Contrairement aux autres régions du Mali, les mutuelles de santé de la région de Sikasso sont presque à l’arrêt, par la faute de l’Etat qui peine à verser sa part de cotisation en termes de cofinancement aux cotisations des mutualistes.
La première zone mutualiste du pays, la région de Sikasso, compte une trentaine de mutuelles de santé, signataires de cette convention avec l’Etat. Elles sont presque à l’agonie. Les centres de santé partenaires sont sur le point d’arrêter la prise en charge des bénéficiaires car les mutuelles ont du mal à honorer leurs engagements en termes de paiement des soins délivrés à leurs membres.
La faute au ministère de la Solidarité et de Lutte contre la Pauvreté (ancien département de tutelle des mutuelles de santé), qui peine à verser la part de cotisation de l’Etat en termes de cofinancement aux cotisations des mutualistes. Il s’était pourtant engagé dans une convention à mettre à la disposition des mutuelles une subvention équivalant la moitié des cotisations des bénéficiaires pour servir la prise en charge des prestations.
En clair, les adhérents aux mutuelles paient 50% et les autres 50% sont versés par l’Etat aux mutuelles. Ce sont ces cotisations qui permettent de payer des prestations au niveau des centres de santé, depuis les CSCOM en passant par les CSREF jusqu’aux hôpitaux régionaux et nationaux.
Il se trouve aujourd’hui que les adhérents aux mutuelles à Sikasso ont payé toutes leurs cotisations annuelles. Ce sont ces cotisations qui ont permis jusqu’à maintenant de payer les prestations au niveau des structures sanitaires, d’octobre 2017 à nos jours.
Arrêt de la prise en charge des adhérents
Les mutuelles manquent, aujourd’hui, de liquidités et sont au bord de l’asphyxie financière. Cette situation est due au fait que l’Etat n’a jusqu’ici versé sa contribution pour le 4e trimestre 2017 et du 2e semestre 2018, contrairement aux autres régions du Mali, qui ont déjà bénéficié de leur subvention des périodes citées. Et bientôt, la fin du 1er semestre de cette année, les mutuelles sont toujours en attente.
Si ces tranches ne sont pas versées dans les meilleurs délais, les mutuelles de santé seront dans l’incapacité de payer les frais de prestations de santé de leurs adhérents. «C’est un système de vases communicants. On ne peut pas continuer éternellement à faire la prise en charge sans remboursement», rapporte une source, qui ajoute qu’il arrivera «un moment où les ressources financières des structures sanitaires vont se tarir».
Contacté, Aliou Ouattara, chef de division de la mutualité à la Direction nationale de la Protection sociale et de l’Economie solidaire, affirme avoir transmis le dossier global de toutes les régions à la Direction des finances et du matériel du département, qui l’introduit dans le circuit. C’est pourquoi, il ne comprend pas pourquoi la subvention de la région de Sikasso n’a pas été payée. «Ce n’est pas à notre niveau et nous ne pouvons rien faire pour elles», a-t-il conclu.
Cette rupture constituera un véritable recul pour notre pays. «Le gros danger ce qu’il va foutre en l’air tout ce que nous sommes en train de faire», souligne une source proche du dossier qui estime que le Mali est en train d’aller vers le Ramu (Régime Assurance Maladie Universelle), où l’équité et la justice sociale dans la fourniture des services de santé à moindre coût aux populations sont au cœur des priorités du Programme d’action gouvernementale pour un meilleur développement du capital humain.
Cette grande réforme de la couverture maladie doit financer 80% des cotisations du monde agricole et informel (représentant 80% de la population malienne) par l’Etat, à travers les mutuelles de santé.
Très furieux, il ajoute : « comment va-t-on faire pour rembourser 80% quand on n’arrive même pas à payer 50% pour environ 5% de personnes couvertes par les mutuelles ?» s’interroge-t-il.
Il nous est cependant revenu que c’est le ministère de la Solidarité et de Lutte contre la Pauvreté qui a pris du retard dans le traitement des dossiers. «C’est un tas de problème pour que le ministre Hamadoun Konaté signe un dossier», déplore un cadre du département.
Abdrahamane Sissoko
Source: Le Wagadu