La démarche bute sur des contraintes que les parties s”attèllent à surmonter pour le bien-être des acteurs.
La Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT) a, pendant près de trois décennies (1974-2001), fait le bonheur des producteurs et de l”Etat qui tiraient leurs revenus de la culture du coton. La filière coton faisait vivre environ 3 millions de personnes qui se déclinaient en producteurs et opérateurs économiques de tous genres (transporteurs de balles de coton, fournisseurs d”hydrocarbures, d”intrants agricoles, de pièces de rechange pour les véhicules et les unités d”égrenage, les prestataires de services pour l”entretien ou la réalisation des infrastructures socio-économiques, des consommables pour les équipements, les banquiers).
Le coton malien se vendait bien sur les marchés internationaux. En retour, les producteurs bénéficiaient des ristournes alléchantes. Le budget national a aussi bénéficié des retombées du développement du secteur cotonnier à travers des prélèvements fiscaux qui ont totalisé 33,8 milliards Fcfa en 1998.
new-look la filière-
Arriva la décennie 2000 qui voit la filière s”effondrer comme un château de cartes. Les prix sont de plus en plus bas sur le marché mondial, la filire ressent aussi les effets d”une mauvaise gestion au plan interne qui creuse de plus en plus le déficit financier. La CMDT est sous perfusion financière. Pour arrêter l”hémorragie financière, l”Etat engage un plan de redressement de la filière qui a eu peu d”effets. En définitive, l”Etat se retourne vers les partenaires extérieurs qu”il sollicite pour l”aider à sauver la situation socio-économique morose qui menaait d”imploser.
Le gouvernement réaffirme sa volontéde poursuivre la politique de libéralisation de l”économie et de favoriser une plus grande implication des producteurs dans la gestion de la filière new-look. C”est ainsi qu”il a été décidé du recentrage de la CMDT autour des activités liées au système coton. Pour ce faire, la CMDT s”est désengagée des missions de service public, de l”encadrement, des fonctions d”approvisionnement en intrants et équipements, du transport du coton.
Aussi, le gouvernement s”engage à ouvrir le secteur coton et oléagineux à la concurrence afin d”améliorer leur performance et de mieux valoriser leurs produits dérivés.
Toutes ces missions ont été confiées à un pool de spécialistes qui sigent à la Mission de restructuration du secteur coton (MSRC) placée sous l”égide de la Primature et conduite par l”ancien ministre de l”Agriculture N”Fagnanama Koné. La MSRC s”est mise depuis sa création en février 2001 éla toûche en commanditant toutes les études nécessaires à la réforme. La privatisation de la CMDT était fixée à l”horizon 2005. Mais les retards accusés dans la mise en Ïuvre de la réforme ont permis de pousser cette échéance à 2008 (août) avec à la clé d”autres mesures supplémentaires.
Les mesures urgentes-
La MRSC a produit un chronogramme révisé du processus de réforme du secteur coton qui a été adopté en conseil des ministres en novembre 2005. Ce chronogramme a, pour objet entre autres, d”appuyer l”installation et le démarrage des activités du repreneur de Huicoma et de réaliser la privatisation de la CMDT, selon l”ancien ministre des Finances Tiéna Coulibaly du MRSC. Il a également pour objectifs de mettre en place les structures de régulation du secteur coton, d”assurer les fonctions essentielles d”accompagnement en vue de la libéralisation de la filire à terme et de renforcer les capacités des producteurs pour un rôle accru dans la filière.
Le chronogramme a aussi permis d”identifier de nouvelles mesures comme la création de structures pérennes qui vont gérer les aspects transversaux à savoir l”interprofession qui regroupera les producteurs, égreneurs, huiliers, banquiers et transporteurs au sein d”une entité, la bourse du coton, l”office de classement du coton. L”organisation de voyages d”études en avril 2006 au Burkina Faso, Togo et au Bénin a permis de proposer la création de quatre filiales. Ce découpage propose de regrouper les zones de production de Sikasso et Bougouni, San et Koutiala, Fana et les zones de l”Office de la Haute Vallée du Niger (OHVN) et Kita. Le conseil des ministres en sa session ordinaire du 4 octobre 2006 a approuvé ce schéma opérationnel de privatisation.
