Imbroglio : Le «Che» face aux défis de redressement d’une entreprise nationale moribonde

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Malgré l’opposition de sa famille et les conseils de ses amis restés au pays, Aboubacar Sidiki a saisi l’opportunité de servir son pays à la tête de la Malienne de l’Electricité Pour Tous (MEPT). Une société moribonde qu’il s’est juré de redresser pour que l’électricité ne soit plus un luxe pour ses compatriotes. Son entêtement serait-il payant ? En tout cas, il semble tenir le bon bout à travers l’étude diagnostic initiée afin d’identifier les forces et faiblesses de l’entreprise.

Un entêtement qui pouvait lui être fatal dans un pays comme le Mali où «la méchanceté gratuite, l’hypocrisie… sont les nouvelles normes des relations humaines». Se considérant comme l’un des fils spirituels des Modibo Kéita, Kwamé Nkrumah, Patrice Lumumba… Aboubacar Sidiki a un caractère trempé. Etudiant, il s’est toujours illustré par ses prises de position révolutionnaires chaque fois qu’il s’agissait de la gouvernance du pays. C’est d’ailleurs pourquoi ces camarades l’ont rapidement surnommé   «Le Che» (Che Guevara) ! Des idées révolutionnaires qui lui ont toujours valu la méfiance des autorités du pays restées jusque-là indifférentes à sa compétence et à sa notoriété au niveau international.

Mais, sous la pression des bailleurs de fonds, le régime en place lui a finalement fait appel. Il avait trop attendu une telle opportunité pour la laisser échapper. Et pourtant, ses frères et sœurs ainsi que de nombreux amis lui conseillaient de décliner l’offre. «C’est un cadeau empoisonné. Ils vont tout mettre en œuvre pour que tu échoues afin de te griller auprès des PTF. Tous ceux qui avaient réellement de la vision pour sauver cette entreprise ont glissé sur des peaux de bananeEt tu ne feras pas exception à cette règle bien établie dans ce pays où la médiocrité piétine toujours l’excellence», lui avait conseillé l’un de ses camarades d’enfance devenu un journaliste influent du pays. Inutile de dire que son analyse était partagée par tous les proches de «Le Che». Mais, il fallait plus pour le convaincre de décliner cette offre qui était une véritable aubaine pour lui qui a toujours rêvé de mettre sa compétence et son expertise au service de son pays.

A peine a-t-il pris fonction que Aboubacar Sidiki lança une étude diagnostic afin d’identifier les forces et faiblesses de la société ainsi que les opportunités et les menaces sur sa performance. Cette identification devait lui permettre de définir la stratégie de sauvetage de la boîte.

«Un entrepreneur souhaitant faire évoluer la stratégie de son entreprise doit d’abord évaluer si de tels changements sont envisageables. Une entreprise qui cherche par exemple à pratiquer des prix plus bas doit d’abord s’assurer de dégager suffisamment de valeur et de marge pour se le permettre tout en prévoyant la viabilité d’une telle stratégie sur le long terme», a-t-il indiqué à l’équipe externe rassemblée autour de lui.

Il savait qu’il n’avait pas droit à l’erreur parce qu’il était très attendu. Il s’était vite rendu compte que sa réputation l’avait précédée. Tout comme il comprit vite le sens des conseils que ses proches lui ont donné. Dans sa Direction générale, ils étaient nombreux ceux qui lui montraient qu’ils n’étaient pas heureux de sa nomination. Même si un petit groupe ne ménageait aucun effort pour entrer dans ses grâces en lui rapportant par exemple ce qui se disait dans son dos ou en lui conseillant de se méfier de telle ou telle personne…

Le jeune DG ne fut pas du tout surpris par les résultats de l’étude diagnostic qu’il communiqua à son Département de tutelle et diffusa largement au sein de l’entreprise.

Il retint 3 choses :

-Un effectif pléthorique avec de nombreux bras cassés qui n’apportaient rien à l’entreprise et qui alourdissaient les charges salariales

-Beaucoup de manques à gagner entre la consommation d’électricité et les recettes. Dans le groupe qui le courtisait, il se prit d’amitié avec un jeune qui semblait plus sincère et plus objectif : Batio ! Et c’est ce dernier qui lui a appris que les préleveurs des compteurs s’enrichissaient sur le dos de la société. «Dans ce pays, les opérateurs économiques sont les plus grands fraudeurs. Ils passent des deals avec les agents chargés de prélever leurs compteurs moyennant espèces sonnantes et trébuchantes. Ce qui fait qu’ils sont nombreux ceux qui ne payent même pas le quart de l’électricité consommée», lui dit-il. Une enquête rapidement diligentée lui confirma cela. Au niveau des petits et moyens consommateurs, la solution était simple : faire disparaître progressivement les compteurs à factures au profit des prépayés.

-Aucune lisibilité dans la gestion des hydrocarbures, des pièces de rechange des différentes centrales, des véhicules. Une enquête lui permit là aussi de découvrir qu’une véritable mafia a été mise en place autour de l’approvisionnement en hydrocarbures et en pièces détachées des centrales, des véhicules… A suivre !

Bolmouss

 

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