Mettre out le Gouverneur de région et le préfet du cercle de Koulikoro, imposer des investissements colossaux pour le désenclavement et rendre possible l’activité économique sont des exigences que les jeunes révoltés de Koulikoro ne veulent négocier avec personne. Ce n’est pas tout, ils réclament un stade de niveau international et une maison des jeunes comme les jeunes de Bougouni, Koutiala et San qui ont bénéficié d’infrastructures sportives. Koulikoro doit ressembler à toutes les autres localités qui retiennent l’attention des hautes autorités. Les jeunes de Koulikoro sont sortis massivement pour manifester dans les rues, le lundi 28 mars et le jeudi 31 mars 2011, scandant leur lassitude des autorités administratives régionales. Il leur faut un interlocuteur valable.
C’est pour apaiser la tension qui est restée vive à Koulikoro depuis la mort d’un élève de 9ème année fondamentale, le 7 mars 2011, que le ministre de l’Administration territoriale et de la Collectivités locales, Kafougouna Koné, a pris son bâton de pèlerin pour prendre langue avec les populations mécontentes. De sources proches du département, il s’agissait plus d’une écoute que d’une prise de décision compte tenu de la situation actuelle d’absence de gouvernement. Cet exercice aurait comme avantage d’apporter un peu d’accalmie en entendant les vraies solutions. Les jeunes ont réussi à mettre sur la sellette le Gouverneur Soungalo Bouaré et le Préfet Mme Maïga Kadia Founè Maïga.
C’est la conséquence d’une série de marches de protestation, depuis la mort de Harouna Coulibaly, tiré au gaz lacrymogène par un policier, au cours d’un service de maintien d’ordre à Koulikoro. Harouna n’a pas survécu au coup de gaz à la nuque. Ce jour là, les élèves avaient manifesté pour revendiquer la prise en compte de la réalisation d’infrastructures routières pour leur permettre d’accéder tranquillement à leur école. Depuis, la ville de Koulikoro est en ébullition d’abord à cause de l’obstruction de la route du Lycée par une construction anarchique, mais surtout, après cet incident dangereux pour la paix et la quiétude, que le Gouverneur aurait soutenu que c’est au cours d’une bousculade que le jeune a trouvé la mort. Puis des revendications sociales ont embrasé la ville. Le ministre Kafougouna Koné leur a prêté une oreille attentive le 4 avril à Koulikoro.
Les Koulikorois veulent le changement pour une meilleure gouvernance de leur région. Ils sont conscients du retard accusé dans le développement « par rapport aux autres villes du Mali. Koulikoro est délaissé, Koulikoro est marginalisé », indiquent-ils. La majorité des jeunes de Koulikoro n’ont pas d’emploi et continuent de vivre des pensions de leurs parents. La responsabilité de cette situation est imputable à la privatisation de l’Huilerie cotonnière du Mali (Huicoma) qui a eu comme conséquences la dislocation des foyers, l’état défectueux des routes, l’insuffisance des voies de communication, le manque de communication entre les gouvernants et les gouvernés, l’insécurité grandissante due à l’insuffisance d’éclairage public, la dégradation progressive de l’environnement : bref Koulikoro, capitale de la deuxième Région du Mali manque d’avoir l’image d’une ville moderne, selon les habitants mécontents. « Notre mémorandum est le reflet de plus de cinquante ans de mise à l’écart, de privation des droits fondamentaux », ont-ils dit au ministre Kafougouna Koné. Le porte-parole des jeunes n’a pas manqué de rappeler au ministre une déclaration de la jeunesse africaine lors du sommet Afrique-France (qui a été brillamment organisé par notre pays) à Bamako, en décembre 2005 : « Si le politique ne s’occupe pas de la jeunesse, le vent du changement soufflera et amènera la jeunesse à s’occuper du politique ». Tel est le sens que nous donnons à notre combat, a-t-il souligné.
Que de promesses non tenues
Les jeunes ont dénoncé les fausses promesses de nos hautes autorités sur la construction d’un pont sur le fleuve Niger aux environs de Kayo. Cette promesse de 2002 sera renouvelée en 2007 et l’ouvrage devait être terminé au plus tard en septembre 2010 pour coïncider avec le cinquantenaire. Les populations de Koulikoro se souviennent encore de l’engagement du gouvernement à construire ce pont et du propos tenu par le ministre de l’équipement et des transports, en ces termes : « L’une des solutions pour désengorger la ville de Bamako est de désenclaver les localités de la périphérie de la capitale… C’est un ouvrage qui va jouer un grand rôle dans le développement social et économique de notre pays en général et de la région de Koulikoro en particulier pour qui sait les potentialités économiques de cette région ».
Avec les actions de soutien à la croissance économique suite à la vente de 51% des actions de la SOTELMA, dans le volet « Routes et ponts » il est prévu le bitumage de 5 km de voirie à Koulikoro pour un coup total de 1 000 000 000 F CFA. Le chronogramme prévoit 2009-2010.
D’autres promesses : la construction de bateaux, la voie de contournement devant relier Kayo à la route de Banamba, un moyen sûr d’assurer la sécurité routière à l’intérieur de Koulikoro. « Nous exigeons le rétablissement de la fourniture de l’éclairage public et son extension aux artères principales de la ville ainsi que l’extension de l’électricité aux quartiers Plateau III et à Koulikoroba Sokourani », souligne le porte-parole.
Aujourd’hui, c’est le chômage des jeunes qui devient un mal endémique à Koulikoro avec la fermeture de Huicoma. Même certains salariés ne sont pas à l’abri : « la commune de Koulikoro connait 22 mois d’arriérés de salaires et le conseil de cercle 7 mois ». Ces travailleurs ont observé une grève du lundi 4 à ce mercredi 6 avril.
Des préoccupations d’ordre environnemental ont été évoquées, « des investissements qui dépassent de loin les capacités financières de la Commune de Koulikoro ». La balle est dans le camp du gouvernement de Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé.
B. Daou