La chute de la production du coton aura des conséquences inestimables sur l’économie malienne et sur le plan social. Pour la campagne agricole 2008-2009, il est seulement attendu 190 000 tonnes de coton contre 600 000 pendant les années fastes sous la houlette de l’ancien PDG de la CMDT, M. Drissa Keïta. Les 190 000 tonnes doivent donner environ 86 000 tonnes de graine de coton.
C’est la répartition de ces graines qui divise aujourd’hui les promoteurs d’huileries regroupés en trois entités différentes et le ministre de l’Economie , de l’Industrie et du Commerce, Amadou Abdoulaye Diallo.
PROBLEMATIQUE DE LA REPARTITION
La répartition des 86 000 tonnes de graine de coton jugées très insuffisantes entre HUICOMA, la FAMAB de la Société N’Diaye et frères (SNF) et les promoteurs d’huileries regroupés au sein de l’Association de Promoteurs d’Huileries et d’Aliment bétail du Mali (APHAM) a mis le ministre dans le dilemme.
Comment respecter les closes des contrats qui lient d’une part la CMDT à HUICOMA et d’autre part la CMDT à la FAMAB et prendre en compte les intérêts des membres de l’APHAM? Voilà l’équation que le ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Commerce est appelé à résoudre.
A l’intervalle d’un mois, cinq rencontres se sont déroulées dans la salle de conférence du ministère de l’Economie de l’Industrie et du Commerce sans que les protagonistes ne soient d’accord sur une clé de répartition. La dernière rencontre a eu lieu le lundi 22 décembre 2008 autour du ministre en présence de Secrétaire Général dudit département M. Traoré.
DU CONTRAT DE HUICOMA ET DU FAMAB
La graine de coton constitue la matière première pour la production de l’huile alimentaire et de l’aliment pour bétail. Au Mali, jusqu’en 2004, l’HUICOMA qui était une filiale de la CMDT avait la mainmise sur la graine de coton. Mais avec la privatisation de HUICOMA, ce monopole est devenu caduc. La privatisation de HUICOMA a favorisé la floraison de petites unités industrielles.
Une concurrence s’est installée entre l’Huilerie Cotonnière du Mali (HUICOMA) et les petites unités autour de la graine de coton, la matière première. Les nouveaux maîtres de HUICOMA, qui ont senti le danger venir ont négocié avec la Direction Générale de la Compagnie Malienne pour le Développement du Textile (CMDT) un contrat de livraison de la graine de coton à hauteur de 75% de sa production chaque année.
A l’image de HUICOMA, la Fabrique Malienne d’Aliment Bétail (FAMAB) de la Société N’Diaye et Frères (SNF) a à son tour signé un contrat de livraison de la graine de coton portant entre 35 000 à 55 000 tonnes/campagne. Avec la chute de la production cotonnière, s’il faut appliquer ces deux contrats à la lettre, toutes les petites huileries vont fermer. La FAMAB ne sera pas non plus satisfaite.
L’APHAM CRIE AU FAVORITISME
Pour la campagne 2008-2009, les services techniques du ministère de l’Economie de l’Industrie et du Commerce ont déclaré éligibles 35 huileries autorisées à exercer leurs activités. Ces huileries se sont regroupées au sein de l’Association de Promoteurs d’Huileries et d’Aliment Bétail du Mali (APHAM). A côté de l’APHAM, il y a une coopérative d’une dizaine d’huileries basées à Koutiala.
Des promoteurs d’huileries ont payé l’année dernière 9 143 tonnes de graine, mais la CMDT n’a pas pu leur livrer cette quantité faute de graine. En août dernier, la CMDT a demandé à des huileries une avance d’argent à hauteur de 17 000 tonnes.
La somme de ces deux chiffres fait 26 000 tonnes à déduire des 86 000 tonnes. La part de HUICOMA est de 35 000 t, celle de la FAMAB 21 000 t, soit 56 000 t pour ces deux sociétés. La somme de ces chiffres donne 72 000 t. Il ne reste plus que 14 000 t qu’il faut partager entre les 35 huileries. Chacune d’elle aura à peine 100 t.
UNE MISSION DE CONTROLE SUR LE TERRAIN
Avant de donner le feu vert pour la distribution de la graine de coton dont la tonne est livrée à 94 400 F CFA cette année contre 59 000 l’an passé, le ministre a annoncé l’envoi sur le terrain des équipes de contrôle pour s’assurer que ces huileries ont la capacité de transformer la quantité de graine de coton qu’elles recevront et qu’elles disposent d’équipements complets de raffinage d’huile.
Toute huilerie qui ne remplit pas ses conditions sera éliminée. “J’ai peur du jugement dernier plus que le jugement terrestre”, a dit le ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Commerce. C’est le mercredi 24 décembre que les émissaires vont sillonner le terrain. Déjà hier mardi, dans les conditions normales, le ministre devrait envoyer une lettre à la Direction Générale de la CMDT pour qu’ils commencent la distribution de la graine de coton.
De tout ce qui précède, la campagne 2008-2009 s’annonce périlleuse, du fait de l’insuffisance de la graine de coton, matière première des huileries. Les promoteurs qui ont des bras longs ont déjà fait des commandes de graine de coton en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso.
Dans ces conditions, il y a fort à parier que le prix de l’huile de l’aliment bétail coûtera cher aux consommateurs.
Daba Balla KEITA