En attendant les chiffres définitifs de production, des mesures sont envisagées pour faire face à une éventuelle crise alimentaire.
L’issue de la campagne agricole est toujours déterminante dans la santé de l’économie nationale. Il se trouve qu’elle dépend toujours des aléas de la pluviométrie. En mai dernier, la pluviométrie était encore supérieure à la normale confirmant ainsi le pronostic du Comité permanent Inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS). L’organisme sous-régional et d’autres structures compétentes en la matière avaient dû nuancer ensuite leurs prévisions en indiquant que la situation pouvait être compliquée à cause d’un arrêt précoce des pluies. Du coup, la donne changeait. Or, les orientations données par l’encadrement agricole aux producteurs allaient dans le sens d’une abondance pluviométrique. Cette situation a naturellement provoqué des pertes considérables sur les emblavures et les pâturages. De fait, l’incertitude s’est installée sur les récoltes.
Dès lors, les pouvoirs publics ont décidé de jouer la carte de la prudence. C’est ainsi que le Premier ministre, Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé a convoqué en réunion vendredi les ministres directement ou indirectement concernés par le sujet, les responsables des structures en charge des questions agricoles et de la sécurité alimentaire pour analyser les premières tendances de la campagne agricole. De l’analyse du ministère de l’Agriculture présentée par le secrétaire général du département, Moussa Léo Sidibé, il ressort que les pertes totales enregistrées sur le riz s’élèvent à 194 130 ha, soit 24% des 810 084 ha réalisés. Pour les céréales sèches, il est question de 393 096 ha, soit 10 % des surfaces réalisées. A ce niveau, ce sont surtout le sorgho et le mil qui ont fait les frais du déficit de pluie avec respectivement 172 070 ha (soit 45 %) et 158 656 ha (41,5%) de surfaces perdues. Ces pertes sont essentiellement localisées dans la bande sahélienne. Le nombre des communes qui seraient affectées par la sécheresse est estimé à 158 dans 29 cercles. Malgré les 587 226 ha perdues, les producteurs pourront récolter environ 4,3 millions d’ha, soit 88, 20% de la production initialement attendue. Mais les chiffres avancés ne seront confirmés qu’avec la publication des résultats de l’Enquête agricole vers fin décembre. En attendant, le commissaire à la Sécurité alimentaire, Yaya Nouhoum Tamboura, estime que la situation est assez préoccupante. Cette structure vient de sortir d’une réunion de 10 jours qui a permis de passer au peigne fin tous les renseignements recueillis sur tout le territoire.
Le Système d’alerte précoce (Sap) a ainsi estimé que 104 communes auront des difficultés alimentaires et que 55 autres souffriront de manque de ressources financières. Sur le plan pastoral, le ministère de l’Elevage et de la Pêche va plus loin en indiquant que 400 communes sur les 703 sont en crise et que 60 % de la biomasse est perdue. Bien que les trois structures techniques soient toutes d’accord que la campagne agricole est moyenne, il y a nécessité d’harmoniser les données chiffrées. C’est ce qu’a relevé le Premier ministre qui estime la crise est réelle. « Donc, il faut nécessairement que les différents intervenants aient les mêmes conclusions sur l’issue de la campagne agricole pour prendre rapidement les mesures qui s’imposent », a insisté Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé. Le ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités locales, Kafougouna Koné, a suggéré de vendre une grande partie du bétail et de prendre des mesures pour l’approvisionnement du pays en aliments pour bétail afin de reconstituer ensuite le cheptel.
Le ministre de la Communication et Porte-parole du gouvernement, Sidiki N’Fa Konaté a insisté sur la nécessité d’élaborer un chronogramme d’actions assorti d’une stratégie de communication. Car, on est dans la perspective d’une véritable crise alimentaire comme tous les autres pays du Sahel, a précisé le ministre Konaté. « Il faut prendre le taureau par les cornes », a dit de son côté le ministre du Développement social, de la Solidarité et des Personnes âgées, Harouna Cissé. Son collègue des Investissements, de l’Industrie et du Commerce, Mme Sangaré Niamoto Ba a parlé de l’urgence de la situation. Pour le Premier ministre, il n’y a pas de temps à perdre. Le chef du gouvernement a donc demandé au ministre de l’Economie et des Finances, Lassine Bouaré de s’atteler déjà à la recherche des moyens financiers nécessaires en cas de crise alimentaire et aux structures techniques d’harmoniser leurs données, tout en précisant les coûts des opérations à mener. La prochaine réunion sur les résultats de la campagne agricole est prévue pour cette semaine. Elle statuera sur la pertinence des recommandations formulées par les différentes structures concernées par la question.