Grâce à la structure qui a été inaugurée hier, notre pays confirme son rôle de carrefour au coeur de l’Afrique de l’ouest.
"Il est des événements qui parlent d’eux-mêmes, si bien que tout discours est inutile. Si discours il y a, les populations l’ont déjà lu. C’est un jour mémorable".
C’est en ces termes que le président de la République, Amadou Toumani Touré a introduit son intervention lors de la cérémonie d’inauguration des Entrepôts du Sénégal au Mali (Ensema-SA). C’était hier à Korofina-Sud, dans l’enceinte de la gare marchandise.
Il faut reconnaître que l’événement était exceptionnel. D’abord par sa signification. Ensuite par la qualité des invités. Outre le président de la République, Amadou Toumani Touré, on notait la présidence du chef de l’État sénégalais, Abdoulaye Wade, du président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, et du Premier ministre nigérien, Hama Amadou. Nombre d’autres invités de marque dont le Premier ministre, Ousmane Issoufi Maïga et son homologue du Sénégal, Macky Sall, des ministres des deux pays, les chefs d’institutions et de nombreux opérateurs économiques étaient présents.
Les Ensema, conçus comme un port sec, sont une structure d’intégration sous-régionale par excellence au profit de l’ensemble des pays membres de l’UEMOA. Bâtis sur une superficie de 6 hectares, les Ensema sont constitués de 14 hangars dont deux frigorifiques. Avec une capacité de stockage d’environ 70 000 tonnes, toutes marchandises confondues, ils mettent à la disposition des opérateurs économiques un hangar pour les matériaux de construction, deux hangars pour les engrais, un autre pour le ciment, deux pour le sel, deux pour les céréales, un pour le coton, un pour les produits congelés, un pour les produits réfrigérés, et trois hangars pour les produits divers.
8,4 MILLIARDS FCFA : On y retrouve des infrastructures de base : un parking pour les véhicules particuliers et un autre pour les camions en attente de chargement ou de déchargement, un quai ferroviaire construit le long des hangars et un bloc administratif qui abrite le personnel de gestion et les bureaux juxtaposés des douanes maliennes et sénégalaises. Les Ensema qui ont coûté 8,4 milliards de Fcfa, ont été financés par la Banque islamique de développement (pour 4,09 milliards), l’État du Sénégal à travers le Conseil sénégalais des chargeurs (2,8 milliards) et la CRAO (1,5 milliard). Les travaux ont été exécutés par la Compagnie sahélienne d’entreprises (CSE).
Comme l’ont fait ressortir tous les discours prononcés à la cérémonie d’inauguration, les Ensema devront permettre le développement des échanges commerciaux au sein de l’UEMOA et de la CEDEAO. Cela à travers des produits divers comme le ciment, le sel, le poisson, les fruits de mer, les engrais, les matériaux de construction… Grâce aux entrepôts, les conditions de transport sur le corridor sénégalais seront facilitées. Ce corridor reste à ce jour le seul qui allient transports routier et ferroviaire. A ces deux modes de transport pourra, à l’avenir, s’ajouter le transport fluvial avec le volet navigation de l’OMVS.
L’idée de créer les Entrepôts du Sénégal au Mali paraissait trop ambitieuse dans un premier temps, au regard des défis que représentait sa réalisation. Mais la volonté commune des chefs d’État, Amadou Toumani Touré et Abdoulaye Wade, ajoutée à la vision prospective du Conseil sénégalais des chargeurs, du port autonome de Dakar et de l’ancienne Société des chemins de fer du Sénégal et la disponibilité des autorités maliennes ont permis la réalisation de cette importante infrastructure.
Petit rappel. C’est en 1993 que fut constatée une baisse persistante du trafic sur l’axe Dakar-Bamako. Une baisse liée à la faiblesse des infrastructures de stockage à Bamako. Les études commanditées par la suite conclurent à la nécessité de créer des moyens d’entreposage de marchandises en provenance du port autonome de Dakar et transportées par la voie ferrée ou par la route.
