La loi des finances subit les contraintes d’un environnement international difficile marqué notamment par la crise financière mondiale.
L’Assemblée nationale a adopté vendredi tard dans la soirée, la loi des finances pour l’exercice 2009. Cela après des débats intenses qui ont vu les élus de l’opposition rejeter le texte et ceux de la majorité le soutenir et même féliciter le ministère des Finances pour les efforts accomplis. A l’arrivée, 125 élus ont voté pour et 19 se sont prononcés contre.
C’est donc un budget se chiffrant en recettes à 1001,800 milliards contre 936,207 pour le budget rectifié (+7,01%) et en dépenses à 1 129,104 milliards contre 1 055,680 milliards dans la loi de finances rectifiée 2008, qui vient d’être approuvé (lire le digest du ministère des Finances en pages 6 et 7).
L’élaboration de cette loi de finances s’est faite dans un environnement international marqué par les effets de la crise financière internationale née en 2007 des prêts immobiliers à risques aux États-Unis. Une crise qui a ébranlé les économies des grands pays tout au long de cette année et qui n’a pas épargné les pays en développement. Du fait de cette crise, la croissance mondiale va se tasser à 4,9% contre 5% en 2006. Il faut aussi y ajouter les pressions inflationnistes liées à la flambée des prix de l’énergie et des matières premières.
Aux États Unis, la croissance qui était de 2,9% en 2006 a été de 2,2% en 2007. Elle était de 2,4% en 2006 au Japon et s’est ralentie à 2,1% en 2007. Dans la zone Euro, la croissance est passée de 2,8% en 2006 à 2,6% en 2007.
UN CHOC CUMULE : En Asie, elle est restée forte (9,1% en 2007 et 8,9% en 2006). Les tensions inflationnistes se sont néanmoins accumulées dans de nombreux pays.
En Afrique, le PIB a atteint 6,6% de croissance en 2007 contre 6,1% l’année d’avant. La zone UEMOA a pu bénéficier d’un contexte social et politique favorable aux activités économiques suite à la signature d’un accord à Ouagadougou consacrant la sortie de crise en Côte d’Ivoire. En 2008, la croissance pourrait s’établir à 4,4%.
L’économie malienne a connu en 2007, le choc cumulé du renchérissement du prix du pétrole et de la baisse des productions cotonnières et aurifères. Le secteur primaire a enregistré une croissance de 2,5% contre 4,4% en 2006. En 2008, on attend une croissance réelle du PIB de 6,4%. Le taux d’inflation s’est situé à 6,3% pour les 4 premiers mois de l’année alors que la norme communautaire est de 3%. Les recettes budgétaires ont connu une hausse de 0,97% pour se situer à 15,2% du PIB nominal à cause de l’accroissement des recettes fiscales de 1,79%.
Les dépenses ont aussi progressé de 10% pour représenter 25,4% du PIB nominal. En fait, la situation des finances publiques s’est caractérisée par une aggravation des déficits budgétaires. Dans ces conditions, le Mali n’a pas respecté les critères de convergences de l’UEMOA.
La mise en œuvre des politiques sectorielles s’est poursuivie avec notamment les axes d’orientation des cadres stratégiques pour la croissance et la réduction de la pauvreté.
Le cadrage macro-économique du budget 2009 a été réalisé à partir des hypothèses d’un taux de croissance nominal du PIB escompté de 7,8% en 2009 et d’un taux d’inflation de 2,8%.
Ce budget s’inscrit en recettes à 1 001,800 milliards, qui représente une hausse de 7,01% liée à l’accroissement du budget général de 6,21% et des budgets annexes, comptes et fonds spéciaux (+ 148,05%). Les recettes du budget général se chiffrent à 988,822 milliards en 2009 contre 930,979 milliards en 2008 dans le budget rectifié. Ce qui donne une progression de 6,21% favorisée par les recettes de cession d’immobilisation incorporelles, les recettes fiscales, les ressources exceptionnelles, l’appui budgétaire et les redevances et taxes des budgets annexes, comptes et fonds généraux.
Les dépenses se chiffrent à 1 129,104 milliards Fcfa, en augmentation de 6,94% par rapport au budget rectifié de 2008. Cette hausse est liée à l’accroissement des dépenses du budget général qui passe de 1 050,452 milliards à 1 116,136 milliards. Le budget général prend en charge les inscriptions de crédits concernant les pouvoirs publics, les administrations centrales et déconcentrés des régions. Les dépenses des pouvoirs publics et des administrations centrales bénéficient d’une inscription de 958,441 milliards contre 902,984 milliards en 2008, dans le budget rectifié (+ 6,14%).
