Mamoudou Bah dit Makambo, président par intérim du conseil de cercle de Kayes, depuis sa prise de fonction, a fait bouger beaucoup de choses. Ce conseiller expérimenté a obtenu la confiance de ses pairs et même de la population pour assurer l’intérim après l’incarcération de Dr. Modibo Timbo, président dudit conseil. Son secret : être à l’écoute de ses mandants.
Le natif de Koniakary a opté surtout pour une gestion collégiale afin d’apporter plus de réponses aux attentes des populations. Il est vu comme l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. Cette structure est toute sa vie car il y siège depuis sa création en 1999. Dans un entretien, il a fait l’historique du conseil de cercle de Kayes, avant d’évoquer les difficultés que connaît sa région. Lisez plutôt !
C’est quoi le conseil de cercle ?
Selon M. Makambo, le conseil de cercle est une émanation des communes. Il y a 28 communes dans le cercle de Kayes. Et chacune d’elle, après la mise en place du bureau communal, envoie des délégués pour être représentée au niveau du cercle. Ces délégués sont envoyés selon la taille des circonscriptions électorales. Ce qui fait que la commune de Kayes est représentée par 4 conseillers, la commune de Sadiola par 3 et les autres communes sont représentées par 2 conseillers. Pour un total de 59 élus qui composent le conseil de cercle de Kayes.
Maintenant, ajoute-t-il, ces délégués sont appelés à désigner un président et 2 vice-présidents. D’après lui, le conseil de cercle a pour mission de réfléchir sur les stratégies de mise en œuvre du développement des communes qui le composent.
Les réalisations faites par le conseil de cercle de Kayes
« Sous la 1ère mandature dirigée par feu Oury Demba Diallo, c’était le début de la décentralisation, nous n’avions même pas de siège. La première réunion s’est tenue au gouvernorat de la région de Kayes, sous Sada Samaké. Après, on a cherché un local pendant 3 ans. C’est l’Udpm de feu général Moussa Traoré qui a cherché ce site où nous sommes présentement. À l’époque, la construction n’était pas finie et c’était dans un état délabré, à la merci des fous et des voleurs.
Après la chute du régime Moussa Traoré, le président Diallo a démarché le président de la République Alpha Oumar Konaré qui a permis la réalisation du site », se rappelle le président Bah, qui regrette le fait que ce dernier n’ait pu l’inaugurer.
Les raisons : ils ont mis fin à sa mandature pour mettre en place un bureau intérimaire, car les mandats des communes au niveau de la région avaient pris fin tandis que ceux au niveau des communes étaient en cours. Donc, l’administration étant une continuité, il fallait mettre en place un bureau intérimaire pour remplacer Oury Demba Diallo et ses vice-présidents qui étaient des natifs de Kayes. Ce qui fut fait.
À l’époque, dira-t-il, ils ont choisi Moussa Bakou Sissoko, Nakalou Sima et Salou Gandega qui ont assuré l’intérim pendant 6 mois. Et c’est pendant l’intérim que Moussa Bakou a fait la réception totale des locaux et après ils ont tenu leur première session le 2 mars 2003.
À en croire Mamoudou Bah, durant la mandature de Moussa Bakou Sissoko, le conseil de cercle a réalisé 8 seconds cycles dans les différentes communes du cercle de Kayes. Et c’est durant la deuxième mandature dirigée par Moussa Télébou Diarra de 2004 à 2009, qu’ils ont pu faire l’ensemble des seconds cycles des communes du cercle de Kayes. D’après lui, il n’y a pas une commune où le conseil de cercle n’a pas construit un second cycle.
« De 2009 à nos jours, il n’y a pas eu d’élection. C’est Timbo qui est là et moi j’assure l’intérim car le président a été mis sous mandat de dépôt et déféré à la maison centrale de Kayes pour détournement de deniers publics et atteintes aux biens publics. J’étais son 1er vice-président et la continuité du service a fait que j’assure l’intérim. J’ai été mis à cette place le 8 septembre 2021. De cette date à nos jours, j’ai pu faire beaucoup de choses », a-t-il expliqué.
Selon les détails fournis par Makambo, c’est sous son magistère que le conseil de cercle a pu construire un second lycée public à Kayes N’di, alors que ça a été délibéré depuis 2019.
« On avait fait beaucoup de délibérations, mais on ne les exécutait pas. C’est ainsi que lors de la première session que j’ai dirigée, j’ai eu l’adhésion de tous mes conseillers. Je leur ai fait savoir que certes je suis le président, mais il faut que chacun s’y mette pour mener à bien la mission du conseil de cercle.
Ils m’ont écouté et m’ont suivi. Toutes les propositions ont été votées à l’unanimité. Donc, la construction du second lycée public à Kayes N’di a été approuvée. Même si la réception officielle a été retardée, puisque dans le programme gouvernemental, l’acte a été salué et ils veulent le compléter pour un lycée digne de ce nom. Donc, on attend cela pour son inauguration officielle », s’est-il réjoui.
D’autres acquis du conseil de cercle évoqués par le président Makambo sont, entre autres, la rénovation totale du conseil de cercle jusqu’à la devanture, un forage bien équipé à l’intérieur des locaux. Sans oublier la réalisation de trois sites maraîchers avec forages équipés successivement dans la commune urbaine de Koniakary, dans la commune de Keniètambo et celle du Sahel. D’après Mamoudou Bah, ils sont opérationnels.