Les producteurs ont été organisés en sociétés coopératives de producteurs de coton (CPC) de la base jusqu”au niveau national, à l”Union nationale des sociétés coopératives de producteurs de coton (UNSCPC) est créée. Le président de l”Assemblée permanente des chambres d”agriculture du Mali (APCAM) Bakary Togola est aussi le président de l”UNSCPC. Bakary Togola se dit confiant quant au rôle que les producteurs doivent jouer dans les futures structures de gestion de la filire coton. Il assure que les producteurs se préparent à libérer leurs parts de capital des nouvelles sociétés. Ils ont déjà mis de côté 2,1 milliards Fcfa, majorés de 3 milliards Fcfa que les partenaires financiers ont bien accepté de donner.
la reconduction du plan social-A la fin du mois d”août, la MRSC a fait le point des toûches urgentes qu”il restait à achever comme la formation en gestion des coopératives des producteurs et la préparation de leur entrŽe dans le capital des futures filiales, la répartition du personnel entre les filiales, la définition de l”échéance juridique du processus de privatisation de la CMDT, l”apport du conseil-assistance pour la privatisation, l”élaboration d”un programme de communication, l”évaluation du protocole d”accord du mécanisme de fixation des prix et le schéma de gestion du fonds de soutien.
Sur le point relatif à la répartition du personnel de la CMDT entre les filiales, le consultant a rendu son rapport provisoire sur la question. On se rappelle que cette question avait fait l”objet de deux grves lancées par le Comité syndical de la filire coton de la CMDT (en décembre 2006 et en avril dernier), qui tenait ˆ avoir des assurances de la part du gouvernement en ce qui concerne le sort du personnel qui ne serait pas affecté aux filiales. Pour ceux qui ne seront pas reconduits, le Comité syndical de la CMDT voudrait pour eux une application du plan social qui a permis en 2003 à 596 partants volontaires de quitter la structure avec des indemnités confortables de départ.
Le gouvernement soutenait, de son côté, que tout le personnel serait redéployé dans les nouvelles filiales. Le rapport du consultant retient l”affectation de 1397 agents dans les nouvelles filiales. Or les chiffres actuels donnent un effectif de 1946 agents en service à la CMDT et àl”OHVN. Le rapport reste muet sur le sort des 543 autres agents, qui sont considérés comme un sureffectif qui ne sera pas affecté dans les nouvelles filiales.
Le Comité syndical a, lors de l”atelier de validation tenu le 5 septembre sur le rapport, fait des recommandations dont la prise en charge de ce sureffectif qui se fera grâce à la reconduction du plan social de 2003. Les responsables syndicaux souhaitent l”application de ce plan social avant la filialisation. "Cela nous évitera de tomber dans les mêmes travers que nos camarades d”Huicoma, à qui le repreneur a refusé d”appliquer un plan social. Et la suite est connue aujourd”hui : un arrêt de la production et la mise en chômage technique prolongé du personnel" a expliqué Mamadou Sissoko dit Kadhafi, membre du comité syndical à la CMDT. Kadhafi soutient que l”Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) et la Direction de la Fonction publique trouvent appropriée la prise en charge par le plan social de leurs doléances.
"Chat échaudé craint l”eau froide", comme le dit un diction, on peut comprendre les travailleurs de la CMDT qui tiennent à obtenir toutes les assurances pour une sortie honorable pour ceux qui doivent quitter la structure, sans qu”ils ne se sentent frustrés ou abandonnés.
Mais le train de la réforme est en marche. Arrivera-t-il à bon port ? C”est sûr. Prendra-t-il toutes les précautions pour éviter les drames vécus par les précédentes réformes qui ont conduit ˆ des privatisations mal assumées ? Le gouvernement s”y attèle et les partenaires ne se foûcheront certainement pas, si pour bien faire, des réajustements s”avèrent indispensables pour ne pas donner l”impression d”un bradage d”une structure qui a marqué l”économie du pays pendant près d”une trentaine d”années. Comme un caméléon, la réforme avance sans perdre les couleurs de son paysage que sont les désidératas des acteurs qu”elle doit prendre en compte pour mieux réussir la privatisation.
M. COULIBALY
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