DorithFombirem, chargé du projet Centre de connaissance en agriculture biologique en Afrique de l’Ouest (Kcoa) a annoncé en fin janvier 2020, à Thiès, que l’Allemagne va investir plus de 10 milliards de Francs CFA pour la promotion de l’agriculture biologique en Afrique. Une vision largement partagée par le coordonnateur de la Fédération nationale pour l’agriculture biologique (Fenab), Ibrahima Seck.
En Afrique, l’agriculture biologique est peu recensée dans les statistiques officielles, alors qu’elle est de plus en plus présente sur les marchés locaux et d’exportation. La demande des consommateurs africains s’accélère, offrant un débouché économique dynamique.
Aujourd’hui, les apports de l’agriculture biologique au processus de transition agroécologique amorcé sur ce continent sont indéniables. Elle diminue les impacts négatifs de l’agriculture sur l’environnement et sur la santé, notamment parce qu’elle n’utilise pas d’intrants chimiques de synthèse. Elle améliore la résilience des systèmes agricoles. Ses techniques spécifiques peuvent, dans certaines conditions, accroître la productivité agricole même si les rendements sont en moyenne inférieurs à ceux de l’agriculture conventionnelle.
Forte utilisatrice de main-d’œuvre, elle peut aussi être une source d’emploi des jeunes dans les zones rurales.
La recherche agricole doit désormais appuyer son émergence, dans un contexte où très peu d’études ont été conduites sur le sujet jusqu’à maintenant. Pour que se développent ces initiatives naissantes, la recherche pourrait aussi contribuer à l’élaboration de politiques publiques adaptées à différentes échelles.
À l’échelle mondiale, une analyse des rendements publiée en 2017 montre que les rendements de l’agriculture biologique sont en moyenne inférieurs à ceux de l’agriculture conventionnelle, de l’ordre de 10 à 32 % pour les fruits et le maraîchage. Mais, dans certains cas, ils peuvent être plus élevés, jusqu’à 50 % de plus, suggérant qu’une agriculture biologique productive est possible. Cette analyse mondiale montre aussi que l’agriculture biologique n’accroît pas la variabilité des rendements : ce constat est très important pour les producteurs, en particulier africains, pour lesquels l’aversion au risque est un élément décisif. Ainsi, malgré une plus faible productivité moyenne, l’agriculture biologique a de nombreux atouts : l’augmentation de la résilience et de la stabilité des systèmes agricoles, due à la diversité des espèces et variétés utilisées, la moindre dépendance à des intrants extérieurs et, surtout, ses bénéfices environnementaux, sanitaires et sociaux avérés. Dans les pays africains, le développement de l’agriculture biologique soulève souvent la question de sécuriser l’alimentation d’une population en croissance rapide. Toutefois, peu de données statistiques sont collectées. Les travaux scientifiques et techniques sur l’agriculture biologique, tout comme les projets de développement, y sont rares et souvent portés par des collectifs pilotés par des institutions spécialisées.
Les superficies en bio en Afrique ont grimpé de 14% à 2,1 millions d’hectares mais ne représentent que 0,2% de la superficie agricole du continent et 3% des superficies mondiales consacrées à la culture biologique. La Tunisie est la championne en termes de superficies (306 000 ha), l’Ouganda pour le nombre d’agriculteurs (210 000) et Sao Tomé et Principe pour la plus grande part de terres cultivées en agriculture biologique (18%). L’Afrique de l’Ouest ne représente que 17% des superficies en bio de l’Afrique.
La principale culture biologique est le café, avec plus de 373 000 hectares, soit 12,4% de la superficie totale consacrée au café sur le continent. Les plus grandes zones de café biologique se trouvent en Éthiopie (plus de 160 000 ha) et en Tanzanie (près de 82 000 ha). Se placent ensuite les oléagineux 236 500 ha), principalement le sésame, le coton (119 000 ha) avec surtout la Tanzanie et dans une moindre mesure le Soudan. Signalons aussi le cacao avec 111 000 hectares, soit 2,3% de la superficie cacaoyère du continent, avec comme principaux pays la RD Congo (51 900 ha), la Sierra Leone (43 300 ha) et l’Ouganda (plus de 19 000 ha), qui ne sont pas les gros producteurs de cacao d’Afrique.
Mahamadou YATTARA