Et la réalisation d’un autre site en cours à Silifely, qui sera réceptionné début 2023. Pour 2023, l’ambition c’est de réaliser le même projet pour 3 autres communes. Sans oublier la construction d’un second lycée hors de Kayes, dans la localité de Diamou. Le marché a déjà été attribué à un prestataire et les travaux vont démarrer très bientôt.
Par ailleurs, il a indiqué que le conseil de cercle participe quotidiennement à toutes les actions de développement proposées par le conseil local de la jeunesse, la société civile, toutes les couches confondues.
« Depuis 1999 à nos jours, aucun conseiller n’a suivi une formation. Pour bien mener ses tâches, il faut être bien formé. C’est pourquoi j’ai jugé nécessaire de former l’ensemble de mes conseillers, des régisseurs et des secrétaires généraux des 28 communes du cercle de Kayes. En l’espace d’une année, j’estime que mon bilan est positif », s’est-il encore félicité.
La particularité de Makambo
Aux dires du président Makambo, sa particularité c’est d’être à l’écoute de sa population ; partager sa gestion des affaires avec les conseillers. Et cette vision a convaincu ses concitoyens.
Parlant des difficultés auxquelles ils sont confrontés, il dira qu’elles résident au niveau de l’insuffisance des ressources financières, de la non-effectivité des transferts de compétences. « Les ressources sont maigres. Les mines d’or de Sadiola constituent les 90% du fonctionnement de cette collectivité. L’Etat fait de son mieux, mais c’est peu. Donc, avec les maigres ressources qu’on a, nous sommes en train de les utiliser comme il le faut », a-t-il souligné.
Concernant les perspectives, il estime qu’elles sont énormes, surtout dans le domaine sanitaire. Son objectif majeur et celui des autres conseillers, c’est de voir naître un second CSRéf dans le cercle de Kayes. « Songer à la construction d’un nouveau centre de santé de référence, c’est mon souci majeur. Nous allons le faire à Boutindise, dans la commune de Koursiany. On l’a délibéré. Imaginez qu’il y a des communes qui sont à 200, 500 km de Kayes », a-t-il indiqué.
Les difficultés
Au sujet de la situation des routes, il reconnaît comme ses pairs qu’elle est déplorable. D’après lui, Koniakary-Kayes fait 70 km, une distance qu’ils faisaient en 45 mn avant. Maintenant, ils la font en 2 voire 3 h. « La route Kayes-Yélimané est pire » s’indigne-t-il.
« Une délégation du conseil régional de la jeunesse composée de 15 membres a rencontré le ministre de la Réconciliation et la ministre des Transports et des Infrastructures. D’après ce qu’elle a dit, l’étude seulement de la route Kayes-Yélimané fait 1 milliard 500 millions. Malheureusement, le financement n’est pas acquis.
Mais le financement du trajet Kayes-Sandaré est acquis et les travaux vont bientôt démarrer avec l’entreprise Covec. Sur le trafic ferroviaire, elle a dit que les cheminots ont confisqué le wagon en disant que c’est pour eux, que ce n’est pas pour l’Etat. Elle a souligné que si tout va très bien, dans le programme, le train démarrera en janvier 2023 », a-t-il rappelé. Avant de rappeler la situation sécuritaire qui se dégrade dans la région. Pour lui, les attaques dans le cercle de Kayes sont perpétrées par des bandits, et non par des djihadistes.
Kayes, zone touristique par excellence
« Kayes regorge de beaucoup de sites touristiques. Je crois que seulement le ministère du Tourisme n’a pas beaucoup pensé à Kayes, contrairement à Ségou et à Mopti, d’après ce que j’ai vu. Le tourisme marchait très bien dans la région de Kayes lorsque N’Diaye Bah était ministre du Tourisme », a déploré Makambo, un grand passionné de la culture.
Après le Fort de Médine, c’est le Tata de Elhadj Oumar Tall de Koniakary qui a le plus impressionné le président. À ses dires, il a été construit en 1855 par 40 maçons dont 39 Sénégalais, avec à leur tête le natif de Koniakary, Thierno Djibril Bane. Ils l’ont fait en 45 jours.
« C’était un fort de résistance pour Elhadj Oumar Tall. Il fut bâti avant le fort de Médine. La capitale du Khasso, c’est Koniakary. Le premier étudiant africain à Paris, c’est Samballa Diallo, il est natif de Koniakary. Le site existe, c’est une forteresse, la population s’est investie pour ne pas le laisser dans un état de délabrement. Chaque année il y a plus de 3000 pèlerins qui quittent un peu partout pour venir passer 3 nuits de prières à Koniakary, le 3 mars de chaque année. Ce jour, tout Kayes se rend là-bas.
Aujourd’hui, il nous apporte beaucoup de choses. Ça sert de logement pour les délégations ministérielles et autres. C’est tout le confort qui existe à travers l’appui des ressortissants. Il y a également le site de Fataladji, à 9 km de Koniakary, dans la commune de Sebala. La première usine de beurre au Mali, c’était là-bas. Il y a beaucoup de sites non découverts dans la région de Kayes. C’est à travers ATT que les gens ont découvert le Tata de Sabouciré », regrette-t-il.
Aux populations kayesiennes, il demande de s’orienter dans le bon sens du développement s’ils estiment qu’ils sont sur le mauvais chemin. Car, d’après lui, ils sont là pour eux, et non contre eux. Aux autorités de la transition, il les invite à être de cœur avec eux. Avant d’insister : « Nous leur demandons d’être à l’écoute des populations, d’entendre leur cri du cœur ».
Moussa Sékou Diaby/UJRM
NB : Le titre est de la Rédaction.