L’ARACF (L’association des Ressortissants et Amis de la Commune de Faléa) a profité du Forum des Peuples tenu à Niono du 31 octobre au 3 novembre 2011 pour évoquer la situation de la commune de Faléa qui doit faire face à une exploitation prochaine de l’uranium.
Présent à Niono au nom de l’ARACF, Nouhoum Keita, Secrétaire à la Communication a animé un atelier sur la problématique de l’exploitation de l’uranium à Faléa et dans d’autres pays d’Afrique.
Dans son exposé introductif, Nouhoum Keita a souligné que depuis les années 1990, les activités d’exploration et d’exploitation minière se sont multipliées au Mali. Le pays attise les convoitises des grosses compagnies indépendantes, des entreprises multinationales et des puissances régionales et mondiales en raison de son fabuleux potentiel (bien documenté au cours des dernières décennies) en ressources minières et en hydrocarbures de grande qualité : l’or, la bauxite, l’uranium, le cuivre, le plomb, le zinc, le vanadium, le marbre, le calcaire, le phosphate, le fer, manganèse, le calcium, le gypse, l’étain, la platine, le lithium, le lignite, les sables de verrerie, la terre rare, le kaolin, le grenat, la calcédoine, la préhenite, le diamant, le pétrole, le gaz, etc.
De ce fait, dans le Mali d’aujourd’hui, souligne Nouhoum Keita, le secteur minier a remplacé l’agriculture d’exportation (dominée par la monoculture du coton) comme principale source de devises. En effet, troisième producteur d’or du continent africain, il enregistre, à partir des années 2000, une cinquantaine de tonnes en moyenne par an, atteignant un chiffre record de 63 tonnes en 2002. L’or compte ainsi, bon an mal an, pour plus de la moitié du total des exportations et fournit régulièrement une contribution supérieure à 12% au PIB. Sur la période 2001-2008, on dénombre une moyenne annuelle de 60 permis d’exploration ou d’exploitation accordés aux sociétés minières étrangères. Les investisseurs internationaux s’extasient sur les superprofits qu’ils engrangent (revenus directs ou provenant de la revente de licences) dans ce pays « idéal pour faire affaire ».
Mais, dans la montée en puissance de l’exploration et de l’exploitation des ressources naturelles promues par le gouvernement malien, l’uranium et la bauxite occupent désormais une place de choix. Le plus important potentiel d’uranium se trouve dans la Commune rurale de Faléa, située à l’Ouest du Mali, avec une estimation de 5000 tonnes sur un bassin Mali-Sénégal-Nord Guinée couvrant 150km2.
Selon Nouhoum Keita, l’uranium est un élément chimique qui n’est pas stable. Il se désintègre avec le temps dans environ 13 éléments différents. Plusieurs éléments ont une période physique extrêmement longue (des milliers d’années). En tant qu’élément chimique, il présente plusieurs dangers auxquels notre pays ne pourra pas faire face dans l’immédiat du fait de son inexpérience et de l’absence d’une expertise avérée sur ce minerai. Les risques liés à l’exploitation de l’Uranium sont élevés entre autres : Inhalation des poussières radioactives ; du gaz Radon (radioactif) et du plutonium.
Les produits de « désintégration » de l’uranium sont aussi radioactifs et s’associent aux aérosols de l’air que nous respirons. Dans les espaces clos ils s’accumulent peu à peu. Lors de la respiration, ils peuvent pénétrer dans les poumons, se déposer sur le tissu pulmonaire et l’irradier avec comme conséquence possible un cancer des poumons. Ace sujet, Nouhoum keita a fait cas de nombreuses études menées par l’OMS dans des pays du Nord où l’on produit de l’énergie nucléaire et où existent des centrales nucléaires.
Pour l’environnement et les populations le processus de l’extraction de l’uranium produit une grande quantité de déchets radioactifs fluides (stériles) qui resteront radioactif pendant des milliers d’années. Quand les digues des bassins qui contiennent les stériles cassent ou deviennent poreuses l’environnement est contaminé. Les stériles et résidus envoient permanemment le gaz radon dans l’air et l’environnement. La dispersion de la poussière radioactive par le vent et les pluies ; Infiltration dans les nappes phréatiques et contamination des eaux. A cause de ces dangers il faut trouver des lieux de stockage de ces déchets pendant une très longue durée (des centaines de milles d’années).
Cependant la plupart des déchets des mines d’uranium dans le monde n’ont jamais été traités et stocké d’une manière sûre. Dans quelques cas ou les entreprises ont essayé de mettre les déchets dans des endroits sûrs, il y avait toujours des problèmes graves imprévus qui ont surgit. Nouhoum Keita a rappelé qu’un traitement et un stockage qui minimisent le risque de contamination est extrêmement cher. Il a cité l’exemple de l’Allemagne qui a dépensé plus de six milliards d’Euro pour la réhabilitation des mines et la récupération des déchets de l’ancien RDA.
En comparant un tel scenario pour le Mali, le conférencier a expliqué que le Mali n’aurait pas les mêmes capacités financières ni technologiques pour supporter le coût d’une telle opération. C’est pourquoi, il a plaidé pour que l’Etat malien renonce à ce projet de mine d’uranium afin de protéger la riche biodiversité de la commune de Faléa et appuyer des projets alternatifs comme le développement de l’agriculture et le désenclavement du cercle de Keniéba. Et au nom de la politique de diversification des ressources naturelles mise en avant par l’Etat, il a suggéré qu’on exploite les autres minerais et qu’on laisse l’uranium qui nous apportera plus d’inconvénients que d’avantages.
La question de l’uranium a occupé une place centrale dans les débats à Niono avec les témoignages apportés par les délégués du Niger et de la République Démocratique du Congo lesquels ont amené le forum à lancer un appel pour l’arrêt de l’exploitation de cette ressource.
Siaka Z. Traoré