« Mesures exceptionnelles pour faire face à une période exceptionnelle ». Plus que jamais, cette maxime s’impose au Mali pour la régulation des prix des denrées de première nécessité. Et, pour cela, malgré les efforts déjà accomplis par l’Etat malien, une intervention urgente des plus hautes autorités du pays est aujourd’hui nécessaire pour éviter que les prix continuent à grimper.
Viande, huile alimentaire et ciment. Les prix semblent avoir pris l’ascenseur, malgré les efforts déjà consentis par l’Etat. Et, en plus de la grande compréhension des consommateurs, il va valoir des mesures beaucoup plus vigoureuses de la part des plus hautes autorités maliennes pour mettre le pays à l’abri de surprises désagréables. Et, si rien n’est fait dans l’urgence pour juguler la situation, il faut craindre que les dispositifs de contrôle des prix ne deviennent inefficaces, pour gérer cette situation conjoncturelle.
Quand l’insécurité et le prix de l’aliment bétail se donnent rendez-vous pour compliquer la situation de la viande
Pour ce qui concerne la viande, à travers le pays, il nous revient aujourd’hui que le kilogramme de la viande avec os est vendu entre 2000 et 3000 FCFA à Bamako, Kati et dans les capitales régionales.
Pour avoir un Kilogramme de viande à Bamako, la ménagère est contrainte de débourser entre 2400 à 2800 FCFA. Plusieurs facteurs pourraient expliquer ce phénomène. Selon une note technique de la Direction général du Commerce, de la Consommation et de la Concurrence (DGCC), l’on constate aujourd’hui une baisse de l’approvisionnement des marchés urbains en bétail de boucherie. A cela, la note technique indique qu’il va falloir ajouter la cherté du prix du bétail, avec une moyenne de 325.000 à 335.000 FCFA, la tête.
Et, cette cherté du prix du bétail, pourrait s’expliquer par l’insécurité au centre du pays. « L’insécurité au centre du pays et un peu partout sur le territoire, surtout en zone rurale, complique la transhumance des animaux vers les centres urbains de consommation », nous a indiqué la note technique de la DGCC. Et, d’ajouter qu’en plus de l’insécurité, il faut aussi prendre en compte le renchérissement du prix de l’aliment bétail dérivé de la graine de coton dont la pénurie a déjà été signalée.
« Le prix moyen du sac de 50 kg est de 8.653 FCFA en hausse de 11% par rapport à son niveau de l’année passée à la même période », a déclaré la note technique. Mais, à toutes ces difficultés, il va falloir une grande réflexion pour la gestion de la sempiternelle question de l’exportation des animaux sur pied vers les pays voisins à forte demande et à des prix attractifs.
« Pour vendre le kg de viande à 2.200 FCFA, le bétail qui pèse 150 kg doit revenir à 200.000 FCFA. Or, le prix moyen est de 350 000 FCFA sur le marché », a précisé la DGCC.
Au regard de tout ce qui précède, vous convenez avec nous que le problème de la viande est plus complexe qu’on ne le pense. « Dans, l’immédiat, les plus hautes autorités devraient trouver une solution à l’insécurité sur les axes routiers et développer l’embauche autour des abattoirs en périphéries des villes », propose la note technique.
Malheureusement, en plus de la viande, la situation de l’huile alimentaire est aussi à prendre au sérieux pour soulager les ménages.
Huile alimentaire, des difficultés provoquées par la baisse de la production nationale et des quantités importées
Il nous revient que « l’approvisionnement de notre pays en huile est de moins en moins confortable ». Selon les statistiques disponibles, la consommation nationale estimée à 120.672 tonnes par an est couvert à 80% par la production nationale et le reste est importé principalement de la Côte d’Ivoire.
Or, il se trouve aujourd’hui que le Mali est dans la complexité d’assister impuissant à la baisse de sa production nationale et des quantités importées.
« La baisse de la production nationale est consécutive à la pénurie de matière première en dépit de la mesure de subvention de la graine de coton à l’achat local et l’importation », a indiqué la note technique de la DGCC. Formelle, elle dira que « les industriels ont du mal à trouver le produit sur le marché régional à importer ».
En ce qui concerne les importations, elle dira que la Côte d’Ivoire principal fournisseur du Mali en huile, a connu une baisse de 70% par rapport au mois passé en raison du déficit de production d’électricité qui a plongé le pays dans le délestage obligeant les unités industrielles à limiter leurs productions.
Mais, plus grave, la note technique de la DGCC a fait remarquer qu’au plan international, le cours de l’huile de palme connaît une hausse tendancielle, soutenue par une forte demande, notamment dans le secteur des biocarburants. « Cette hausse va se poursuivre durant le premier semestre de l’année 2021 en raison de la faiblesse de l’offre de la Malaisie (1er producteur mondial d’huile de palme) et la hausse de la demande pour les besoins de biocarburants », a déclaré la note de la DGCC. Avant d’annoncer que dans « cette perspective, la hausse du prix fournisseur de l’huile alimentaire importée se poursuivra également durant cette période ».
Il est de coutume d’analyser la bonne santé de l’économie d’un pays par le coût du panier de la ménagère. Mais, aussi par la santé de l’immobilier qui tient essentiellement aux prix des intrants comme le ciment.
La baisse de production locale et des importations aide le prix du ciment à prendre l’ascenseur
Depuis un certain temps, le prix du ciment a tendance à être hors de la portée de la bourse du malien moyen. Cette situation non souhaitable pourrait s’expliquer par la combinaison de plusieurs facteurs, notamment la baisse de la production locale et des importations.
En ce qui concerne la baisse de la production nationale, il va falloir admettre que les multiples coupures d’électricité sont passées par là. « La production nationale est en chute en raison des délestages et coupures intempestives d’électricité », a indiqué la note technique.
Et, pire comme pour ne pas arranger la situation, les pays d’importation du ciment malien ont été pratiquement confrontés aux mêmes difficultés de fourniture d’électricité. « Les pays d’importation confrontés aux mêmes difficultés ont diminué drastiquement leurs exportations », a ajouté la DGCC.
Mais, elle a aussi estimé que « les perturbations du trafic routier inter état consécutives aux crises sociopolitiques dans le secteur des transports et de l’administration ont des impacts négatifs sur l’approvisionnement régulier de notre pays ».
Il faut dire que pour faire face à ces difficultés, l’état avait déjà prix des mesures, notamment une exonération de la TVA à l’achat et à l’importation de la graine de coton, dans l’espoir de stabiliser le prix de l’huile de coton et du tourteau par ricochet celui de la viande. Et, c’est au nom de cette mesure que les prix de l’huile locale et de l’aliment bétail ont été plafonnés. « Mais, aujourd’hui au regard de la conjoncture, il faut craindre que l’impact de ces mesures ne reste limité, car la production locale a pris un coût », craint la DGCC.
C’est aussi le lieu de rappeler que les prix de l’huile importée et de la viande sont restés libres. Et, cela se comprend par le fait que l’huile importée n’a pas encore bénéficié de mesures d’incitation fiscale. Pour ce qui est de la viande, « la stabilisation des prix nécessite des actions structurelles d’amélioration de la production animale et conjoncturelles de sécurisation du trajet d’approvisionnement des villes en animaux de boucherie », a conseillé la DGCC.
Assane Koné