A part la longueur (315 mètres de long pour Djenné contre 816 pour Markala), l’ouvrage dont les travaux ont été lancés, samedi dernier, par le Président de la République (voir 22 Septembre du lundi), aura les mêmes caractéristiques techniques que celui de Markala.
Lors de cette cérémonie, qui restera gravée en lettres d’or dans les annales de l’histoire de la ville historique qu’est Djenné, c’est le ministre de l’Agriculture, Aghatam Ag Alhassane, qui s’est chargé de livrer les détails techniques du barrage, le deuxième en termes d’importance au Mali. On retiendra que l’infrastructure coûtera environ 19,5 milliards de FCFA.
Un financement assuré par l’Etat malien et plusieurs partenaires financiers, dont le chef de file est la Banque Africaine de Développement. Selon les explications du ministre, l’ouvrage sera un barrage-pont de 315 mètres, qui reliera les deux rives du Bani. «Ce qui veut dire que les populations de Djenné n’auront plus de souci pour traverser le fleuve, surtout en période de hautes eaux» a souligné Aghatam A Alhassane.
Avec la construction du barrage, ce sont plus de 15 000 hectares qui seront aménagés et 25 km de routes bitumés. Il sera réalisé 54 km de digues de protection et plusieurs kilomètres de pistes rurales. L’infrastructure va, en outre, permettre de développer la culture du riz à Djenné et d’autres activités, comme le maraîchage, la pêche et l’élevage. Cela se fera avec l’accompagnement du Fonds international pour le développement de l’agriculture (FIDA) et la Banque mondiale. «Le barrage de Djenné a pour objectif de relancer les activités agro – sylvo – pastorales dans le cercle, pour le plus grand bonheur des populations», a fait savoir le ministre de l’Agriculture, tout en précisant que la gestion concertée des barrages de Talo et Djenné permettra à la faune terrestre et aquatique de se régénérer normalement. Agatam Ag Alhassane a, par ailleurs, annoncé que la construction du barrage de Djenné permettra la création de plus de 45 000 emplois, directs ou indirects, dans la localité. Il est également prévu la construction d’un centre de santé communautaire à Sarantomo et la construction du siège local pour la gestion du seuil à Soala.
Dans le même ordre d’idées, le représentant de la BAD, Amadou Thierno Diallo, a quant à lui précisé que le seuil de Djenné, au delà de sa vocation hydro-agricole, fournira de l’électricité, dans les années à venir, à la ville de Djenné et à toute la zone.
A la fin de la cérémonie, le Président de la République, Amadou Toumani Touré, se prêtant aux questions des journalistes, s’est dit «fier du démarrage des travaux de construction du seuil de Djenné, avec le soutien précieux des partenaires au développement». «Dans le cadre du PDES, j’ai toujours dit que le Mali sera un grand pays pétrolier, un pays minier parmi les plus grands d’Afrique. Mais ce qui nous appartient et que nous avons de plus précieux, c’est l’agriculture. C’est la raison pour laquelle nous avons consenti beaucoup d’efforts dans l’aménagement de terres pour l’agriculture. Nous avons pu réaliser le seuil de Talo. Aujourd’hui, par la grâce de Dieu, nous avons démarré les travaux de celui de Djenné, avec l’aide des partenaires financiers, que je tiens à remercier», a ajouté le président Touré.
Sans oublier de mettre un point d’orgue sur l’importance du Programme de développement de l’irrigation dans le bassin du Bani et à Sélingué (PDI-BS), dont l’une des composantes est la construction du seuil de Djenné. «Le Programme de développement de l’irrigation dans le bassin du Bani et à Sélingué est un programme intégré, c’est à dire un programme à multiples dimensions. Les aménagements agricoles concernés par ce programme sont les plus importants après l’Office du Niger, que nous continuons à aménager. C’est donc un projet d’une grande envergure, qui va coûter plus de 120 milliards de FCFA».
Madiama (cercle de Djenné):
Entre traditions et contraintes des nouvelles techniques culturales
Situé dans le cercle de Djenné, le village de Madiama (environ 3 362 habitants) continue à garder certaines pratiques traditionnelles en matière d’agriculture. Pendant ce temps, certains partenaires techniques, telle que la fondation Aga Khan, essaient d’apporter une touche moderne à la production agricole. C’est ce que le ministre de l’Agriculture, Aghatam Ag Alhassane, et la forte délégation qui l’accompagnait ont constaté dans plusieurs parcelles visitées.
Tout d’abord celle de niébé appartenant à Adama Boïté. A ses hôtes, M. Boïté explique qu’il a acheté ses semences auprès des Dogons. La récolte, ajoute-t-il, est répartie entre la consommation et la vente. Ce sont en tout 700 kg qu’il récolte par an. C’est à ce moment que Seydou Coulibaly, Coordinateur de l’initiative Riz, lui fait savoir que gouvernement a décidé de subventionner des semences certifiées, qui ont un rendement meilleur. Visiblement satisfait de la nouvelle, Adama Boïté promet de s’adresser aux services régionaux pour, dit-il, augmenter sa production.