Les budgets annexes, comptes et fonds spéciaux ont une inscription de 12,968 milliards contre 5,228 milliards de Fcfa en 2008. Ce qui donne une augmentation de 148,05% imputable à la création de cinq nouveaux comptes et fonds spéciaux (Fonds de développement agricole, Fonds d’aménagement et de protection des forêts, Fonds d’aménagement et de protection de la faune, Fonds de développement de l’eau et Compte d’affectation spéciale sur les ressources de l’or).
Pour le paiement des salaires du personnel civil et militaire de l’État, les inscriptions sont de 197,066 milliards en 2009 contre 167,9074 milliards dans le budget rectifié 2008 (+ 6,69%).
80,091 milliards sont destinés aux dépenses de matériel et de fonctionnement contre 70,890 milliards en 2008. L’éducation de base, la défense nationale et la sécurité, les pouvoirs publics et l’administration générale et la santé sont les plus visés.
Une dotation de 10 milliards est prévue pour les dépenses électorales c’est-à-dire l’organisation des communales.
Les dépenses en équipements, hors ressources PPTE, passent de 151,853 milliards à 168,869 milliards en 2009 (+11,21%). Les ressources PPTE ont une inscription de 52,821 milliards contre 38,944 milliards en 2008 (+ 35,63%).
L’examen des budgets des institutions montre que celui de la présidence de la République qui était en 2008 de 12,080 milliards, passe à 11,509 milliards en 2009 à cause d’une réduction du niveau des investissements. Le budget de la Primature passe de 8,304 milliards en 2008 à 6,334 milliards en 2009 (- 23,72%). Celui de l’Assemblée nationale est arrêté à 9,476 milliards contre 8,368 milliards en 2008. Cette augmentation tient à la prise en charge d’importants investissements (achat de véhicules, de groupes électrogènes, aménagement et réhabilitation de bâtiments, construction de nouveaux bureaux, et étude de faisabilité d’un nouveau siège).
UN DEFICIT SOUTENABLE : Le budget de la Cour suprême passe de 1,305 milliard à 1,336 milliard en 2009. Pour la Cour constitutionnelle, le budget 2009 sera de 1,329 milliard contre 1,253 milliard en 2008. Le budget du ministère de la Justice passe de 7,653 milliards à 7,971 milliards.
De façon générale, les budgets de tous les départements ministériels ont connu une augmentation.
La loi de finances 2009 prévoit 12,209 milliards pour le paiement des bourses contre 8,991 milliards en 2008.
Ce budget dégage donc un déficit de 127,304 milliards contre 119,472 milliards en 2008. Un déficit que le ministre Abou-Bakar Traoré a jugé soutenable et qui sera financé par les ressources provenant des aides budgétaires extérieures et la mobilisation de l’épargne intérieure.
Pour la première fois, cette année, la Commission des finances, de l’économie, du plan et de la promotion du secteur privé a écouté en plus du ministre des Finances, cinq autres ministres sur les dépenses sectorielles de leurs départements. Il s’agit pour le président de cette commission, d’une approche nouvelle pour aller à un examen de tous les budgets sectoriels avant l’adoption du budget dans les années à venir.
La commission a, comme par le passé fait des recommandations au gouvernement. Parmi celles-ci, on peut citer la prise en charge des recettes de la privatisation par une loi des finances rectificative, l’amélioration du processus du budget-programme pour mobiliser au mieux les financements inscrits dans le budget d’investissement. Il est aussi recommandé de différer la privatisation des péages pendant une période de 2 ans pour procéder à la concession dans les meilleures conditions.
LE SUCCES DE L’INITIATIVE RIZ : La commission a ensuite salué le gouvernement pour avoir largement tenu compte des recommandations faites, il y a un an, lors du vote du budget 2008.
Au cours des débats, de nombreux intervenants ont salué les efforts du gouvernement pour la manière avec laquelle il a fait face à la crise financière et à la hausse des cours du pétrole et des produits de première nécessité. D’autres ont relevé le succès de l’Initiative riz. Plusieurs interventions étaient relatives aux situations locales.
Pour des élus de l’opposition, le budget est, simplement, irréaliste. De leur point de vue, il ne prend pas en compte les difficultés liées à l’école, à la santé. Ils ont aussi dénoncé le fait que les ressources issues de la privatisation de la BIM n’ont pas été intégrées directement au budget 2008. Le député du Parena, Konimba Sidibé a ensuite cité une série d’autres raisons pour rejeter ce budget.
Réagissant à la critique touchant aux ressources issues de la privatisation de la BIM, le ministre a demandé de voir dans la démarche suivie, une volonté de donner une lisibilité aux dépenses des recettes de la privatisation.
Après le vote du budget, les députés ont adopté à l’unanimité un projet de loi autorisant le gouvernement à prendre certaines mesures par ordonnances entre la clôture de cette session et l’ouverture de la session ordinaire d’avril 2009.
A. LAM