraulique, Mamadou Frankali Keita, s’est dit confiant dans la réussite du programme après avoir constaté que tout est fin prêt pour le démarrage des travaux. « Nous pouvons compter sur l’engagement des entreprises à accomplir leur charge contractuelle. Quant à moi, je peux assurer les entreprises de l’accompagnement des gouvernements et de leur volonté à lever tout obstacle pouvait remettre en cause le bon déroulement du programme », a-t-il promis. Une visite des installations de l’infrastructure, suivie du lancement symbolique des travaux de révision, a mis fin à la visite de terrain.
L. DIARRA