Mopti : Des jeunes font monter la tension

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Dans leur ligne de mire, le conseil communal, dont ils dénoncent la gestion de certains dossiers.

Le torchon brûle entre les autorités de la commune urbaine de Mopti et des jeunes de la ville. La tension a atteint son paroxysme la semaine dernière quand des jeunes ont organisé une manifestation qui a dégénéré en affrontement avec les forces de l’ordre. Les jets de pierre et de gaz lacrymogène ont fait des blessés dont deux policiers. L’un d’eux a eu une fracture au bras et l’autre s’est retrouvé avec la clavicule cassée. Les vitres du véhicule de la police ont été brisées et des panneaux de signalisation arrachés. Le monument dit du rond point et l’abri des policiers ont été également endommagés par des manifestants dont certains sont allés jusqu’à déposer leurs « trophées » chez le premier adjoint au maire de la ville. C’est aux environs de 9 heures que des milliers de jeunes ont investi l’artère principale de la ville qui va du centre commercial à Médina-Coura. Sur la voie, ils ont rapidement érigé des barricades avec des tas d’ordure et des briques. Sur les bas-côtés de la route des pneus ont été enflammés. Une épaisse fumée noire enveloppait la ville et dans les environs du théâtre des opérations, il était difficile de respirer. C’est dans cette atmosphère délétère que les forces de l’ordre sont intervenues pour disperser les manifestants et rétablir l’ordre. Deux groupes sont les initiateurs de la manifestation : le Groupe de réflexion des jeunes et le Collectif des jeunes de Mopti. Ces associations ont expliqué que trois sujets les opposent au conseil municipal.

Le premier concerne l’ancien site du parc de petits ruminants situé sur le côté Est de l’agence locale de la BCEAO. Une partie de ce terrain avait été cédée à une dame, une certaine Mme Soukoulé, qui avait présenté un projet de construction d’un parc de loisirs pour les enfants. Le projet prévoyait un investissement de plus de 800 millions de Fcfa. Le conseil s’est appuyé sur le caractère d’intérêt public de ce projet pour faire déguerpir les vendeurs de petits ruminants. Non seulement, expliquent les jeunes, une partie du site aurait été vendue à des particuliers mais par la suite, la dame aurait été expropriée sans autre forme de procès au profit de Garba Samassékou, le 1er adjoint au maire qui se trouve être … le chargé des questions domaniales. Le second sujet de discorde concerne un autre site situé au niveau du rond-point dans le centre commercial qui, selon les jeunes, aurait également été vendu. Enfin, les manifestants reprochent à la mairie de négliger la salubrité de la ville qui serait, selon eux, dans un état de saleté sans précédent. De leur point de vue, Mopti est aujourd’hui la ville la plus sale du pays, une situation déshonorante pour la ville choisie pour abriter la Biennale artistique et culturelle de l’année prochaine. Les jeunes s’étaient déjà fait entendre le 18 août dernier lors d’une marche pacifique à l’issue de laquelle ils avaient remis une lettre de protestation au gouverneur de la région, Seydou Toumani Camara. Dans le document, ils fustigeaient les pratiques de l’équipe municipale en place accusée de n’avoir qu’un seul souci dans la gestion des affaires de la commune : la vente des terres. Dans le document, les jeunes demandaient la dissolution du conseil communal et la mise en place d’une délégation spéciale. Le gouverneur avait promis que les doléances des jeunes feraient l’objet d’une analyse approfondie et seraient transmises à qui de droit. Il avait cependant averti que la dissolution d’un conseil municipal et la mise en place d’une délégation spéciale ne relevaient pas des compétences du gouverneur. Il avait aussi demandé aux jeunes d’inscrire toutes leurs actions dans la légalité. Après le premier mouvement, les élus et les autorités administratives ont tenté d’apaiser le climat. Ainsi le conseil communal a tenu une session extraordinaire élargie aux leaders des associations de jeunesse avec à l’ordre du jour, la question des deux sites objets de la polémique.

Le maire, Oumar Bathily, avait à cette occasion assuré qu’aucun de ces sites n’est en fait vendu et que c’est au regard de l’importance du projet de Mme Soukoulé pour la ville, que le conseil lui a cédé une partie du premier terrain, mais qu’étant dans l’incapacité de remblayer le terrain, la dame avait cédé le lot à Garba Samassékou. Quant au site du rond-point, le maire avec le cahier de charge en main, avait démenti toute vente du lieu. A la lumière des échanges, le conseil avait décidé de l’arrêt des travaux sur les sites et une commission ad hoc de 7 membres présidée par le doyen des conseillers, Ibrahim Tembély, avait été créée pour faire la lumière sur l’ensemble des situations. Des réunions d’information et de sensibilisation ont été organisées par la commission à l’intention de la population. Résultat : certains jeunes ont mis beaucoup d’eau dans leur vin. Mais une aile dure a continué à s’agiter. Ainsi dans la nuit de mercredi à jeudi et toute la matinée de jeudi, Mopti a été de nouveau le théâtre d’affrontements violents entre les forces de l’ordre et des manifestants qui réclamaient la libération sans condition des personnes arrêtées lors de la manifestation de mardi. Une affaire à suivre assurément.

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