Surfacturations de projets routiers : Les projets Mopti-Sévaré et Kayes-Sandaré sur la sellette

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Le Premier ministre Dr. Choguel Kokalla Maïga lors de son entretien avec la délégation de l’Union africaine, le 25 janvier 2022 à Bamako, a, par ces mots, laissé entendre : « Des projets qu’on facturait à 22 milliards de Franc CFA, nous venons, nous les auditons, ça redescend à 12 milliards ». Il s’agit bien sûr du projet routier Dioro-Banakoro. Le même qui avait été dénoncé par un inspecteur du trésor public. C’était 3 projets en tout. Qu’en est-il des deux autres, respectivement 32 et 85 milliards (Mopti-Sévaré et Kayes-Sandaré).

 

Le 18 mai 2021, une lettre ouverte demandant l’annulation de marchés publics a été adressée au Premier ministre Moctar Ouane de la Transition dirigée par Bah N’daw. Dans la lettre dont nous avons copie, l’inspecteur du Trésor, qualifie les marchés qu’il tient à dénoncer, d’illicite et demande leur annulation. Il s’agit de la route Kayes-Sandaré de 135 km pour un coût de 85 milliards 440 millions, Djoro-Banakoro de 45 km avec 22 milliards 798 millions et Sévaré-Mopti, 10 km à 32 milliards 600 millions.

Dans la lettre, le président de la Plateforme des syndicats de lutte contre la corruption se limite à dénoncer le caractère qu’il juge illicite des 3 marchés et demande au Premier ministre Moctar Ouane de les annuler. Il explique et l’a soutenu à travers les médias, que les 3 projets ont été attribués de manière illicite en violation des procédures de passation des marchés publics. Un silence radio jusqu’à la date du 25 mai 2021 qui a vu le régime dirigé par Bah N’daw et Moctar renversé par un coup d’Etat. Ironie du sort, Dr. Choguel Kokalla Maïga prend la manette du navire gouvernemental et 7 mois plus tard confie à la presse que le marché routier de 22 milliards a été audité et réduit à 12 milliards avec une économie de 10 milliards. Par contre les autres marchés ne sont points touchés.

 

Qu’est ce qui s’est réellement passé ?

Après investigation, nous apprenons qu’en réalité, le marché de 22 milliards n’était pas passé en conseil de ministres en ce temps. Selon les informations, la ministre des Transports et des Infrastructures, Dembélé Madina Sissoko venue après le coup d’Etat du 25 mai, a catégoriquement refusé de signer le marché pour le faire passer en conseil de ministres. Elle aurait ensuite interpellé l’opérateur en question qui a fini par ramener la facture à 12 milliards au lieu de 22.

 

Qu’en est-il des projets Kayes-Sandaré et Mopti-Sévaré ?

Si le projet Djoro-Banakoro a connu un audit et a été réduit, les projets Kayes-Sandaré et Mopti-Sévaré se la coule tout bonnement. Par contre, la lettre de demande d’annulation de l’inspecteur du trésor, fait état de violation de loi. Un spécialiste des marchés publics fait savoir que malgré la validation en conseil de ministres, s’il s’avère que la passation a violé la procédure, elle peut être annulée. Dit-il. Un projet est adopté par décret. « Si un décret viole une loi, un autre décret peut annuler le décret précédent », a affirmé un juriste. C’est-à-dire qu’un autre conseil de ministre peut revenir sur l’attribution.

La loi de passation des marchés publics est une loi nationale et sous régionale. Elle cite clairement les conditions d’attribution restreintes et des contrats de marché gré à gré. Selon plusieurs déclarations, les marchés suscités ont été passés de gré à gré et pour Mopti-Sévaré, en consultation restreinte. Ces marchés, selon le président de la plateforme des syndicats lors de ses dénonciations en 2021, devraient passer sous la coupole d’appel d’offre international vu le montant des projets.

Quelques avis d’experts sur la question, ont convenu que Kayes-Sandaré pourrait faire une économie de 35 milliards et 15 ce dernier a pu être audité et ramené à 12 milliards, faut-il garder silence sur les deux autres projets dénoncés en même temps ?

 Koureichy Cissé

 Encadré :

Cet article a été publié dans le cadre du projet Kenekanko. Une plateforme de journalistes d’investigation pour la lutte contre la corruption et la délinquance financière. Le projet a été mis en place par la fondation Tuwindi en partenariat avec plusieurs organisations (UE, Amnesty-international, OCCIPRE, FREE-PRESS).

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