Crise malienne : Qu’est- ce qui va changer avec le président Emmanuel Macron ?

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IBK accueillant Emmanuel Macron

La visite du tout- nouveau chef d’Etat français au Mali, et plus précisément à Gao où sont basées les troupes françaises, a été diversement appréciée par les Maliens. Pour certains, cette première visite consacrée à notre pays, marque la volonté voire le souci du nouveau président Emmanuel Macron de faire avancer les choses dans le processus de résolution de la crise au Mali. Pour d’autres, cette visite n’est ni plus ni moins qu’une simple visite pour un chef d’Etat nouvellement élu à ses troupes engagées sur le théâtre de la guerre.

Le changement de Présidence en France, suscite des interrogations au Mali. Le nouveau président de la République française va-t-il continuer sur l’œuvre de son prédécesseur ? Et Comment ? Quelle politique va-t-il adopter ? Des interrogations légitimes vu le rôle que joue la France dans la crise malienne actuelle.

Le tout-nouveau chef d’Etat français a, en effet, choisi le nord du Mali pour sa première sortie sur le continent. Officiellement, le président Français est allé à la rencontre des troupes françaises engagées dans la lutte contre le terroriste et dont leur base se trouve à Gao. Il a été rejoint par son homologue malien, le Président Ibrahim Boubacar Kéita. Les deux hommes ont eu un tête-à-tête, la première également entre les deux en tant que chefs d’Etat. Les discours livrés face à la presse, se sont voulus rassurants, diplomatiques, empruntant le chemin d’une bonne coopération entre les deux pays, le Mali et la France. Mais qu’on ne s’y trompe pas. La France sous la présidence Macron, est beaucoup attendue au tournant et par les décideurs maliens et par la population dont l’euphorie causée par l’intervention de l’armée française en 2013, pour stopper l’avancée des groupes rebelles, djihadistes et terroristes qui avançaient sur les positions maliennes, a disparu petit-à-petit à cause de l’ « ambigüité » de la politique française dans la résolution de la crise. Les deux hommes le savent avant de se rencontrer à Gao que le rétablissement d’une coopération basée sur la confiance entre les deux pays, entre les deux peuples, devra écarter toute ambigüité et se faire dans le respect mutuel et dans le cadre de la souveraineté nationale. D’ailleurs, ce n’est pas anodin le rappel historique qu’a fait le président malien à son hôte, lorsqu’il évoqua la ville de Gao. « Monsieur le Président, nous vous souhaitons la bienvenue dans cette cité, jadis florissant carrefour commercial, sur le fleuve Niger. Vous entrez au Mali par une porte inscrite dans l’histoire, celle d’une ville fondée au VIIème siècle, et qui fut capitale d’un empire qui a, lui-même, prospéré du premier siècle avant Jésus-Christ jusqu’au septième siècle de note ère. »  Une manière pour le président malien de rappeler à son hôte du jour, tout l’intérêt à protéger cette ville millénaire des obscurantistes et par là, toute la civilisation malienne.

Le plus jeune président de l’histoire française, Emmanuel Macron, s’est voulu rassurant en déclarant à Gao que « l’opération Barkhane ne s’arrêtera que le jour où il n’y aura plus de terroristes islamistes dans la région ».  Une déclaration qui contraste avec le discours de la diaspora malienne vivant aux Etats-Unis qui demande au nouveau président Français de clarifier le rôle et la présence de l’armée française au nord du Mali.

Justement, c’est là que la France sous sa nouvelle présidence, est beaucoup attendue. Car, pour beaucoup de Maliens, si la France a été notre sauveur en 2013, tout laisse croire, selon eux, que c’est la France qui est aussi notre « bourreau » en ce sens que sa volonté de protéger et de soutenir un des principaux protagonistes de la crise, en l’occurrence le MNLA qui s’est mué en CMA, porte entorse au processus de sortie de crise. En clair, la France et ses alliés, prennent en otage la lutte contre le terrorisme et par conséquent le processus de sortie de crise.

Une image que le président Macron devra changer. Même les organisations humanitaires, appellent le nouveau président Français à « réorienter la stratégie de l’intervention française » au Mali. Une nécessité car, le bilan de l’opération Barkhane, avec ses 4 000 hommes déployés depuis août 2014 à la suite de Serval, est très mitigé et suscite même des interrogations sur l’efficacité d’une telle opération. 270 opérations menées depuis le lancement de Barkhane, 250 terroristes arrêtés ou tués, 17 tonnes d’armes saisies ou détruites. Cependant, la situation sécuritaire reste très préoccupante et atteint même des niveaux sans précédents.

Le président malien, a fait son propre analyse et conclut : « Notre Mali, bien malgré lui, est devenu, depuis un peu plus de cinq ans, un des théâtre de cette guerre singulière que les nations modernes sont contraintes de livrer à un ennemi sans visage, l’internationale terroriste. Un ennemi aux mille visages, plutôt, et qui, pour notre malheur, a élu notre peuple et notre pays comme cibles, depuis qu’un de nos grands voisins, déstabilisé de l’intérieur et de l’extérieur, a déversé sur nos terres ce qu’il y a de plus effrayant. A son corps défendant, le Mali est ainsi devenu une des principales cibles de l’internationale terroriste en Afrique, un des principaux champs de bataille de ce qui est, peut-être, une troisième guerre mondiale qui n’ose pas dire son nom ».

Mais le Mali, rassure-t-il, se défend et continuera de se défendre. Pour le président Français, l’accord pour la paix et la réconciliation nationale, feuille de route pour une sortie de crise, signée grâce à l’engagement du Président « IBK », doit être appliquée. « Moi, ce que je veux, c’est une exigence sans doute renforcée à l’égard des Etats du Sahel et de l’Algérie, pour que tout ce qui est inscrit dans les accords d’Alger soit appliqué et pour que la responsabilité de tous et toutes soit prise » a-t-il déclaré.

La France, un partenaire sérieux dans la coopération, sincère dans les relations, c’est ce qu’attend le Mali d’Ibrahim Boubacar Kéita. La France d’Emmanuel Macron saura-t-elle se hisser à hauteur des souhaits ?

Tièmoko Traoré

 

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