Pays à vocation agricole, le Mali ambitionne de reconquérir et surtout de préserver son titre de premier producteur africain de coton. Cependant, l’utilisation abusive des intrants chimiques et le changement climatique appauvrissent les terres et font chuter à la longue le rendement agricole annuel.
« Les nouvelles innovations proposées aux producteurs visent à améliorer le bilan carbone des systèmes cultures et l’augmentation du revenu des agro-éleveurs », a expliqué le Professeur Mamy Soumaré, coordinateur de la composante Recherche et Développement du projet d’Appui à la transition Agro-écologique en zone cotonnière du Mali (AgrECo). A Bougouni, dans le village de Faragouaran et dans les stations de recherche de Farako et de Finkolo dans le cercle de Sikasso, l’équipe de chercheurs du projet AgrECo a présenté ses innovations agricoles aux paysans, aux services techniques et aux chercheurs d’autres centres de l’Institut d’Economie rurale (IER). C’était au cours des journées inter-paysannes du 27 au 28 octobre dernier.
« Au-delà de l’intérêt porté à l’alimentation du bétail, les plantes fourragères utilisées séquestrent le carbone et fortifient le sol », a indiqué le Professeur Mamy Soumaré. Parmi les plantes, il y a le Mucuna déjà approuvée dans le cadre du Projet d’appui au secteur de l’Energie (PASE II). Aussi appelé pois mascate, le Mucuna est une plante grimpante capable de produire 6 tonnes de fanes séchées par hectare.
Grâce aux performances du Mucuna, le projet AgrECo, financé à hauteur de 18,5 millions d’euros par l’Agence française de Développement (AFD) pour quatre ans, a introduit de nouvelles espèces notamment le Brachiaria et le stylosanthes hamata. « Le Mucuna absorbe l’azote et le diffuse au sol », a détaillé Amadou Traoré, chercheur agronome du projet agrECo. Quant au Brachiaria, il permet, selon l’agronome, d’éviter l’érosion du sol, et de garder l’humidité du sol et séquestrer le carbone.
Dans un champ de maïs, ces herbes sont cultivées pour améliorer le rendement. La technique consiste à semer le maïs en premier ensuite les plantes fourragères (Brachiaria et Mucuna) 15 ou 30 jours après. « L’impact de ces deux plantes est visible à l’œil nu sur le maïs. Elles augmentent la biomasse des tiges du maïs, et changent la qualité du maïs », s’est réjoui le chercheur Amadou Traoré.
L’écimage du coton
Si la culture des herbes permet de fertiliser le sol, ce n’est pourtant pas la seule innovation agricole prônée par les chercheurs de l’IER. L’écimage du cotonnier, une pratique ancienne, est aujourd’hui remise au goût du jour par l’équipe du professeur Soumaré. L’écimage peut être pratiqué sur toutes les variétés de cotonnier cultivées au Mali. Cela améliore le rendement sans que le paysan ait besoin de recourir à la quantité habituelle de pesticides.
La réalisation de l’écimage consiste à supprimer le bourgeon apical de la tige principale du cotonnier. Autrement dit, il s’agit de couper la tête du cotonnier. L’écimage se pratique manuellement au 65eme jour après le semi en pinçant l’extrémité encore très tendre de cette tige principale. Le chercheur Seybou Maïga est spécialiste de cette technique. Selon lui, l’écimage est fait pour éviter aux insectes de s’attaquer aux cotonniers. Il met terme à la croissance du cotonnier en retour accroît les branches fructifères et donne beaucoup de plus coton par rapport à la culture standard pratiquée par de la Compagnie malienne pour le développement du Textile (CMDT).
A Faragouaran, Salif Bagayoko est un paysan qui a expérimenté la technique de l’écimage. Les cotonniers écimés, explique-t-il, ont des capsules plus gros que ceux non écimés. De plus, le traitement du cotonnier, six fois par saison, est réduit de moitié avec la pratique de l’écimage. « Non seulement le volume de la capsule augmente, mais aussi le cotonnier passe d’une moyenne de 8 à 23 capsules », a affirmé l’agronome Seybou Maïga qui se rappelle que l’écimage est pratiqué en Afrique depuis 1926.
Mamadou TOGOLA/Maliweb.net