Accords de partenariat économique: Le Mali signera son certificat de décès

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Entre 16 et 28 milliards de F CFA ! C’est la perte annuelle que les Accords dits de partenariat économique (APE) vont causer à l’économie malienne. Ces données chiffrées sont du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, S. E. Moctar Ouane.

A entendre parler le ministre, le gouvernement malien va signer les APE quels que soient leurs impacts. Les indices sautent à l’œil et les propos sont révélateurs : « Si les Accords ne rentrent pas en vigueur le 1er janvier 2008, il y aura un vide juridique. L’Union européenne (UE) sera obligée d’appliquer aux ACP le principe de la clause de la nation la plus favorisée », dixit Moctar Ouane.

Ainsi, l’histoire est-elle en train de donner raison à Louis Michel, le négociateur en chef de l’UE sur les APE. En effet, ce dernier avait déclaré, au cours d’une rencontre à Accra le 23 juin 2007 que « les Africains sont obligés de signer les APE avant la date butoir du 31 décembre 2007 ».

Pour se donner bonne conscience, le ministre Ouane souligne que « l’UE s’est engagée à mettre en place un Fonds régional destiné aux APE pour financer les coûts d’ajustement et autres mesures d’accompagnement ».

Les déclarations du ministre des Affaires étrangères sont d’une extrême gravité pour un pays qui se dit souverain. Ce que le ministre ne dit pas, c’est que le montant d’environ 22 milliards d’euros que l’UE a convenu dans le cadre du 10e Fonds européen de développement (FED, le seul fonds destiné à l’ajustement des APE), est bien loin des montants sollicités par les ACP.

Dans la région d’ESA (Afrique australe et orientale) par exemple, ces ressources constituent seulement la moitié de ce dont on a besoin. Pour manifester son désaccord, l’Association professionnelle des organisations paysannes (AOPP) est sortie de son silence et a organisé un point de presse mercredi dernier.

L’élimination des droits de douane sur tous les produits venant d’UE sera un déclin significatif des recettes fiscales des pays africains. Ce qui, à la longue, signifiera moins d’argent pour l’éducation, la santé, les services sociaux de base.

Ce qui va inexorablement entraîner la croissance du taux de chômage, l’insécurité économique et l’instabilité politique. L’ouverture du marché ne suffit pas pour que le commerce joue son rôle dans le développement économique d’un pays.

Augmentation de la pauvreté

Pour que les APE soient efficaces et stimulent le développement des pays africains et des marchés régionaux, les pays africains doivent établir leur compétitivité et la renforcer. Ils ont besoin de ressources pour augmenter leur capacité de production, pour faire face aux contraintes de l’offre et des infrastructures…

Pour l’Afrique, les conséquences de la libéralisation signifient privatisation des services publics essentiels (transport, eau, électricité, communications) et réduction de l’aide dont ont besoin les fermiers, les producteurs et autres opérateurs économiques vulnérables.

Les APE demandent aux pays ACP de supprimer jusqu’à 90 % de leurs tarifs afin d’accéder au marché européen. Les régions de libre-échange représentent un grand risque pour les pays ACP qui ont peu de chances d’avoir un meilleur accès à l’espace économique européen, eu égard à une série de règles de l’UE (sanitaires, géographiques, etc.)

D’autre part, l’agriculture de laquelle dépendent 80 % de la population rurale africaine, va être mise sous pression par la concurrence des importations européennes, bon marché parce que subventionnées. Tel que demandé, les industries naissantes sur le continent seront en danger car elles ne seront pas en mesure de concurrencer les unités industrielles européennes. Pis, il faudra même s’attendre à la faillite de celles qui existent déjà avec son lot de chômage et de malaise social.

La réduction de la pauvreté et le développement sont les principaux points de l’Accord de Cotonou. Mais, une libéralisation commerciale rapide n’est pas la meilleure façon de développer des pays d’Afrique déjà éprouvés par les programmes d’ajustement structurels de Bretton Woods qui n’ont jamais donné les fruits escomptés.

Amadou Sidibé

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