"NOUS RATTRAPONS L’HISTOIRE" : Un accord fut signé entre les deux pays le 13 mai 1995 dans notre capitale pour la création des Ensema. Un mois plus tard, le protocole d’accord relatif aux avantages consentis aux fonctionnaires et agents du Sénégal dans notre pays était signé. Ces instruments juridiques sont en adéquation avec la convention du 8 juin 1963 par laquelle l’État du Sénégal a consenti au Mali l’acquisition d’installations aux ports de Dakar et Kaolack.
Dans l’allocution qu’il a prononcée, le président de la République a mis l’accent sur le fait que "nous rattrapons l’histoire". "Le Mali et le Sénégal étaient liés au temps de l’Empire du Mali. Ils ont tenté ensemble la Fédération du Mali et les voici unis au sein de l’UEMOA, de la CEDEAO", a souligné le chef de l’État pour qui les Ensema seront un vecteur de renforcement des échanges du Sénégal, du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Plus que jamais, le Port autonome de Dakar va jouer son rôle de porte naturelle du Mali, a relevé Amadou Toumani Touré.
Dans le même temps et en sens inverse, notre pays va mériter son surnom de "porte d’entrée" du Sénégal dans l’UEMOA. Le président Touré a insisté sur le fait que les Ensema vont réguler le transport sur le corridor et réduire le coût du transport. Ledit corridor est appelé à prendre davantage d’importance avec les nouveaux axes routiers reliant Bamako à Dakar par le nord et par le sud.
Pour le chef de l’État, grâce au dynamisme des opérateurs économiques, le corridor a de beaux jours devant lui. Il a conclu son intervention en réitérant ses félicitations au président Abdoulaye Wade et ses remerciements au président du Faso Blaise Compaoré et au Premier ministre nigérien Hama Amadou.
C’est le Premier ministre du Sénégal, Macky Sall, qui a lu le discours du président Wade dont la voix était prise après une série de conférences en France. Dans cette intervention, Abdoulaye Wade a exprimé sa "profonde fierté" pour cette "belle réalisation" qui est une des meilleures voies de l’intégration africaine. Sa conviction est que l’Afrique doit emprunter le chemin de l’intégration pour aller vers un développement intégral. Et le transport occupe "une place stratégique" dans ce processus.
DES 1963 : Envers les pays sans littoral, c’est un devoir de solidarité agissante qui s’impose, a poursuivi le chef de l’État sénégalais. Le Sénégal l’a compris en mettant à la disposition du Mali un espace portuaire dès 1963. Un autre espace sera bientôt réservé au Burkina Faso. Le Niger pourra aussi en bénéficier s’il en émet le souhait.
Abdoulaye Wade s’est dit satisfait de ce "jalon important" dans la consolidation des relations fraternelles. Il a précisé avoir demandé aux ministres concernés de faciliter le transit des marchandises en direction ou en provenance des pays sans littoral et appelé, par ailleurs, à réduire les entraves à la libre circulation des personnes et des biens sur le réseau international.
Ce port sec à Bamako, qui est appelé à jouer un rôle de carrefour au cœur de l’Afrique de l’ouest, est une opportunité pour les opérateurs économiques qui doivent tirer le meilleur parti de cette infrastructure que les États ont bâtie pour eux. Le président Wade rêve, à ce propos, d’un axe Dakar-Bamako-Ouagadougou-Niamey libéré de toutes tracasseries.
Le ministre de l’Équipement et des Transports, Abdoulaye Koïta, a, lui, rappelé que "les entrepôts du Sénégal au Mali destinés aux opérations effectuées sous le régime du transit international des marchandises originaires, en transit ou à destination de la République du Sénégal sont constitués en zone franche dans le District de Bamako, à l’intérieur d’une barrière douanière".
Le directeur des Ensema, Ibra Guissé, et le président du conseil d’administration du Port autonome de Dakar, Bara Sadi, ont mis l’accent sur le rôle intégrateur des Ensema.
Aïssa Abdellaoui qui représentait la Banque islamique pour le développement, le principal bailleur de fonds des Ensema, a assuré que la BID continuera d’aider les pays africains à faire face aux défis que sont la lutte contre la pauvreté et la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement.
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