Bamako : ET SI L''ON DELOCALISAIT LES MARCHES A BETAIL ?

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Les marchés à bétail continuent d”indisposer les riverains dont les protestations restent vaines. Pourtant notre capitale, à l”instar de toutes les grandes villes du monde, dispose d”un plan d”urbanisation indiquant l”emplacement des infrastructures collectives, des habitations, des bâtiments publics, des espaces verts, des routes, des unités industrielles et artisanales, des marchés, des lieux de culte.

Aujourd’hui, à la faveur de la décentralisation, la mission de supervision de ce plan et son exécution sont dévolues aux six communes du district de Bamako. La division de l”assainissement de chaque commune veille sur la qualité de l”environnement. Mais cela n”empêche pas certains endroits de la capitale de présenter l”image d”un hameau de culture où se côtoient maisons, gargotes, étals, établissements publics et marchés à bétail. Par exemple en Commune IV, précisément dans le quartier de Lafiabougou.

A une centaine de mètres du poste de la police routière situé à l”entrée du pont de Sébénikoro, est installé un marché à bétail jouxtant la cité et le poste haute tension de l”Énergie du Mali. Le "dral" de Lafiabougou-Koda est bordé de stations d”essence, d”un parking pour les véhicules poids lourds, de garages de réparation de voitures, de kiosques de vente de divers articles, de gargotes. Il est séparé des maisons d”habitation par le cours d”eau Woyowayanko dont les eaux sont souillées par les déjections d”animaux.

UN PROBLEME DE SANTE PUBLIQUE

 Le marché à bétail de Lafiabougou sert aussi d”espace pour l”embouche des bêtes. Le négociant Mohamed Alkaya fait partie des dizaines de personnes qui opèrent ici. Il nous montre fièrement du doigt son enclos de moutons d”une trentaine de têtes. Les bêtes sont entassées dans un périmètre exiguë d”environ 10 mètres carrés, coincé entre la voie bitumée et le mur de clôture de la cité d”EDM-Sa, où vivent plusieurs familles. Les moutons de Alkaya côtoient un troupeau de bœufs, parqués dans un enclos plus vaste. Les animaux se nourrissent avec du tourteau et disposent de quelques abreuvoirs. Le sol est jonché de bouse nauséabonde.

Du fait de l”insalubrité, le "dral" de Lafiabougou est un nid de germes de toutes les maladies humaines et animales. Hamadoun Cissé, un voisin du "dral" témoigne : "La nuisance causée par le marché à bétail est permanente". Un autre riverain se plaint du fait que les moustiques et les mauvaises odeurs l”empêchent de dormir pendant une grande partie de la nuit. "J”ai vidé une bouteille entière d”insecticide dans ma chambre hier soir", révèle, un brin ironique, Abdramane Maïga, locataire dans une concession proche du parc.

En plus de la vente et de l”embouche, l”endroit sert aussi d”aire d”abattage. De quoi ajouter à la nuisance. Les occupants des lieux ne font aucun effort pour éloigner les déchets qui attirent les rats, les reptiles, les insectes, tous vecteurs de maladies. Le calvaire des riverains du marché à bétail devient carrément insupportable pendant l”hivernage au cours duquel les mauvaises odeurs se signalent à des centaines de mètres alentour.

La même situation est vécue par les riverains des parcs à bétail à Sabalibougou, sur la route de Koulikoro, à Sotuba, à Torokorobougou, et Faladié. En plus de la pollution, ces marchés à bétail constituent des dangers pour les usagers de la route. La circulation est fréquemment perturbée par des bêtes traversant la voie. Sur les tronçons routiers traversant ces marchés, des coups de klaxon rageurs résonnent toute la journée. Même les freinages d”urgence n”évitent pas souvent les accidents.

UNE PÉTITION : Le parc de Lafiabougou est un titre foncier appartenant à EDM-Sa dont le poste de haute tension, construit en janvier 2002, alimente tout le côté ouest de la capitale. Les occupants des lieux sont exposés à un danger de mort permanent, nous confie un cadre d”EDM-Sa, car en cas de problème sur les lignes électriques, le risque d”électrocution est grand. La proximité des lignes de haute tension étant toujours très risquée.

Les populations riveraines ne restent pas les bras croisés devant les nuisances qu”elles subissent. Adama Maïga, un jeune homme habitant dans les environs, a initié une pétition et récolté plus de 2000 signatures contre l”installation du marché à bétail. Les imams, les chefs de quartiers, plusieurs personnalités ont signé le document. Mais le bras de fer tourna en faveur des éleveurs. Les auteurs de la pétition furent amèrement déçus du manque de réaction de la mairie et du gouvernorat du District. La société EDM-Sa n”a pas eu plus de succès dans ses tentatives pour délocaliser ce pôle de pollution et d”insécurité. Elle a exploité en vain toutes les voies légales pour libérer son espace. Des responsables d”EDM-Sa nous ont montré une lettre adressée au maire de la Commune IV pour demander la libération des lieux. La mairie n”a pas encore répondu à la correspondance.

Du côté de la mairie de la Commune IV, Mme Dicko Kadiatou Tembely explique que son service n”a rien à voir avec la gestion du dral. Pourtant des marchands soutiennent que la mairie leur fait payer des taxes. "Nous payons des taxes chaque mois", assure un négociant.

Pourquoi est-il si difficile d”éloigner des habitations de cette activité génératrice de nuisances ? Plusieurs personnes parmi les riverains soutiennent qu”un espace avait été prévu pour le recasement des vendeurs d”animaux. Cette parcelle serait passée à la trappe de la spéculation foncière.

C. A. DIA

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