Mise en œuvre des exonérations douanières accordées aux operateurs du secteur minier: Les fossoyeurs de l’économie nationale

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La Direction Nationale de la Géologie et des Mines (DNGM) et la Direction Générale des Douanes (DGD) sont les deux entités impliquées dans la mise en œuvre des exonérations douanières accordées aux opérateurs du secteur minier. Hélas, les deux structures, mal organisées et souvent en complicité avec certains opérateurs économiques ont occasionné à l’Etat malien, une perte de plus de 6 milliards de nos francs.

Le secteur minier est un élément moteur de l’économie malienne. L’or est le produit minier dont la production a connu la plus forte croissance au Mali. Ainsi, en 2010 sur un montant total des exportations de 967,57 milliards de FCFA, l’or représentait 782,27 milliards soit près de 81%. La politique volontariste du gouvernement en la matière s’est traduite par d’importants investissements dans le domaine des infrastructures, de la cartographie, de recherche, etc. De même, en termes-incitations fiscales, les opérateurs bénéficient d’exonérations au titre de la TVA pour trois, de l’impôt sur les bénéfices pour cinq ans, des droits de douanes sur les importations de biens d’équipements et des hydrocarbures.  C’est ainsi qu’au niveau du cordon douanier, l’Etat malien a renoncé à plus de 100 milliards de FCFA de 2008à 2010 au profit des opérateurs du secteur minier.

Ainsi, de graves irrégularités et disfonctionnements ont été constatés dans la mise en œuvre des différentes exonérations par la Direction Nationale de la Géologie et des Mines et la Direction Générale des Douanes qui ont occasionné une perte de 6.397.148.132 FCFA.

La DNGM et DGD ne maitrisent pas les activités de traitement des exonérations

En effet, au titre de l’enregistrement des demandes de régime dérogatoire, les travaux ont fait ressortir que sur un échantillon de dix demandes de régime dérogatoire, cinq n’ont pas été portées dans le registre du service courrier de la DNGM alors qu’elles font l’objet de traitement.

En l’absence d’un registre correctement tenu, il  n’existe pas de document qui permette à la Direction d’avoir une situation exhaustive des demandes reçues.  A la DGD, les demandes de régime dérogatoire ne respectent pas le circuit normal d’enregistrement du courrier. Elles sont parfois réceptionnées directement par le Sous-directeur Réglementation, Fiscalité et Relations internationales. Le fait que les demandes de régime dérogatoire venant de la DNGM entrent à la DGD par deux voies différentes rend difficile leur traçabilité.

Au titre du traitement et du suivi des demandes de régime dérogatoire, la mission du Vegal a constaté que les Divisions Géologie et Mines de la DNGM ne disposent pas non plus de base de donnés ou de documentation complète sur les opérateurs miniers. En conséquence, un avis donné sur une demande de régime dérogatoire ne peut pas être motivé.

Le manque de statistiques a aussi été signalé par la mission du Végal. Ainsi, il est difficile pour la DNGM de connaitre à un moment donné le nombre de visas accordés sur les demandes et les cas de rejet. De même la DGD ne tient pas de statistiques sur les produits pétroliers, les admissions temporaires et les immatriculations temporaires permettant d’indiquer le nombre de demandes ayant bénéficié de ces droits.

Dans le classement et l’archivage, les services de la DGD et de la DNGM n’ont pu mettre à la disposition de la mission du Végal les documents demandés.

Aucune des deux entités n’a de local approprié pour l’archivage de ses documents.

Au Bureau National des Produits Pétroliers (BNPP), aucun document n’a pu être fourni sur le présumé incendie. Cette structure a remis à la mission une copie d’un PV de constat d’huissier en date du 17 juillet 2010 qui fait état d’un incendie survenu dans ses locaux. En l’absence de documents, la mission n’a pu effectuer aucun contrôle au BNPP.

Par ailleurs, le rapport établi par la Direction Générale de la Protection Civile n’ayant pas fourni d’informations sur les causes du sinistre et en l’absence de disposition prises par le Directeur général des Douanes pour déterminer les causes, évaluer les dégâts et situer les responsabilités, la mission a estimé que le cas de force majeure ne peut pas être invoqué.

Au titre de la coordination, la DNGM et la DGD ne s’échangent pas d’information sur la situation des dossiers de régime dérogatoire accordés aux opérateurs du secteur minier. Par conséquent, les exonérations douanières accordées aux opérateurs du secteur minier ne sont pas bien suivies.

La mission a fait savoir aussi que les informations des deux structures ne sont pas fiables.

En effet, la DNGM n’a pu fournir que le rapport annuel de 2008, lequel n’est même pas validé par une signature. Aussi, les informations contenues dans ledit rapport ne concordent pas avec celles de la Division Géologie dont les données servent normalement à son élaboration. La DNGM n’a pas également produit les rapports d’évaluation des années 2008 et 2009 des sociétés SEMOS, SOMILO, YATELA, SOMIKA et TAMIKO; ces rapports doivent traduire les évaluations des besoins en consommations de produits pétroliers et justifient les rapports de validation des programmes.

Au niveau du bureau de validation des exonérations et des maliens de l’extérieur, certains dossiers fournis ne contenaient pas d’attestation de vérification de fiche déterminant la composition des marchandises importées au titre d’exonération.

De graves irrégularités        

Les travaux de vérification du Végal ont permis de reconstituer pour la période 2008, 2009 et 2010un cumul d’importations de 270.961.818 litres et un cumul de consommation de 242.927.588 litres de gasoil au compte des sociétés miniers SOMISY, MORILA, SOMILO et TAMIKO. Le rapprochement entre les importations et les consommations a permis de dégager un écart de 28.034.230 litres de gasoil importés mais non livrés aux opérateurs miniers, en suspension de tous droits et taxes. Ces importations non livrées  entre 2008 et 2009 ont occasionné au détriment du Trésor Public, des droits compromis de 3,05 milliards de FCFA.

Le sous-traitant MOOLMANS LTA des sociétés SEMOS et YATELA a bénéficié de façon irrégulière des admissions temporaires pour un montant de 61,64 millions de FCFA et la DGD a accordé à des operateurs de façon irrégulière des exonérations sur les produits non pétroliers, ainsi la SOMILO et ses sous-traitants BCM et MAXAM ont bénéfice irrégulièrement des exonérations pour un montant des 3,28 milliards de FCFA et TAMICO pendant la période de fermeture allant du 5 septembre 2007 au 11 mai 2009 un montant de 5,16 millions.

 

Dieudonné Tembely 

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