Souleymane Cissé hier à l’inauguration de son monument à Ouaga :\Je dédie ma statue à mon père et à ma mère”

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La statue de notre compatriote, Souleymane Cissé, brille désormais au cœur de Ouagadougou, dans la colonne des Etalons, sur l’avenue Mgr Thévenoud qui mène à la place des cinéastes. La cérémonie de dévoilement du monument a eu lieu, hier, en présence du président de la Commission d’organisation du Fespaco, de l’ancien ministre de la Culture, Cheik Oumar Sissoko, du ministre de l’Emploi et de la formation professionnelle, Iba N’Diaye, du président de la Commission de l’UEMOA, Soumaïla Cissé, l’Ambassadeur du Mali au Burkina Faso, le Général Seydou Traoré et du Directeur du CNCM, Moussa Ouane et des autorités en charge de la culture du Burkina Faso.

Dans son intervention, le président de la Commission de l’UEMOA, Soumaïla Cissé a exprimé toute sa fierté de participer à cet hommage dédié à un créateur encore présent parmi nous. Pour lui, cette excellente initiative qui valorise les créateurs est un signe de reconnaissance pour les hommes de culture en général et les cinéastes en particulier. "Cinéaste d’exception, homme engagé, Souleymane Cissé mérite amplement cet hommage. Nous souhaitons que cette statue soit pour les jeunes générations le symbole du courage, de la créativité et surtout de la liberté de ton et d’action ", a-t-il déclaré.

Pour le Directeur général du Centre National de la Cinématographie du Mali (CNCM) Moussa Ouane, ce geste est tout simplement la récompense du  mérite d’un monument du cinéma africain. Souleymane Cissé dédie sa statue à ses parents. " Je dédie ma statue à mon père et ma mère, qui dès le bas âge m’ont permis de voir le cinéma et d’aiguiser ma curiosité de cinéaste ", a-t-il déclaré.

En plus de cet honneur qui l’immortalise pour l’éternité, Souleymane Cissé est Commandeur de l’Ordre national du Mali, depuis, le 1er janvier 2006. Il est également, Commandeur des Arts et Lettres de la République Française.

C’est grâce au soutien de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et d’ECOBANK (Burkina) que la colonne a été enrichie par les sculptures des réalisateurs  Souleymane Cissé et Gaston Kaboré du Burkina Faso.

Soumaila GUINDO , Envoyé spécial  

 

Souleymane Cissé : "Mes Etalons de Yennenga ont été des signes forts d’encouragement  pour moi dans le métier du cinéma"

Il a déjà "l’éternité" pour lui: le réalisateur malien Souleymane Cissé est le seul à avoir remporté deux Etalons de Yennenga, plus haute distinction du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), dont la 22è édition s’achève ce samedi 5 mars. A bientôt 71 ans, la passion l’anime toujours même si, lauréat en 1979 avec "Baara" (Le Travail) et en 1985 avec "Fin Yé" (Le Vent), il a depuis quinze ans laissé "la place aux jeunes".

Que vous ont apporté vos deux sacres au Fespaco?

 ça donne le respect, toute l’éternité on te reconnaîtra comme lauréat de l’Etalon de Yennenga. Ces prix ont été des signes forts d’encouragement pour moi dans ce métier, si bien qu’après "Baara" en 1979, j’ai fait "Fin Yé" et ensuite "Yeleen". Du moment que tu portes l’Etalon, tu n’as plus droit à l’erreur, tu ne dois plus chuter. C’est une distinction lourde à traîner, les autres lauréats vous le diront. ça donne une reconnaissance internationale. Les titres ont un tout petit peu amélioré l’obtention des financements pour les autres films, mais pas comme on le souhaiterait. Ce n’est pas comme si on avait la Palme d’or à Cannes!

Les films primés à Ouagadougou ne rencontrent pas souvent le succès escompté, qu’en fut-il pour vous?

 Je vis de mes films donc je ne peux pas me plaindre dans ce domaine quand on regarde les réalités de ce continent. Il y a des films qui restent dans le temps et qui ne sont pas du goût du grand public, il y en a d’autres qui dès leur sortie ont un succès fou mais pas dans le temps. Aujourd’hui, les jeunes voient le cinéma (avec une idée) de misérabilisme, de mendiant qui doit quémander chaque fois des financements à l’Europe. Il faut que la nouvelle génération de cinéastes africains se dise qu’ils ne sont pas des maudits, que leur devoir c’est d’aider les peuples à avancer.

Faut-il des films engagés comme votre "Fin Yé", sur un massacre d’étudiants par l’armée malienne, pour aider les peuples à se prendre en main comme les citoyens des pays arabes le font actuellement?

Les cinéastes africains sont déjà au côté de leurs peuples donc ils sont engagés. Très peu vivent en exil, pourtant ils ne sont pas très applaudis chez eux. Ce qui se passe en Afrique du Nord, le cinéma a déjà traité de cela. Un film comme "Fin Yé" sorti en 1982 a déjà traité de cela. Avant même le discours (du président français François Mitterrand à) La Baule (1990), ce film a préfiguré la démocratisation dans les années 1990 en Afrique. Mais on peut aussi le lier aujourd’hui aux soulèvements populaires en Afrique du Nord où le vent est en train de souffler les régimes autoritaires ou dynastiques en place. Les combats des peuples sont ceux des cinéastes et ces révoltes en préfigurent d’autres dans d’autres contrées. Un scénario en appelle un autre, forcément. Vous ne croyez pas?

                                          Propos recueillis par Romaric Ollo Hien

 

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