C’est l’une des conséquences de l’insécurité qui règne dans la Région de Kidal : les agents de santé se sentent trop en danger pour exercer leur métier.
Ceux qui officiaient dans les cercles d’Abeïbara et Tin-Essako ont ainsi décidé de se replier avec leur bagages depuis le week-end passé sur la ville de Kidal, le chef-lieu de région. Ces temps-ci, le personnel socio-sanitaire est sous forte pression. D’une part, il est régulièrement menacé par des bandes armées et d’autre part, il est victime d’intimidations d’hommes considérés comme des « islamistes ». Ces derniers tentent carrément de les empêcher de faire leur travail. Les derniers agents rentrés de Tin-Essako ont fait le point de la situation au cours d’une cérémonie de restitution des journées de vaccination contre la poliomyélite et la méningite. Non contents de faire campagne contre cette opération, un groupe « d’islamistes » a sermonné les agents de santé pendant les heures de prêche. Le personnel chargé de la vaccination a été retenu pendant ce temps avec les doses de vaccins, après des heures de route sous un soleil de plomb, alors que ces vaccins sont très périssables. Il est utile de préciser que les missions sanitaires effectuées à l’intérieur de la Région de Kidal se font désormais avec des véhicules de location, les automobiles des services de santé même avec des insignes affichés en évidence, n’étaient pas épargnés par les bandits. En 2009, une ambulance transportant des vaccins avait même été enlevés.
Les « islamistes » mènent une véritable campagne de désinformation sur le bien-fondé de la vaccination. Plusieurs chefs de famille ont ainsi reçu des messages SMS sur leur téléphone portable, les dissuadant de faire immuniser leurs enfants. Comme si tout cela ne suffisait pas, dans le cercle d’Abeïbara un groupe d’hommes armés a lancé un ultimatum aux agents de santé, enseignants et ouvriers des chantiers du Programme spécial pour la paix, la sécurité et le développement dans le Nord du Mali (PSPPSDN), bref à tous ceux qui travaillent au compte de l’Etat, pour qu’ils partent. La plupart des agents de l’Etat se sont donc repliés sur la ville de Kidal où ils se sentent plus en sécurité. A Boureïssa, chef-lieu de la commune du même nom (dans le cercle d’Abeïbara), les agents vaccinateurs ont même été violemment pris à partie par…un élu local. « Je ne veux pas être responsable des effets secondaires des vaccins après votre passage chez moi », a-t-il lancé, en tenant des propos jugés « démoralisants » par les agents de santé. La mobilisation en faveur de la campagne de vaccination est compliquée à cause de l’absence de radios de proximité pour porter le bon message. Pour le conseiller aux affaires administratives et juridiques du gouvernorat de la Région de Kidal « c’est plus que jamais le moment de garder le moral ». L’Etat est en train de prendre des dispositions pour faire face à la situation, a-t-il assuré aux fonctionnaires.