Les élections présidentielles de 2007 au Mali dont le 1er tour est prévu pour le 29 avril se préparent activement. En attendant l’ouverture officielle des campagnes, les potentiels candidats se livrent à des opérations de séduction. C’est dans ce sens que le président du Rassemblement Pour le Mali (RPM), M. Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) dont la candidature n’est qu’un secret de polichinelle a fait un tour la semaine dernière dans la capitale française, histoire de prendre langue avec ses conseillers occultes de l’Hexagone.
Durant son séjour parisien, IBK accorda une interview aux confrères de Radio France Internationale (RFI), diffusée le vendredi dernier que nous avons captée et décryptée pour vous. Dans l’entretien qui suit, IBK parle de sa candidature aux élections présidentielles d’avril 2007, du bilan du président ATT, du livre ATT-cratie : La promotion d’un homme et de son clan, de l’Accord d’Alger signé en juillet 2006 entre le Mali et les rebelles de Kidal avec la médiation de l’Algérie. Lisez plutôt.
Question : Quand allez-vous annoncer votre candidature, M. Ibrahim Boubacar Kéïta ?
IBK : J’aurai aimé plutôt quand le parti choisira-t-il son candidat? Et je pense que nous le ferons courant janvier, donc vous n’avez que quelques semaines à attendre.
Question : Et si votre parti vous demande d’y aller, est-ce que vous irez ?
IBK : Mais sans problème.
Question : M. Ibrahim Boubacar Kéïta, est-ce que vous ne pensez pas que le bilan d’ATT est positif ?
IBK : Mais écoutez, nous avons librement choisi en 2002 de contribuer puissamment à porter au pouvoir le Général Amadou Toumani Touré ; et pour nous ce n’est pas la poursuite du programme qu’on a trouvé dans le pipe line tels que les grands chantiers routiers et autres et d’autres programmes de logements sociaux, notamment nous aurions apprécié que tout cela a pu être réalisé sans aucun esprit patrimonialiste. C’est cela l’une de nos premières grandes critiques ; mais le moment viendra où nous aurons beaucoup de choses à dire sans aucune altermonie. Nous avons avec tous ces états les meilleures relations ; cela n’empêche une compétition démocratique que nous souhaitons à hauteur de souhait.
Question : Est-ce que vous regrettez d’avoir appelé à voter pour Amadou Toumani Touré au deuxième tour des présidentielles de 2002 ?
IBK : Non, c’était un pari à faire, maintenant, à l’arrivée, nous ferons le bilan.
Question : Et c’est un bilan critique ?
IBK : Assurement, assurement.
Question : En juillet dernier, le pouvoir a signé la paix avec les rebelles tourags à Alger. Et-ce que la paix ne méritait pas quelques concessions comme cette amnistie accordée aux rebelles ?
IBK : Vous savez, nous avons simplement souligné à l’époque notre souhait que l’Etat malien assuma ses responsabilités regaliennes. Nous ne sommes pas contre la paix, loin sans faut, mais une paix réelle n’est pas une paix factice. On le voit aujourd’hui, il y a des difficultés de mise en oeuvre de l’Accord d’Alger qui sont réelles.
Question : Voulez-vous dire que le gouvernement a signé trop vite ?
IBK : Je crois que cela est d’évidence.
Question : La France vous propose de signer un accord pour la réadmission des clandestins maliens chez eux au Mali, vous êtes pour ou contre ?
IBK: Vous savez, moi je suis pour tout ce qui préserve la dignité des Maliens en France. Tout ce qui les atteint dans leur dignité, je ne suis absolument pas pour cela. J’ai le plus grand respect pour la politique intérieure française, mais maintenant, quand cette politique touche à la dignité des Maliens, ou qu’ils soient, là, je demande à l’ami français de revoir un peu sa copie. Je pense que s’il s’agit de signer un accord pour permettre de délivrer à tour de bras des laisser-passer et dans les conditions que l’on sait, notamment menotter, humilier dans des avions, cela n’est pas digne de l’amitié entre la France et nous.
Question : Est-ce qu’ATT a eu raison ou non d’acceuillir Nicolas Sarkhozy cette année à Bamako ?
IBK : Vous savez, le président de la République, face à une demande d’un homme d’Etat et quel homme d’Etat, Nicolas Sarkhozy ne pouvait faire autrement que de l’acceuillir au Mali qui est un pays d’hospitalité. Et je pense que là, il n’y a rien à dire à ce niveau là. Nicolas Sarkhozy restera toujours le bienvenu dans ce pays, cela n’empêche que nous puissions avoir quelques divergences avec lui sur la manière d’envisager certains problèmes.
Question : Ibrahim Boubacar Kéïta, vous êtes en train de créer une alliance l’ARC, mais le MPR de Choguel Maïga et le CNID de Me Mountaga Tall sont passés dans le camp ATT. Est-ce que vous n’êtes pas fragilisé?
IBK : Pas du tout, cher ami, pas du tout, pas du tout. Vous savez, dans ce pays, on sait le poids de chacun. Je suis très très serein.
Question : Depuis septembre dernier, un livre fait scandale à Bamako, c’est ATT-cratie qui dénonce les dérives vraies ou supposées du régime. L’éditeur est attaqué en justice, à Paris, il vous demande de venir témoigner en sa faveur. Est-ce que vous irez ?
IBK : Eh non, je ne suis pas concerné par cette affaire. Je vais déplorer tout ce qui peut toucher à la dignité, à l’honneur d’un homme, je ne m’ y associe pas. Les attaques politiques pour moi, se situent en-dessus et non pas en-dessous de la ceinture.
Question : Que pensez-vous de ce livre ?
IBK : Evidemment, je vous avoue que je ne l’ai pas lu intégralement, les premières pages m’ont suffi.
Question : Pourquoi ?
IBK : Non, non, non, je dis que d’entrée de jeu ce qui est dit et qui attaque de manière très personnelle le Chef de l’Etat qui, par ailleurs, est un frère, je considère comme tel, je ne l’ai pas apprécié, je n’ai pas souhaité poursuivre c’est tout.
Question : Mais, vous savez que l’Harmattan vous demande de venir témoigner ?
IBK : Ah non, je n’ai pas reçu de demande à ce niveau là, et je ne crois pas que je répondrai à une telle demande. Mon combat n’est pas dans ce créneau là. Et vous êtes le premier à m’apprendre que l’Harmattan souhaite que je vienne témoigner.
Question : Ah bon ?
IBK : Je vous assure.
Transcrite par Daba Balla KEITA
Source : RFI
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