Depuis le weekend passé, les affrontements intercommunautaires ont repris dans le cercle de Koro (région de Mopti). Des attaques et représailles qui se succèdent entre Peulhs et Dogons, auraient occasionné la mort d’une dizaine de personnes et causé une quantité de dégâts matériels. Il y aurait eu des scènes de pillage. Pourtant le mois de juin dernier, des affrontements similaires avaient déjà opposé les deux communautés dans le même cercle. Ainsi dans le village de Douna, les combats d’une rare violence, avaient hélas fait 33 morts et une dizaine de blessés.
Peulhs et Bambara s’étaient également affrontés violemment dans le cercle de Ké-Macina (région de Ségou), courant 2017. Des dizaines de populations civiles avaient perdu la vie ou étaient enlevées. Des villages entiers avaient été vidés de leurs habitants qui s’étaient réfugiés pour se mettre à l’abri. Au nord, de façon récurrente, les tribus touarègues s’affrontent entre elles ou sont opposées à des populations arabes.
Si les raisons de tous ses affrontements sont presque naturellement les mêmes, des raisons territoriales, il faut surtout craindre actuellement le fait qu’elles aient évolué jusqu’à amener les communautés à se rejeter mutuellement. Désormais chaque communauté cherche, à défaut de récupérer plus de terres, à préserver des portions de terre qu’elle considère comme son patrimoine héréditaire. Et désormais tous les moyens sont bons, y compris la voie armée, pour faire face à l’autre.
Ce qui compromet dangereusement le vivre-ensemble multiséculaire que les différentes communautés ethniques ont toujours eu au Mali. Auparavant, les régions de Mopti et Ségou, où sont concentrés actuellement les accrochages entre communautés, étaient considérées comme le melting-pot biologique et culturel du Mali. Elles vivaient en symbiose, mais vont-elles désormais basculer dans la guerre civile interethnique dans ces régions et par effet de domino, entraîner l’ensemble du pays ?
Si rien n’est fait par l’Etat malien pour arrêter les troubles actuels entre Peuhls et Dogons, Peulhs et Bambaras dans les régions de Ségou et Mopti, ou encore entre Touaregs et Arabes dans la région de Tombouctou, la situation risque de s’embraser et de se généraliser. Ainsi du doute de la survenue d’une guerre civile interethnique, nous irons tout droit à la certitude. Or ce qui se passe actuellement dans ces régions, n’est que la conséquence naturelle de l’absence prolongée de l’Etat. Par conséquent, si les autorités ont vraiment conscience de la menace imminente des fractures irréversibles entre communautés, il faut vite qu’elles fassent renaître le dialogue entre les communautés.
C’est quasiment le seul gage de confiance. Quand bien même, cela ne suffirait pas si l’Etat ne reprend pas immédiatement ses services régaliens de base, notamment en redéployant illico presto les forces de défense et de sécurité en nombre suffisant sur l’ensemble du territoire national. Par une simple volonté politique, cela est bien possible !
Gaoussou Madani Traoré