Embargo, crise sécuritaire, gel des avoirs à la Bcéao, arrêt de l’aide budgétaire, etc. l’économie malienne est en résilience. Conséquence, la dette intérieure croît au moment où le secteur économique a le plus besoin de liquidité alors qu’il y a des manques à gagner au fisc et à la douane.
Malgré la double sanction de la Cédéao et de l’Uémoa en plus de l’arrêt de l’aide budgétaire de la France et ses partenaires, l’heure est à l’optimisme au niveau des autorités des finances de notre pays. En tout cas, c’est ce que laisse apparaître le patron de l’Hôtel des Finances. Dans une interview inédite parue le mardi 29 mars 2022 dans les colonnes du quotidien national l’Essor, Alousséni Sanou a bien sûr reconnu l’impact des différentes crises sur notre économie, mais sans être démotivé, il dit compter sur d’autres appuis pour notre pays pour avancer.
Selon des chiffres avancés par le ministre Sanou, la mobilisation des recettes fiscales et douanières enregistre des manques à gagner de plusieurs centaines de milliards de F CFA au 1er trimestre 2022, la mobilisation de la dette intérieure doit se chiffrer à 300 milliards de F CFA au 1er trimestre. Les échéances des dettes non honorées sont estimées à 200 milliards de F CFA, toujours selon le ministre de l’Economie et des Finances.
Les pertes et les manques à gagner en cours d’évaluation se chiffrent en centaines de milliards de F CFA. Les impayés sur les remboursements des titres publics des autres pays de l’Uémoa pour le compte des banques maliennes sont dans l’ordre de la dizaine de milliards de F CFA en plus des intérêts de retard dus. Il y a le cumul des échéances à payer avec les différents créanciers extérieurs du Mali estimés au 31 mars à environ 30 milliards de F CFA et 175 milliards de F CFA pour les investisseurs dans les tires publics, soit un total de 205 milliards de F CFA
Des difficultés existent quant à l’approvisionnement des marchés que le ministre estime maîtriser peuvent selon lui, créer des problèmes sur la sécurité alimentaire et l’inflation à cause de la crise multidimensionnelle persistante.
L’optimisme du ministre se situe au niveau des perspectives de croissance économique. A ses dires, « à la suite de la reprise en 2021, les perspectives de croissance de l’économie malienne, quoique affectées par les séries de crises (institutionnelle, sécuritaire, sanitaire et mondiale) et l’embargo, restent bonnes ». Selon des estimations par lui données, il est prévu un taux de croissance moyen d’environ 4 % contre 5 %, initialement prévu.
Quid de l’ordonnance N°06/2022/CJ du 24 mars 2022 qui fait sursis à exécution des sanctions prises par la Conférence extraordinaires des Chefs d’Etat de la Cédéao le 9 janvier dernier. Cette ordonnance, qui selon le collectif d’avocats du Mali, est « insusceptible de recours signifie que la haute juridiction ordonne la suspension immédiate des sanctions ». Mais tout porte à croire que les mêmes sanctions demeurent après la dernière conférence des chefs d’Etat tenue le 25 mars dernier à Accra, soit juste au lendemain du verdict de la Cour de Justice de l’Uémoa.
Les 300 milliards de mobilisation de dette intérieure, le ministre a en parlé. Il nous revient que les fournisseurs de l’Etat n’ont pas été payés depuis environ 5 mois soit depuis octobre 2021. Mais s’il y a un léger mieux à travers des perspectives économiques prometteuses, pourquoi l’Etat n’honore-t-il pas ses engagements vis-à-vis de ses fournisseurs ? La faillite de ceux-ci sera plus grave que les sanctions en cours et aura des conséquences irréversibles sur la situation économique du pays.
Abdrahamane Dicko