Le groupe Sino Hydro Corporation Ltd, une société de construction chinoise, est de nouveau dans le feu des projecteurs pour l’obtention d’un contrat d’environ 473 milliards FCFA pour la construction sur le fleuve Niger du 4è pont de Bamako et de ses voies d’accès.
Depuis des années au Mali, les dirigeants doutent de cette société chinoise, connue pour ses retards de construction, ses mauvaises performances, mais surtout les coûts peu élevés lui permettant d’obtenir des contrats mirobolants. Malgré ses points noirs, Sino Hydro parvient à remporter ou à récupérer les appels d’offre du gouvernement de transition au Mali.
En 2013, la compagnie réalisait plusieurs chantiers, pourtant contesté par l’opposition, qui avait dénoncé un contrat « bon marché coûte cher ». Ainsi, le barrage hydro-électrique de Gouina, dans la région de Kayes, entamé sur des chapeaux de roues depuis décembre 2013 et dont l’ouvrage devrait être réceptionné en 2018 par les autorités maliennes, tarde toujours à sortir de terre.
Un rapport confidentiel a d’ailleurs été réalisé, dans lequel le groupe chinois Sino Hydro Corporation Ltd est considéré comme « un monument de corruption » dans plusieurs pays d’Afrique et d’Asie, dont la Malaisie. Mais surtout la compagnie chinoise a été « blacklisted » en plus du Mali en Éthiopie, Zambie, Tanzanie, Inde et au Pakistan.
Par la suite, le 29 juin 2016, Sino Hydro Corporation Limited, dont le siège social est à Beijing, a reçu une lettre de réprimande de la part de la Banque Mondiale pour pratique frauduleuse et corruption. De plus, la compagnie n’est pas autorisée à participer aux appels d’offres de la BM jusqu’en juin 2017.
Après des déboires, de vives critiques et un rappel à l’ordre de la Banque mondiale, le retour de Sino Hydro, sous le gouvernement de transition, suscite la controverse dans le secteur de la construction au Mali.
Malgré cela, la firme chinoise Sino Hydro, remporte au Mali, le projet de construction du 4è pont de Bamako et de ses voies d’accès.
Syno Hydro obtient gain de cause auprès de l’ARMDS
Le magazine « Jeune Afrique Business + » du jeudi 25 février 2021 est formel : « Syno Hydro obtient gain de cause auprès de l’ARMDS pour le 4e pont de Bamako sur le fleuve Niger. Le groupe chinois voit l’appel d’offres reformulé après en avoir été exclu pour des critères qu’il juge anticoncurrentiels ».
À en croire la revue, c’est suite à un recours du groupe en décembre dernier, auprès de l’ARMDS, que le président, Dr Alassane Ba, a ordonné fin janvier au Ministère des Transports et des Infrastructures de reformuler l’appel d’offre relatif aux travaux de construction du 4e pont sur le fleuve Niger situé à Bamako et l’aménagement de ses voies d’accès.
En effet, l’ARMDS – répondant aux plaintes de Sino Hydro arguant que l’appel d’offres ne respectait pas les règles de la saine concurrence – demande ainsi la suppression des critères discriminatoires se rapportant précisément à l’exigence de la fourniture des marchés similaires exclusivement dans la zone CEDEAO. Ce qui excluait le groupe asiatique.
Selon le confrère « les travaux en question comprennent la réalisation de l’ouvrage principal du 4ème Pont de Bamako sur le fleuve Niger ainsi qu’une partie de ses voies d’accès et de quatre échangeurs. Un chantier estimé à 473 milliards de FCFA qui a d’ailleurs restreint la liste des candidats potentiels. Ces travaux répartis en quatre lots ne peuvent ainsi qu’être adjugés à des entreprises attestant d’une capacité financière de 69,5 milliards de francs CFA (100 millions € environ), avec 14,5 milliards F CFA (22 millions €) pour le premier lot ; 17 milliards F CFA pour le lot 2; 26 milliards F CFA pour le lot 3 et 12 milliards de F CFA pour le lot 4 ».
Et le journal de poursuivre : « Sino Hydro, qui a réalisé à travers le monde des ouvrages plus complexes et plus longs que le projet du 4e pont de Bamako sur le fleuve Niger, avait saisi la Direction nationale des Routes (DNR) sise à Bamako d’un recours gracieux contre l’appel d’offres dès le 30 décembre 2020. L’appel d’offres remis en cause devait expirer le 25 février 2021 ». Avant de préciser : « Le ministère des Transports et des Infrastructures doit désormais travailler à la reformulation du marché favorable à une saine concurrence. Pour le moment, aucune nouvelle date d’expiration n’a été communiquée par les autorités compétentes ».
