Les responsables de l’association culturelle Ginna Dogon étaient face à la presse, le week-end dernier, à la Maison de la presse pour dénoncer la détérioration de la situation sécuritaire à travers les tueries et les vols du bétail des Dogons. Aussi, ils ont déclaré être opposés au désarmement de la seule milice Danna Ambassagou. La conférence était principalement animée par le président de Ginna Dogon, Mamadou Togo.
Selon le conférencier, le centre du Mali, particulièrement la partie exondée, brûle à travers des assassinats des personnes innocentes, des vols de bétails… Face à cette situation, dit-il, les Dogons, en plus d’être victimes des attaques barbares, sont victimes de vols de bétail ces derniers temps. “Nous assistons à une nouvelle forme de terrorisme dans le pays dogon qui, pour nous, consiste à ôter aux populations dogons certains moyens d’existence. Il s’agit du vol de bétail qui vise à appauvrir les populations, après les avoir empêchés de cultiver. Tout cela consiste à appauvrir, à rendre les populations dépendantes, à les amener à perdre tout moyen de subsistance”, a déclaré le président de l’association Ginna.
En plus de ces vols d’animaux, selon Mamadou Togo, les forces du mal sont en train de démolir les témoins de la culture dogon tout en brûlant les Toguna et détruisant les hôtels. Et d’ajouter qu’il y a un acharnement contre le peuple dogon qui ne dit pas son nom. “L’association Ginna Dogon trouve intolérable qu’on empêche la communauté dogon de cultiver, d’aller récolter, qu’on envisage de mettre le feu aux champs”, a-t-il dit.
Le conférencier a saisi l’occasion pour démentir les accusations qui qualifient les combattants de Danna Ambassagou de “bourreaux”.
“Quand on dit que les dogons sont des tueurs et que pour cela ils ont Danna Ambassagou, je dis que c’est faux et archi faux”, a-t-il laissé entendre.
Pour lui, Danna Amabassagou n’attaque pas, mais réplique aux attaques des djihadistes-terroristes. “Je trouve la riposte bien fondée, car nous, Dogons, appliquons la légitime défense”, soutient-il. Sans tergiverser, le président de Ginna Dogon annonce son opposition au désarmement du seul Danna Ambassagou. “S’agissant du désarmement, nous ne pouvions accepter que nous déposions les armes et que d’autres viennent nous tuer comme des poulets parce que nous nous sommes débarrassés de nos armes. Nous ne voulons plus que cela se reproduise. Si l’Etat désarme un village, qu’il y place une force pour sécuriser ce village”, a déclaré Mamadou Togo.
500 morts enregistrés dans le pays dogon
Selon le président de Ginna Dogon, les cas de vol de bétail ne resteront pas impunis. Et d’affirmer avoir saisi déjà la justice. “Nous sommes en train de réunir des éléments pour traduire en justice nos voleurs de bétail. Ces voleurs sont des grands criminels et ils sont doublement criminels car ils tuent les propriétaires avant d’aller avec les animaux”, a-t-il martelé avant d’ajouter : “Nous demandons à l’État et ses partenaires et amis de tout mettre en œuvre pour empêcher certains de tuer d’autres Maliens. Nous, au pays dogon, nous nous sentons délaissés, abandonnés à nous-mêmes”.
Pour sa part, Binogo Ouloguem, membre de la commission technique de Ginna Dogon, a dévoilé la stratégie des voleurs de bétail du pays dogon. “Des jeunes s’adonnent à identifier les troupeaux, armer le réseau, envoyer les groupes armés, effrayer les populations, tuer et voler le bétail…”, a-t-il déploré. Selon M. Ouloguem, le transport de ces bêtes volées a été organisé par les auteurs, cela sans contrôle sérieux. “Aujourd’hui, le réseau commet son vol, négocie des camions. On fait peur à ceux qui réclament leurs animaux, sinon on les tue”, déclare-t-il.
Pour lui, les dégâts causés par l’insécurité dans la commune de Sangha sont énormes. “Nous avons recensé dans le pays dogon des dizaines de milliers d’animaux emportés. Nous prenons l’exemple sur la commune de Sangha où nous avons recensé 1965 bovins, 3228 caprins et ovins, des centaines de greniers brûlés, à la date d’août. Une cinquantaine de villages et hameaux totalement détruits, du matériel roulant (motos, tricycles, bicycles, charrettes)…ont été volés, des dizaines de personnes tuées. À la dernière date, nous avons enregistré 500 morts.
Cela n’a jamais été officiellement signalé sur les antennes, dans les journaux…“, a laissé entendre M. Binogo Ouloguem qui a précisé que les déplacés internes et externes sont évalués à plus de 500 000.
Boubacar PAÏTAO