Production agricole : La recherche agricole, une alliée des paysans du Sahel

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Des femmes paysannes du village de Wakoro, dans le sud du Mali, joignent les deux bouts avec la relance de la culture de l’arachide, grâce aux nouvelles variétés de semences mises au point par l’Institut international de recherche sur les cultures des zones tropicales semi-arides (ICRISAT).

Et les bienfaits de ces innovations scientifiques, qui s’étendent au Niger voisin, peuvent s’appliquer à d’autres pays des zones tropicales semi-arides, selon les chercheurs de l’ICRISAT basé à Bamako, la capitale malienne.

Loin de son village dont l’écho des habitants parvient souvent dans la brousse, le champ d’arachide de Mariam Coulibaly coexiste à côté de vastes étendues de terres plantées en sorgho et en coton. «Nous ne produisons plus de Tikaba (une variété d’arachide) dont le cycle est de quatre mois; elle a même disparu de la région», explique Coulibaly à IPS, en examinant les pieds d’arachides de son champ.

Coulibaly est présidente d’une coopérative de femmes basée à Wakoro et dénommée ‘Bencola’ qui signifie ‘Entente’ en langue locale bambara. Elle produit et vend aux autres paysans de nouvelles semences d’arachide aux cycles plus courts (trois mois). Ces nouvelles variétés créées par l’ICRISAT ont relancé la culture d’arachides dans la localité.

«Nous étions une association de 25 femmes produisant du sorgho; plus tard, il y a environ 10 ans, nous avons commencé à cultiver ces nouvelles semences d’arachide», ajoute Coulibaly.

Aujourd’hui, le succès des nouvelles semences a fait des émules et la coopérative compte 65 membres venant d’une vingtaine de villages environnants. «Avant ces nouvelles semences, on ne pouvait pas faire plus de deux ou trois sacs de 100 kilogrammes à l’hectare alors que maintenant, on peut avoir 30 sacs ou plus avec le même espace», explique-t-elle.

Au-delà du village de Wakoro, ces semences peuvent être cultivées dans d’autres pays des zones tropicales semi-arides – environ 6,5 millions de kilomètres carrés de terres dans 55 pays – dont ICRISAT estime la population à deux milliards d’habitants, comptant les plus pauvres des pauvres.

Agathe Diama, responsable de la communication à ICRISAT pour l’Afrique de l’ouest et du centre, explique que dans cette région, l’arachide est cultivée et transformée essentiellement par les femmes. «Elle constitue une des principales sources de revenu que les femmes contrôlent», affirme-t-elle.

A Dosso, dans le sud du Niger, entre 2007 et 2010, ICRISAT a mis en place un projet de production et de multiplication de semences d’arachides au niveau communautaire en testant plusieurs variétés.

«Les paysans ont sélectionné leurs variétés d’arachides préférées sur la base des caractéristiques de la plante et de la semence (notamment le rendement des gousses et la résistance aux maladies) et de leur adéquation pour la fabrication de produits transformés (tourteaux et huile)», indique Diama à IPS.

Selon un article publié par ICRISAT en 2011, au total 28 groupements de paysans nigériens, dont 19 étaient des groupes de femmes et neuf des groupes mixtes, y compris 20 petites productrices de semences, ont été initiés aux techniques de production de semences, à la gestion de petites entreprises et à la commercialisation de leurs produits.

Ces groupements de paysans nigériens ont produit en quatre ans «plus de 100 tonnes de semences certifiées, soit environ 65 pour cent de la totalité des semences certifiées produites au Niger», souligne l’article intitulé "L’arachide améliore le quotidien des femmes au Mali et au Niger", et publié dans un dépliant disponible au bureau d’ICRISAT à Bamako.

Bien que les paysans des pays du Sahel produisent beaucoup plus de céréales, qui demeurent la base de leur alimentation, l’arachide constitue une source de revenu importante pour des communautés.

«Nous vendons de l’arachide pour faire face aux besoins d’argent de la famille comme l’éducation des enfants, les dépenses de mariage et les frais de santé», raconte à IPS, Séba Mariko, un membre de la coopérative Bencola de Wakoro.

 

250 francs CFA le kilo d’arachide

Au marché de Wakoro, le prix du kilo d’arachide tourne autour de 250 francs CFA (environ 50 cent US), soit la moitié du prix d’un kilo à Bamako. Mais les paysans qui ont besoin d’argent bradent souvent leur production au moment des récoltes, entre octobre et décembre, en la vendant moins chère.

La coopérative des femmes de Wakoro, qui prête chaque année 10 kilos de semences à chaque membre, veut que les paysans bénéficient de la culture d’arachide. Ainsi, elle exige que chacune des semencières sauvegarde une partie de sa récolte dans le magasin de la coopérative (20 kilos dont elle peut vendre une partie au moment où le prix du kilo augmente).

 

Même si les semencières de Wakoro, dont les semences sont certifiées par le gouvernement malien, ont quelques fois eu de grosses commandes, elles sont en quête d’un plus grand marché d’exportation.

«Une ONG (organisation non gouvernementale) basée en Guinée Conakry avait demandé des semences d’arachide auprès d’ICRISAT, les femmes de Wakoro ont bénéficié de ces commandes en vendant le kilo entre 750 et 1.000 FCFA (entre 1,5 et deux dollars). Elles souhaitent avoir si souvent ce genre de marché», rapporte à IPS, Amadou Traoré, technicien de recherche à ICRISAT.


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