Une étape décisive
Au lendemain des révélations accablantes sur ce scandale de corruption qu’on pourrait bien nommer «le Sino hydrogate», on ne peut que se remémorer des bonnes intentions proclamées par le ministre des Transports et des Infrastructures, M. Makan Fily Dabo, lors de sa rencontre avec les acteurs du secteur des transports. Il évoquait une «gouvernance fondée sur l’éthique», l’urgence de «bâtir une éthique du bien commun», une «justice qui (contraint) ceux qui enfreignent les règles et protège ceux qui les respectent», un «accès égal et transparent aux marchés publics, conformément aux meilleures pratiques internationales en la matière» et son intention de lutter «résolument contre la corruption et la fraude dans les affaires publiques». Au risque de laisser l’impression de vouloir mettre sa descendance et ses proches «à l’abri de la peur», il lui faut maintenant réagir pour donner du sens à sa profession de foi.
Le Ministre malien des Transports et des Infrastructures, Makan Fily Dabo et le président de l’ARMDS, Dr Alassane Bâ gagneraient à clarifier leurs liens avec les personnes physiques et morales impliquées dans ce scandale de corruption impliquant le groupe chinois Sino Hydro Corporation. Des explications sont nécessaires pour donner à leurs paroles le poids et la crédibilité recherchés.
Cette affaire est lourde de sens, édifiante à plus d’un titre. Un peu plus d’un mois après avoir pris fonction et proclamé sa volonté de mettre fin au «triomphe de la cupidité», le Ministre Makan fily Dabo, se retrouve confronté à une histoire de marché à forte odeur de corruption. Bien qu’il ne soit pas nommément cité, le fait que dans ce marché de construction du 4è pont de Bamako, le groupe chinois Syno Hydro obtient gain de cause auprès de l’ARMDS et impose une reformulation de l’appel d’offres par le Ministère des Transports et des Infrastructures après en avoir été exclu, sème le doute et la confusion quant à son idée de la gouvernance. Surtout que les principaux protagonistes de la passation de ce marché de construction de pont soient des personnalités de son premier cercle, des proches parmi les proches et même des intimes.
Qu’on le veuille ou non, on ne peut minimiser ce scandale à forte odeur de commissions occultes versées, à la suite d’un appel d’offres devant être reformulé au profit de Sino Hydro Limited, après en avoir été exclu. Surtout au regard d’un ensemble d’éléments du dossier.
Si Sino Hydro est une entreprise chinoise, le ministre Makan Fily Dabo, a toujours entretenu des relations particulières avec des investisseurs. Secrétaire général du Ministère de l’Équipement et du Désenclavement pendant cinq ans environ (jusqu’au coup d’État) sans discontinuer et actuel ministre en charge des Transports et des Infrastructures (toujours le même département), il est le maître d’ouvrage de plusieurs chantiers au Mali. À ce titre, il est au centre de toutes les négociations politiques et/ou commerciales. Du coup, il est un bon connaisseur des milieux politico-économiques chinois.
Dans le passé, plusieurs sociétés ont commis des fautes graves, or elles se voient encore allouer des contrats. Il faut mettre en place un système de black-listing et réaliser un exercice de due diligence sur chaque firme qui décroche un contrat du gouvernement.
Après la reformulation de cet appel d’offres pendant la transition par le Ministère des Transports et des Infrastructures au profit de Syno Hydro, après en avoir été exclu, une exigence de transparence s’impose.
Pour l’opinion nationale et plus précisément les observateurs de la vie publique, se passer des explications sur ces questions serait une erreur tragique. De tout temps, la vie privée a permis de mieux décrypter la vie publique. Partout dans le monde, les intérêts économiques et financiers guident la gouvernance politique. En cas de maintien du ministre Makan Fily Dabo à son poste, sa gouvernance serait naturellement influencée par ses proches et leurs intérêts. Pour lui, il y a donc lieu de clarifier les choses et rassurer ses nombreux soutiens, troublés par ces révélations bien qu’ils feignent le contraire. Pourquoi le gouvernement transitoire tarde à rompre le silence ? Des explications sur le «Sinohydrogate»?
Il en va de la crédibilité du ministre Makan Fily Dabo, et de l’État de droit. Peut-être une étape décisive pour la période transitoire au Mali. À coup sûr, une épreuve.
Arouna Traoré
Il ne faut pas oublier que le 3ème pont de Bamako est un don de l’ état chinois au Mali sous ATT si je ne me trompe pas !
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