Si vous avez du temps à perdre, faites un tour à l’agence Dramane Diakité aux heures de pointe. Malgré les nombreuses lacunes, cette succursale de la BDM-SA semble exercer une fascination mystique sur une clientèle majoritairement composée de petits épargnants. Banque populaire ou banque des pauvres ?rn
Abdoulaye Daffé, le PDG de la BDM-SA est un banquier hors du commun, c’est-à-dire un gestionnaire redoutable et efficace. Année après année, il accumule les oscars grâce aux performances de sa banque, autrefois un gouffre financier mais qui a commencé à relever la tête grâce au concours de la Banque Marocaine du Commerce Extérieur (BMCE). Comme tous les autres banquiers, Daffé est un homme sans état d’âme. Il sait qu’une banque, c’est comme un hôpital qui se moque de la charité. Un sou est un sou. Qui prend paie ou on se charge de vous faire rendre gorge. Aussi, ne s’amuse-t-il pas à être un mécène comme Bill Gates !
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La BDM-SA, comme tout bon établissement financier qui se respecte, ne prête qu’aux riches. A commencer par le financement, chaque année, de la campagne cotonnière de la CMDT, ce colosse au pied d’argile. Autant dire que Daffé excelle dans la macroéconomie. Mais s’il regardait un tant soit peu par-dessus la tête des pauvres, il se rendrait vite compte des nombreux dysfonctionnements qui existent au niveau de l’agence Dramane Diakité, une succursale de sa banque dont la clientèle est majoritairement composée de petits fonctionnaires et de pensionnaires de la Caisse des retraites.
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Des gens au revenu plus que modeste, ce qui transforme l’agence Dramane Diakité en une banque de dépôt à vue. Car tous ces gens là mangent leur blé en herbe. Chaque mois, à partir du 25 et ce pendant une semaine, c’est un cafouillage aux portes de cet établissement. Une fois à l’intérieur, on se croirait dans une ruche bourdonnante. Le service est débordé, chacun s’affaire comme il peut pour retirer le peu qui lui reste (s’il y a un reste vraiment). Il s’agit, comme on dit dans le jargon, de rafler le fond de caisse. Il se trouve, en vérité, que les fonctionnaires ont bouffé tout leur salaire avant terme, surtout s’ils sont endettés au niveau de la banque.Alors, ils se ruent à la recherche d’un “découvert”. Ainsi tombent-ils dans le cycle infernal de l’endettement-paiement sur lequel l’agence prélève son pourcentage.
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Carte cauri : le sésame introuvable
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“Malgré les tracasseries, nous aimons bien cette banque parce qu’on y a vite un prêt et on peut faire un découvert sans problème”, me dit un jour un agent des eaux et forêts. Une sorte de je t’aime moi non plus. Parce qu’à l’agence Dramane Diakité, tout ne marche pas toujours comme sur des rails. Il y a bien des lacunes que la direction générale de la banque elle-même peut corriger pour améliorer la qualité du service. Si autrefois, c’était le sempiternel refrain “nos machines sont en panne”, obligeant le client à attendre des heures, aujourd’hui pour renouveler son chéquier et avoir la carte cauri, il faut faire le parcours du combattant.
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La carte cauri, en particulier, est devenue une camisole de force. Chaque année, au moment du renouvellement de son découvert, le client est obligé de débourser 10 000 F Cfa pour l’avoir. Ce sésame qu’il ne trouvera peut-être jamais car chaque fois qu’il passe c’est la même litanie : “monsieur, votre carte cauri n’est pas encore arrivée”. Un an, deux ans, trois, cinq ans, toujours pas de carte cauri. De guerre lasse, chacun se résigne à son triste sort. “Sésame, ouvre-toi”, c’est pour les riches et non pour les pauvres et l’agence Dramane Diakité n’est pas la caverne d’Ali Baba.
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Chéquier : attendre aux calendes grecques
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Côté chéquier, c’est encore pire. Au moment du renouvellement de sa demande, on vous donne rendez-vous dans vingt jours. En fait, si vous n’avez pas de chance, vous attendrez aux calendes grecques. Un mois, deux mois, trois voire quatre mois ou plus, comme pour la carte cauri c’est le même refrain.
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Que faire alors si on a besoin de son propre argent ? Une seule possibilité : émettre un chèque de guichet. Mais là aussi vous êtes l’objet d’un jeu de ping pong. L’agent à qui vous demandez ce service vous envoie chez “madame la Directrice” de l’agence. Celle-ci à son tour vous expédie comme un courrier à “un autre de ses subalternes”. Le chèque ainsi établi, vous passez à la caisse. Mais vous n’êtes pas encore au bout du rouleau. La caissière, après avoir manipulé quelques touches de sa machine infernale, vous réexpédie une nouvelle fois chez madame la Directrice. C’est votre dernier examen de passage. Ou ça passe, ou ça casse.
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Après m’avoir toisé comme un vulgaire voleur et pris ma pièce d’identité, la patronne de céans, à son tour, fit quelques pirouettes sur son ordinateur. Puis elle me lança l’air visiblement ennuyé : “vraiment, monsieur, on n’aime pas établir les chèques de guichet”. Alors, dans ce cas, qu’on nous donne à temps nos chéquiers et nos cartes cauri et c’en sera fini de toute cette pagaille.
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Dommages que les grandes qualités managériales du PDG Abdoulaye Daffé ne soient pas suivies par ces collègues de l”Agence Abdoulaye Diakité.
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Mamadou Lamine Doumbia
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