La conférence organisée par le Président français sur le thème ‘’Paix et Sécurité en Afrique’’ qui s’est tenue à Paris était destinée à paraître être un acte de bienveillance de plus de la France pour la malheureuse Afrique.
En effet, ce thème portait déjà dans son contenu beaucoup d’ironie. Comment la France, actrice et responsable de nombreux troubles en Afrique peut-elle organiser une conférence sur la paix en Afrique… à Paris ? Ce serait comme si un chef de gang invitait les habitants du quartier à se réunir pour organiser la sécurité de ce quartier à sa convenance. Cette analogie n’est pas exagérée, ni même extrême. La France est en guerre contre l’Afrique et ce, bien avant les indépendances, et l’un de ses outils est justement les accords de défense qui la lient aux pays africains francophones.
De la colonisation aux accords de défenses
Cette guerre que la France livre contre les pays francophones a commencé au temps de la colonisation. Et de l’indépendance des pays africains à aujourd’hui, cette guerre contre l’Afrique se poursuit sous la forme perverse des accords de coopération économiques, financiers, militaires et culturels que la France impose à ses relais africains, nouveaux chefs d’État de ce qui est devenu son pré-carré, l’Afrique Subsaharienne francophone.
En fait, les accords de Partenariat de défense qui ont été renouvelés en 2010 avec 8 pays africains dont le Cameroun et qui présentent comme appât la promesse que la France viendrait au secours de tout pays africain attaqué de l’extérieur n’ont aucun fondement logique.
Au Tchad et en Centrafrique où les troupes françaises sont stationnées, la France a pratiquement décidé du cours des événements politiques même si elle fait des efforts pour y garder une apparente neutralité, permettant à des forces rebelles de renverser les régimes «désobéissants ». Tous les régimes de ces pays ont été renversés avec le soutien de Paris.
En Centrafrique tout récemment en 2013, lorsque François Bozizé a demandé de l’aide au président Hollande, il s’est entendu dire que la France n’interviendrait pas pour protéger le gouvernement centrafricain qui était pourtant le représentant légitime du peuple. Pourtant elle est en train d’intervenir pour protéger le nouveau gouvernement arrivé au pouvoir avec sa bénédiction. En plus des troupes, la France affecte régulièrement des conseillers militaires et à la sécurité aux chefs d’États et armées africains dont la mission est double : protéger le régime obéissant contre les tentatives internes ou externes de renversement et le renverser lorsqu’il présente des velléités d’indépendance.
Contrôle de la doctrine militaire à la Base
Pour ce qui est du Mali, les conseillers militaires français sont là en tant que de véritables espions infiltrés dans la structure de l’armée malienne. Les maliens n’ont pas besoin d’eux pour un conflit improbable avec un pays voisin. Évidemment, le Mali ne devra pas compter sur la France si une autre puissance étrangère sous l’égide de l’ONU décidait d’intervenir au Mali. Elle est là, aujourd’hui au Mali, cette France pour maintenir un état de paternalisme et entretenir l’ascendant psychologique sur notre pays.
Bien que le Mali n’ait pas de bases militaires françaises proprement dites sur son territoire, il est néanmoins quasiment encerclé par les bases françaises du Burkina, du Sénégal et de la Côte d’Ivoire. Les unités d’intendance françaises placées dans les bases militaires malienne constituent déjà un problème de sécurité nationale. Elles jouent un rôle important d’écoutes de télécommunications, d’espionnage, d’évaluation du moral des troupes, de leur niveau de préparation et de recrutement de militaires maliens pour le renseignement français. Ce n’est donc pas par amitié que la France fait former les officiers maliens et africains dans ses académies militaires. Cette décision a été prise sur la base d’un calcul stratégique.
Le fait que nos officiers soient formés en France a aussi un effet psychologique potentiellement dévastateur. Les officiers sortis de ces écoles courent le risque de garder un complexe d’infériorité vis-à-vis de leurs « maîtres » français. Après tout ce sont eux qui leur apprennent l’art de la guerre. Et pourtant, la guerre est d’abord gagnée dans la tête. Les bourses et autres stages octroyés apparemment gratuitement et les séminaires communs de haut niveau sur la sécurité font partie de cette stratégie de domination. Ils ont pour but d’entretenir chez nos soldats, par la création d’un capital sympathie, l’illusion d’une puissance amicale. L’école inter-arme de Koulikoro entre actuellement dans la même logique. À travers elle, les stratèges français veulent simplement que les meilleurs officiers maliens soient moulés dans la pensée militaire française et continuent à voir la France comme un pays « ami et frère et très supérieur militairement».
Pourtant la France qui n’a vraiment jamais gagné une guerre ne doit pas être si difficile à battre sur le terrain africain. Il suffit simplement que le conflit soit suffisamment long et meurtrier pour qu’elle démissionne comme elle l’a souvent fait. Peut-on seulement l’imaginer en train d’envoyer seule des troupes chez nous au Mali ? Elle ne prendrait pas ce risque sur le terrain malien où elle ferait face à des troupes psychologiquement fortes et capables de lui infliger de lourdes pertes. L’adversaire le plus probable du Mali n’est donc pas l’Algérie avec lequel nous avons non seulement plus de chances de trouver un terrain d’entente mais aussi un intérêt réciproque urgent à renforcer une coopération militaire, pour justement affronter et défaire notre principal adversaire actuel qui est la France pays de race, culture et de mentalité différentes, avec des velléités très affirmées de prédation, et dont la situation économique catastrophique actuelle nous impose d’observer la plus grande vigilance possible.
La crise financière que traversent en ce moment les pays européens rend la France encore plus nerveuse et par conséquent plus déterminée à maintenir son hégémonie sur l’Afrique et le Mali en particulier. Les rapports de la commission Védrine, et les conclusions du sommet Paris qui s’en est suivi ne font que confirmer le désarroi dans lequel se trouvent les dirigeants français. Ils font face à la compétition d’autres acteurs sur le sol africains dont la Chine, le Brésil, L’inde, qui ont supplanté la France dans de nombreux domaines.
En attendant, notre guerre d’indépendance n’a pas terminée car il n’est pas dans la nature d’un prédateur de lâcher volontairement sa proie. La tâche revient à la victime de créer des circonstances qui obligeront le prédateur à lâcher prise. Nous avons perdu la première tranche mais pouvons gagner la 2è qui s’annonce. D’autres pays l’ont fait avec cet ennemi aux élans génocidaires. Mais nous ne pouvons gagner une guerre contre un ennemi qui a façonné notre pensée militaire. On ne peut même pas déjà combattre un adversaire que l’on croit être un ami.
Jean Pierre James