La pression fiscale reste particulièrement faible dans notre pays, privant ainsi l’Etat des ressources lui permettant de faire face à ses obligations.
La salle de conférence du Conseil national du patronat du Mali (CNPM) a abrité, hier un atelier d’échange sur les réformes de l’administration fiscale et la mobilisation des recettes dans notre pays. Cette rencontre organisée par la représentation locale du Fonds monétaire international (FMI) en partenariat avec la Direction générale des Impôts, entre dans le cadre de la mission d’assistance technique en administration publique du Fonds.
L’atelier était animé par Vincent de Paul et Kouk Paizan, deux experts venus de Washington. C’était en présence du directeur général des Impôts, Sidima Dienta et du représentant résident du Fonds monétaire au Mali, Anton Op de Beke.
L’exposé de Vincent de Paul a porté sur les différentes réformes entreprises par l’administration fiscale pour améliorer les recettes. Selon lui, jusqu’en 2005, le Mali était en phase avec les autres pays de la sous-région dans le processus de réformes de leur administration fiscale. Mais à partir de cette date, il est entré dans un cycle de courbe descendant des recettes. Toujours selon lui, l’outil de mesure de la performance, jusque-là utilisé par nos fiscalistes, à savoir l’évaluation chiffrée en termes de milliards mobilisés, n’est pas le bon choix. Selon lui, la croissance se mesure à l’aune du produit intérieur brut (PIB) qui est un indicateur constant. Partant de cette analyse, il apparaît nette que notre système d’imposition comporte d’énormes potentiels non encore explorés.
Il ressort ainsi des études comparées avec les administrations des autres pays de l’UEMOA que le Mali peine encore à atteindre les objectifs du seuil minimum d’imposition fixé par les instances communautaires, à savoir le taux de pression fiscale fixé à 17% (10% d’imposition intérieur et 7% d’imposition de porte). La pression fiscale au Mali tourne autour de 9%. Or avec la transition fiscale, l’on s’achemine vers le moins d’impôts de porte (les droits de douanes) au profit de l’impôt de l’intérieur. Il devient donc un impératif de créer les conditions d’accroissement des impôts collectés à l’interne pour permettre à l’Etat de faire face à ses obligations.
Le diagnostic ainsi posé, Vincent de Paul a élaboré un paquet de bonnes pratiques susceptibles de permettre à notre administration fiscale d’améliorer ses recettes. Les mesures préconisées concernent l’équité dans le traitement des dossiers des contribuables, le renforcement du contrôle interne pour s’assurer de la garantie de bonne gouvernance au sein de l’administration fiscale. Il a aussi insisté sur le nécessaire remboursement des crédits de la TVA, en expliquant que l’efficacité de la TVA réside dans sa neutralité vis-à-vis des contribuables. Le retard dans le remboursement de ce crédit oblige les entreprises à emprunter des voies peu orthodoxes.
Les mesures préconisées concernent divers autres domaines. Leur combinaison devrait permettre d’élargir l’assiette fiscale et d’améliorer le système de collecte des ressources auprès des contribuables. Il s’agit à terme d’aller vers une administration fiscale de service, contrairement à la pratique ancienne, basée sur la répression.
Il faut préciser que le thème développé par Vincent de Paul à l’atelier répond au souci fortement exprimé dans le rapport de fin de mission d’une délégation du Fonds qui s’était rendue dans notre pays en décembre dernier. Il ressort de ce rapport que notre pays a réellement besoin de moderniser ses outils de collecte de recettes pour stimuler rapidement son économie.
Le rapport révèle que les autorités nationale avaient sollicité une aide du FMI dans le cadre d’un accord appuyé par la FEC (Facilité élargie de crédit) pour un montant équivalant à 30 millions de DTS (environ 32 % de la quote-part du Mali) à l’appui de leur programme à moyen terme visant à réduire la vulnérabilité de la balance des paiements et à établir les fondements d’une croissance plus vigoureuse et mieux partagée.
Les réformes envisagées à cet effet portent principalement sur la politique fiscale et l’administration des recettes, la gestion des finances publiques et l’amélioration du climat des affaires.
Le FMI préconise la mise en œuvre d’un cadre budgétaire efficace en 2014. Il s’agit de veiller à ce que l’aide des bailleurs de fonds soit bien affectée aux dépenses prioritaires en vue de favoriser la reprise économique, apurer les arriérés intérieurs existants et réduire au minimum le recours à l’emprunt intérieur. Il faut également faire en sorte que les emprunts extérieurs restent compatibles avec la viabilité de la dette.
Vincent de Paul a insisté sur l’intensification des réformes de la gestion des finances publiques. Cette mesure consiste à créer les conditions pour un accroissement des recettes fiscales de 0,5 % du PIB par an en veillant au respect des obligations fiscales, en élargissant l’assiette de l’impôt et en simplifiant l’administration fiscale.
Une autre mesure consiste à accélérer les réformes visant à améliorer le climat des affaires. Il s’agit de s’attaquer aux problèmes de gouvernance ; consolider la stabilité du secteur financier et promouvoir son développement ; réformer la tarification des prix de l’électricité et des produits pétroliers, afin de protéger le budget de l’État et rétablir la situation financière de la compagnie d’électricité.
A. O. DIALLO