Autre recommandation faite par les techniciens sur place, celle de ne pas se précipiter pour la vente des feuilles et des tiges, qui servent de foin. Une idée qui sera, à moitié, acceptée par le producteur. «Je dois faire face à certaines charges très tôt et, quand la poche est vide, on ne fait pas trop ces calculs», lancera-t-il. En d’autres termes, quand la nécessité frappe à la porte, les techniques sortent par la fenêtre. Toutefois, Adama Boïté, en bon paysan, a retenu les leçons de rotation. D’ailleurs, il les applique régulièrement, pour «lutter contre le Striga», une maladie qui attaque les cultures. Le paysan a ajouté, depuis quelques temps, à sa pratique le «tchômi» ou microdosage, pour éviter l’appauvrissement des sols. Toutes choses que le ministre a appréciées, avant d’annoncer que les partenaires du Mali ont décidé de subventionner l’engrais.
Dans le champ d’à côté, toujours la propriété d’Adama Boïté, il y a des pastèques. Mais le visiteur déchante vite en voyant plusieurs fruits pourris par terre. A la question de savoir pourquoi ce phénomène, la réponse est claire, et prouve que certains producteurs n’ont pas encore accepté de changer leurs méthodes: «quand il y a une forte pluviométrie et que la pastèque repose sur les feuilles, elle pourrit». La solution, selon les spécialistes: «il faut exploiter les champs en fin d’hivernage». Dure réalité à accepter, quand on sait que, dans cette zone, la course à la production des pastèques bat son plein actuellement.
Autre lieu, autre réalité. Plus technique, voire trop technique pour les profanes, c’est la parcelle de formation des formateurs que le ministre et sa suite ont visitée en dernière position. Ici, c’est la Fondation Aga Khan qui s’évertue à inculquer aux producteurs les différentes techniques culturales, avec les avantages qu’elles comportent. Visiblement, les hommes et les femmes sélectionnés pour le projet pilote, semblent être à l’aise dans l’exercice. Ce qui engendré la satisfaction du Directeur national de l’Agriculture, Daniel Kéléma: «Je salue cette action des partenaires techniques. Si nous avions plusieurs exemples de ce genre, je crois que nous pourrions produire plus». «Produire plus», c’est aussi le vœu du Directeur Général de l’Office Riz Mopti, Zakaria Camara: «avec le travail et les nouvelles techniques, nous croyons que nous produirons plus et que nous contribuerons, à notre façon, à renforcer la politique de l’Initiative Riz, prônée par les plus hautes autorités». Et, malgré une pluviométrie «peu satisfaisante», le Directeur régional de l’agriculture reste «confiant». Tout en espérant que «les oiseaux granivores ne fassent pas leur apparition».
Brèves
Djenné
Les partisans de Modibo Sidibé s’invitent à la fête…
Samedi dernier, avec le lancement des travaux du barrage-seuil de Djenné, plusieurs associations et groupements politiques ont voulu, chacun à sa manière, marquer leur présence sur les bords du fleuve Bani. On pouvait donc distinguer, entre autres partis politiques, le PDES d’Ahmed Diane Séméga, l’URD de Soumaïla Cissé ou encore un groupe sympathisant de l’ancien Premier ministre, Modibo Sidibé. Mais, voilà, le protocole n’a pas voulu l’entendre de cette oreille, car, postés à l’entrée du site avec des banderoles, les «militants» de Modibo Sidibé ont été rapidement délogés. Faute d’obtenir une place, ils se sont fondus dans la foule et ont vite fait de mettre leurs banderoles sous les aisselles. Pendant ce temps, les militants des autres partis se trémoussaient sur les chants traditionnels. Comme quoi l’ex-PM devra batailler dur pour se trouver une place parmi les politiciens-dinosaures.
Tourisme
La France met le Mali au régime sec
Pour ceux qui croyaient que les différentes aberrations de la France par rapport à l’insécurité au Mali n’allaient pas porter un coup grave à notre tourisme, il siérait de se rendre dans certains endroits touristiques du Mali, d’où nous revenons. Jadis hauts lieux du tourisme, ces zones sont aujourd’hui désertes. Pas un Européen à l’horizon. Les rues de Djenné, qui grouillaient d’étrangers, ont été délaissées. Les nombreux lieux d’hébergement n’ont pour recettes que celles des délégations nationales en mission. Du coup, ce sont les Maliens qui paient le prix fort quand il s’agit de se procurer des objets d’art. Sur le plateau dogon, n’en parlons pas. Alors qu’il il y a quelques années, on ne pouvait pas parcourir plus de 50 km sans rencontrer des groupes de touristes, il faut maintenant des jours pour en trouver. Ce sont surtout des septuagénaires, qui en ont assez «des idioties que l’on raconte sur les parallèles et leur degré d’insécurité».
Justement, veut-on nous faire avaler qu’il y a plus de sécurité dans les rues de Kaboul, Panama, du Delta central du Niger (Nigéria) qu’à Bandiagara, Djenné ou Tombouctou Jugez-en par vous-même. De toutes les façons, ce que Sarkozy et ses acolytes ignorent, ou feignent d’ignorer, c’est que, pour prendre l’un des leurs en otage, il ne faut pas être seulement au Nord du Mali. Cela est bien plus facile et bien plus possible à Bamako, Ségou, Sikasso, Kayes ou Koulikoro.